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Histoire du Consulat et de l'Empire

Histoire du Consulat et de l'Empire

Titel: Histoire du Consulat et de l'Empire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques-Olivier Boudon
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travail législatif, Bonaparte savait qu'il n'empêcherait pas toute critique de s'élever.
    Il prit soin cependant de séparer les assemblées. Alors que le Sénat siégeait au Luxembourg où les consuls étaient encore installés pour 58
     

    LA MISE EN PLACE DU CONSULAT
    un temps, avant leur transfert aux Tuileries, le Corps législatif s'installait dans l'actuel Palais-Bourbon, siège des assemblées du Directoire, tandis que le Tribunat trouvait place dans l'ancien Palais
    Royal, rebaptisé Palais-Égalité. Les tribuns se plaignirent du reste de la proximité de lieux de plaisir installés dans les galeries voisines.
    Les centres du pouvoir sont ainsi répartis sur quatre sites, cette division géographique de part et d'autre de la Seine symbolisant la volonté de dilution des pouvoirs, auxquels Bonaparte peut dès lors mieux imposer son autorité. Seul le Tribunat tente, dans les premières années du régime, de faire entendre sa voix. Il se manifeste notamment en élisant comme président l'Idéologue Daunou. Certes, ce dernier avait participé à la rédaction de la Constitution de l'an VIII, mais, proche de Sieyès et attaché au libéralisme, il n'avait pas caché son intention de rogner les pouvoirs, à ses yeux trop étendus, du Premier consul. Ce dernier était intervenu pour lui fermer les portes du Sénat, avant qu'il ne soit finalement envoyé au Tribunat dont il assume la première présidence. Le choix du Corps législatif a une portée moindre, puisqu'il élit à sa présidence, en janvier 1800, un député sans grande envergure en la personne de Jean
    Baptiste Perrin des Vosges, négociant à Épinal. Cet ancien régicide, rallié à Bonaparte depuis le 18-Brumaire, illustre la volonté d'orthodoxie d'une assemblée qui peut seule faire barrage, en les repoussant éventuellement, aux projets de Bonaparte. D'emblée donc le Tribunat s'affirme plus irrespectueux des pouvoirs en place que le Corps législatif, ce qu'illustrent les premiers débats parlementaires de la France consulaire.

3. UNE TIMIDE OPPOSITION PARLEMENTAIRE
    À l'ouverture de la session parlementaire, le ton est donné. Si Bonaparte pensait faire taire les critiques, il se trompait. En effet, dès le dépôt du premier projet de loi, relatif à l'organisation du travail législatif, des voix s'élèvent au Tribunat pour dénoncer les procédés du gouvernement. Plusieurs orateurs critiquent la forme même du projet, mal, rédigé, lorsque se lève un tout jeune tribun, Benjamin Constant. A la différence de la plupart de ses collègues, qui avaient usé leur habit sur les bancs des diverses assemblées révolutionnaires, Benjamin Constant est alors un novice en politique, ce qui ne lui en donne que plus de fougue, d'autant que l'amant de Germaine de Staël, à qui il doit d'avoir été désigné au Tribunat, s'est passionné pour les débats politiques depuis les débuts de la Révolution. Constant monte à la tribune, le 5 janvier 1800, et se lance dans une démonstration visant à préciser les droits du Tribunat. À ses yeux, il ne doit pas être un lieu d'opposition systématique, mais doit examiner les projets qui lui sont proposés sans 59
     
    LA RÉPUBLIQUE CONSULAIRE (1799-1804)
    parti pris, pour espérer avoir de l'influence : « L'opposition est sans force alors qu'elle est sans discernement, et des hommes dont la vocation serait de résister à l'établissement des lois utiles ne seraient bientôt écoutés qu'avec indifférence, lors même qu'ils en combattraient de dangereuses », et Constant poursuit un peu plus loin :
    « Le Tribunat n'est point une assemblée de rhéteurs, n'ayant pour occupation qu'une opposition de tribune et pour but que des succès d'éloquence 5. » Il défend toutefois le droit de critique lorsque les projets sont jugés néfastes et invite en l'occurrence à repousser le premier projet de loi proposé par le gouvernement.
    La réaction de Bonaparte est vive, théâtrale même : « C'est une honte, s'écrie-t-il. C'est un homme qui veut tout brouiller et qui voudrait nous ramener au 2 ou 3 septembre. Mais je saurai le contenir. J'ai le bras de la Nation levé sur lui. » Dans sa réponse, le Premier consul fait peser l'ombre des massacres de septembre 1792
    pour alourdir le débat. Surtout il oppose la Nation au Tribunat, déniant ainsi à cette assemblée toute représentativité populaire, alors que lui-même peut se targuer d'avoir été légitimé par un plébiscite victorieux. Le

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