Histoire du Consulat et de l'Empire
1810. Alors qu'il ne restait plus que dix quotidiens publiés à Paris en 1810, le gouvernement procède à de nouvelles fusions. Ainsi en 1810, La Gazette de France absorbe Le Publiciste. En 1811, Le Journal de Paris englobe de même plusieurs petits journaux. Le fait que leurs rédacteurs ne partagent pas les mêmes opinions importe peu, aux yeux du gouvernement, puisque la presse est désormais censée rendre compte de la seule parole officielle, les divergences d'opinion n'étant pas admises. Parallèlement, le gouvernement procède à la recomposition du capital de ces titres, en faisant en sorte qu'ils passent entre des mains amies. C'est ainsi que les frères Bertin, propriétaires du Journal des débats, se trouvent dépossédés de leur titre au profit de proches de Napoléon. À la suite de ces remaniements, il ne reste plus que quatre journaux parisiens : le Moniteur, Le Journal des débats, Le Journal de Paris et La Gazette de France. Leur audience est dérisoire, puisque leur tirage global ne dépasse pas les trente-cinq mille exemplaires. Même si le public lettré reste limité, il apparaît clairement que la censure pratiquée a été une entrave au développement de la presse. Ce contrôle a également des répercussions en province, puisque le gouvernement limite le nombre de journaux à un par département. Ce titre unique devient de fait l'organe officiel de la préfecture.
L'action de la police s'exerce aussi sur le contrôle du colportage, réglementé à partir de 1810. Une directive du 28 décembre spécifiait 329
L'ÉCHEC DU SURSAUT DYNASTIQUE (1810-1815)
en effet « que les imagiers, dominotiers, ne pourraient imprimer sans examen, au bas de leurs images, des explications ou des chansons propres à être colportées et qui seraient dans le cas d'être examinées, si elles sortaient des presses d'un imprimeur ». La censure s'applique donc aux simples individus, soumis à une véritable autocensure. Napoléon a pris conscience de l'influence des images, almanachs ou petits livres vendus par ces colporteurs à travers la France. Enfin, les correspondances particulières continuent d'être soumises à l'examen du cabinet noir, dirigé par le directeur des Postes, Lavalette. Ainsi, aucun domaine de la pensée ou de l'expression n'échappe à la vigilance policière. Une chape de plomb s'est abattue sur le monde des idées.
2. L'ÉTOUFFEMENT DE LA VIE PARLEMENTAIRE
Depuis le début de l'Empire, le rôle des assemblées s'était étiolé au fil des ans. L'année 1810 marque un tournant incontestable dans la vie politique de l'Empire, dans la mesure où Napoléon gouverne désormais en restreignant considérablement le recours aux assemblées. La session de 1810 s'était ouverte le 1er février. La première tâche des députés avait consisté à se choisir un nouveau président, Fontanes qui occupait ces fonctions depuis six ans étant devenu grand maître de l'Université. Conformément aux règles de l'assemblée, les députés devaient établir une liste de quatre noms au sein de laquelle Napoléon en retiendrait un. Leur choix se porte sur Stanislas de Girardin, Raymond de Montesquiou, Tyron de Montalembert et le général Le Marois. Tous les quatre ont servi l'Ancien Régime.
Napoléon porte son choix sur Montesquiou, confirmant ainsi son souhait d'orienter son régime dans un sens monarchique. Le nouveau président appartient en effet à une très ancienne famille de l'aristocratie française. Resté en France pendant toute la Révolution, il avait tôt rallié la cause de Bonaparte et avait assisté au sacre.
Déjà Napoléon l'avait distingué en le nommant grand chambellan en remplacement de Talleyrand. C'est donc un fidèle de l'Empereur, un des hauts dignitaires de l'Empire qui accède à la charge de président du Corps législatif. Cette orientation du Corps l�gislatif est confirmée par la désignation des nouveaux membres. A partir de 1810, la part des anciens nobles s'accroît, sans jamais être prépondérante ; elle représentait 7 % des députés nommés entre 1804 et 1810, ce pourcentage passe à 15 % entre 181 1 et 1814. La physionomie de l'assemblée se modifie donc progressivement. Les députés qui ont occupé une fonction politique sous la Révolution ne sont plus majoritaires, le nombre de ceux qui ont appartenu à la Convention est résiduel. De plus, l'ouverture du Corps législatif aux départements réunis contribue à diluer les anciens
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