Histoire du Consulat et de l'Empire
couronnement de Napoléon comme roi d'Italie, en mai 1805. En outre, lorsque Napoléon cherche à faire aboutir un projet de concordat pour les catholiques d'Allemagne, Pie VII s'y oppose.
Il a désormais compris que Napoléon avait pour seule ambition d'utiliser l'Église à son profit. A la suite de cet affrontement, l'Église catholique des territoires allemands passés sous l'influence de la France se trouve complètement désorganisée. Pie VII est davantage touché encore, cette fois-ci dans sa chair, lorsque, en 342
LA CRISE DU SACERDOCE ET DE L'EMPIRE
octobre 1805, l'armée française occupe le port d'Ancône, possession du pape. Cette occupation, en violation de la neutralité affichée par la papauté au cours de la troisième coalition, pouvait apparaître comme une menace pour l'intégrité des États pontificaux, incapables d'assurer seuls leur défense face à la puissante armée fran
çaise. Soupçonné par Napoléon d'avoir été trop bienveillant à l'égard de l'Autriche et du royaume de Naples, le pape subit les premières foudres impériales. Son indépendance est maintenant soumise au bon vouloir du maître de l'Europe. Et si Pie VII en avait douté, Napoléon le lui rappelle avec force : « Votre Sainteté est souveraine de Rome, mais j 'en suis l'empereur 1. » Pour bien manifester son pouvoir, Napoléon envoie des troupes dans les États pontificaux, le long de la côte adriatique. Puis, en avril 1806, il décide de rappeler son oncle, le cardinal Fesch, qui était l'ambassadeur de la France auprès du Saint-Siège et avec lequel le pape pouvait s'entretenir à loisir. Ce rappel est symptomatique du divorce entre les deux pouvoirs, à l'heure où Napoléon place les siens sur les trônes d'Europe. Mais l'Empereur va plus loin encore, en exigeant le renvoi de Consalvi qui occupait les fonctions de secrétaire d'État. Il obtient satisfaction en juin 1806. Ainsi disparaissent de la scène les principaux artisans de la reconstruction concordataire entreprise depuis 1802. Une nouvelle ère s'ouvre dans les relations entre la France et la papauté.
Or, en 1806, le contexte en Europe a considérablement changé.
En 1800, lorsque Pie VII acceptait de négocier avec Bonaparte, il pouvait espérer ramener dans le giron de l'Église un grand pays de tradition catholique, renforcé en outre de ses marges belges, rhénanes et piémontaises. En 1806, la France apparaît au contraire comme une menace pour l'intégrité du catholicisme ; elle a soumis à sa loi religieuse l'Italie du Nord, elle vient de conquérir le royaume de Naples ; elle a fait plier la très catholique Autriche et s'est imposée sur les terres catholiques de l'Allemagne méridionale, en particulier la Bavière. L'Espagne enfin est l'alliée de la France.
L'Europe catholique est alors peu ou prou sous domination fran
çaise. Le conflit qui se prépare entre Napoléon et Pie VII est aussi une lutte d'influence qui vise au contrôle spirituel sur l'Europe. Il fait revivre le vieil antagonisme entre les empereurs germaniques et les papes gu Moyen Age. Comme à cette épogue, Pie VII entend faire face. Epaulé par un nouveau secrétaire d'Etat, le cardinal Casoni, il envisage dès septembre 1806 une condamnation des principes mis en application en France. Le mois suivant, il refuse d'appliquer le Concordat en l'Italie, en renonçant à donner aux nouveaux évêques l'investiture canonique. La lutte se prépare donc, mais en France, on n'en perçoit alors aucun écho. L'Église gallicane, soudée derrière Napoléon, approuve dans l'ensemble le Catéchisme impérial et fait célébrer la Saint-Napoléon, remerciant par là même le pouvoir pour les faveurs accordées à l'Église. À
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L'ÉCHEC DU SURSAUT DYNASTIQUE (1810-1815)
Rome, on ne prise guère les manifestations d'allégeance de l'épiscopat au nouveau Cyrus.
La guerre de la quatrième coalition renforce encore l'emprise de Napoléon sur l'Europe catholique, avec notamment l'érection du grandduché de Varsovie. De plus, à la fin de 1807, la France paraît en mesure d'étendre son influence sur le Portugal. La résistance pontificale est donc de plus en plus difficile à tenir, ce qui conduit le pape à accepter de négocier un accord concernant les différends religieux en cours. Les négociations sont conduites par le cardinal de curie français Lattier de Bayane. La France souhaitait une promesse ferme du pape de s'engager contre l'Angleterre, une extension du
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