Histoire Romaine
les choses qui tenaient à leur constitution et à leur
administration particulières, ou qui n’avaient plus trait aux devoirs fédéraux :
de plus, et réunies en un corps de trente cités, elles conservèrent d’abord
leur autonomie réelle en face de Rome. Quand l’histoire affirme que vis-à-vis d’elles,
Albe avait exercé une prépondérance plus grande que celle accordée ensuite à
Rome, et qu’après la chute de la première, elles maintinrent leur indépendance
extérieure, l’histoire dit vrai, peut-être. Albe était essentiellement ville
fédérale : Rome, au contraire, formait un État séparé, placé à côté de la
confédération bien plus qu’au dedans d’elle. Il en fut ici, sans doute, comme
de la souveraineté des États de la Confédération du Rhin : souveraineté
indépendante selon la lettre de la loi, tandis que les États de l’ancien empire
d’Allemagne relevaient d’un commun suzerain. En fait, la prééminence de la cité
d’Albe ne fut guère qu’un titre honorifique, semblable à celui de l’empereur
allemand ; le protectorat de Rome, au contraire, emporta une véritable
domination, comme il en a été plus tard du protectorat de Napoléon vis-à-vis
des États Rhénans. Albe avait la présidence dans le conseil fédéral : Rome
laisse les représentants des cités latines délibérer entre eux, sous la
présidence d’officiers qu’elles ont choisis ; elle se contente de la
préséance d’honneur dans les fêtes fédérales ; elle érige un second
sanctuaire fédéral dans ses murs mêmes, le Temple de Diane, sur l’Aventin ;
et dorénavant la religion a ses doubles solennités consacrées à l’alliance on
sacrifie à Rome, pour Rome et le Latium ; on sacrifie en pays latin, pour
le Latium et pour Rome. Celle-ci, d’ailleurs, avait pris l’important engagement
de ne point former d’alliance séparée avec une autre cité latine : stipulation
qui témoigne clairement des inquiétudes suscitées chez les fédérés par la
puissance et l’influence agrandies de leur voisine. Si telle était la position
de Rome, en dehors et à côté plutôt qu’au dedans de la confédération latine, il
en devait sortir une préoccupation constante du maintien de l’égalité entre les
deux parties contractantes. Or, cette préoccupation se manifeste aussitôt dans
les combinaisons adoptées en cas de guerre. L’armée confédérée, ainsi que le
démontre irrésistiblement le mode ultérieur de son recrutement, est formée de
deux contingents, l’un romain et l’autre latin, de force égale. Le commandement
supérieur alterne entre Rome et le Latium ; dans l’année où il appartient
à Rome, le contingent latin vient jusqu’aux portes de la ville et réclame pour
chef le général choisi par les Romains, après toutefois, que les augures
romains, délégués par le conseil général latin, ont consulté le vol des oiseaux,
et se soit assurés que ce choix a reçu l’assentiment des dieux. Tout le gain
fait à la guerre est aussi partagé, terres et butin, en deux parts égales, entre
Romains et Latins. L’égalité des droits et des devoirs fédéraux est donc
maintenue partout avec une extrême jalousie ; et nous croyons volontiers
que dans les premiers temps aussi Rome n’a pas eu le pouvoir de représenter
seule la ligue auprès de l’étranger. Les traités n’interdisent ni à Rome ni aux
Latins d’entamer au dehors, et pour leur compte, une guerre offensive. Mais, quand
la ligue tout entière a pris les armes, soit en vertu d’une décision du conseil
fédéral, soit pour repousser une attaque de l’ennemi, ce conseil a évidemment à
délibérer sur la conduite et la mise à fin de la guerre. Tel était l’état de
droit au début ; mais je soupçonne que, dès l’époque où nous sommes, Rome
avait conquis la prééminence réelle au sein de la ligue : entre une cité
forte et unie et une confédération de cités qui se lient par un traité durable
d’alliance, la prépondérance appartient bientôt à la première.
Albe est tombée, et Rome, maîtresse d’une région
considérable, devient la puissance dirigeante au sein de la ligue latine. Nul
doute qu’elle n’augmentera tous les jours son territoire médiat et immédiat. Ici,
le détail des faits nous échappe. La possession de Fidènes est l’objet de
luttes quotidiennes avec les Étrusques, avec les Véiens surtout. Mais, en dépit
des Romains, cet avant-poste de l’ennemi,
Weitere Kostenlose Bücher