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Hitler m'a dit

Hitler m'a dit

Titel: Hitler m'a dit Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hermann Rauschning
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la veille encore, eût paru inconcevable. Petits et grands dans le parti affichaient sans se gêner leur volonté d’accaparer, de jouir, de se dédommager des privations passées et surtout d’entasser pour l’avenir. Ne rien laisser aux autres, se garder de tout risque, se maintenir au peloton de tête, éviter à tout prix de retomber dans la foule des anonymes, dans la masse des sans-pouvoir. Les antichambres regorgeaient de chasseurs de places qui exprimaient leurs exigences sans vergogne : « Le Führer l’a dit », répondaient-ils naïvement, « les vieux combattants doivent tous avoir un emploi et du pain. Aurions-nous combattu pour rentrer chez nous les mains vides ? »
    Quelqu’un me demanda un jour une place déconseiller d’État à Dantzig. Ce qui l’intéressait, n’était pas tellement le traitement ou l’emploi, mais le droit à la pension. Il voulait être assuré pour toujours. Dieu sait que ces quémandeurs n’étaient pas de véritables combattants.
    Presque tous étaient de pauvres diables, suant de peur pour l’avenir. « Je ne veux pas retomber dans la misère » me cria un jour un autre avec emportement. « Vous pouvez peut-être attendre, vous, vous n’avez pas le feu au derrière. Vous ne savez pas ce que c’est que d’être chômeur ! Plutôt que de recommencer, je commettrai n’importe quel crime. Je veux me maintenir à la surface à n’importe quel prix. L’occasion ne reviendra plus. »
    Des besogneux, des criminels, voilà ce qui constituait la « vieille garde » d’Hitler. Chacun cherchait à faire sa pelote et pouvait se référer aux promesses du Führer. Personne, si haut placé fût-il, n’était sûr que ce beau temps durerait toujours. Personne n’avait confiance dans une ère nationale-socialiste de mille ans. Le président d’une grande banque m’avoua un jour ouvertement qu’il avait exposé sa peau pendant la guerre mondiale, mais qu’il ne pensait plus du tout à risquer quoi que ce fût. Il était disposé à tout accepter pour ne pas se compromettre, car, disait-il, il n’avait plus la moindre envie de risquer sa peau.
    Une course effrénée au profit cynique commençait. Les vieilles classes dirigeantes voulaient se maintenir au pouvoir. Laissant de côté toute honte et toute dignité, elles se cramponnaient à leurs positions et faisaient servilement tout ce qu’on exigeait d’elles, pour ne pas perdre leur part du gâteau. Les femmes, plus acharnées que les hommes, les poussaient à plier et céder ; elles ne voulaient pas renoncer aux belles voitures et aux riches résidences. C’étaient elles qui minaient de leurs doléances la conscience de leurs maris, leur répétant qu’il fallait penser aux enfants et à leur avenir. La nouvelle classe des parvenus nazis de son côté cherchait à percer brutalement et par tous les moyens. À aucune époque on n’a vu en Allemagne une telle déchéance de l’honnêteté et du caractère. Pourquoi n’a-t-on pas acheté toute cette clique ? Elle était à vendre, les vieux et les jeunes, l’ancienne classe dirigeante avec la nouvelle, en bloc et en détails. Elle était, elle est encore au plus offrant. Cela aurait coûté moins cher que la guerre.

XVIII
 
LA QUESTION D’ARGENT
N’A AUCUNE IMPORTANCE
    La question d’argent n’avait d’ailleurs aucune importance dès qu’il s’agissait des finances de l’État. « Nous avons de l’argent autant que nous voulons. C’est vous qui ne voulez pas », hurlait le Gauleiter Forster, en automne 1933, lorsque j’élevais quelque objection à ses projets de grands travaux, de construction de théâtres, de piscines couvertes, de tramways confortables, de routes luxueuses et de transports modernisés d’ordures ménagères. À commencer par Hitler, aucun de ces aventuriers n’avait la moindre notion de la valeur de l’argent. L’argent ! D’abord, ils n’arrivaient pas à faire la différence entre le moyen de paiement et le capital. En se basant sur les idées simplistes de leur maître, ils s’étaient fait une théorie monétaire qui se résumait à peu près ainsi : on pouvait à volonté multiplier et dépenser les billets, il s’agissait simplement de maintenir les prix.
    Je me trouvais constamment en désaccord avec le parti. Hitler devait arbitrer. Son arbitrage était tel que je pouvais l’attendre. Mais les idées d’Hitler étaient-elles vraiment aussi rudimentaires ? À cette époque, il me vint des

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