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Hitler m'a dit

Hitler m'a dit

Titel: Hitler m'a dit Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hermann Rauschning
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dans toute sa clarté ; mais on ne voulait pas perdre une minute. C’est ainsi que se déchaîna de toutes parts une véritable fureur d’organisation. L’économie allemande traditionnelle, à la fois si complexe et si fragile, connut alors une invasion d’organisateurs barbares, qui bousculèrent de fond en comble tout ce qui existait et fonctionnait avant eux. Cette fièvre organisatrice n’eut d’autre effet que de semer partout le mécontentement et la résistance.
    Il était évident que l’énorme quantité de chômeurs rendait nécessaire une intervention de l’État dans l’ordre économique. Mais cette intervention augmenterait-elle vraiment la production ou ne serait-ce qu’un remède passager ? L’augmentation de la production et la coordination des diverses branches économiques constituaient-elles le but véritable des plans qu’on voulait appliquer ? N’avait-on pas plutôt l’arrière-pensée de subordonner toute l’activité économique à l’État ou plus exactement à un parti ? Et dans ce cas, qu’adviendrait-il de l’économie tout court ?
    À Dantzig, nous nous débattions au milieu des mêmes problèmes, mais sur une plus petite échelle. Là aussi, on se livrait allègrement à la manie organisatrice. Pour ma part, il me semblait possible d’imaginer de nouvelles formes d’un protectionnisme qui aurait amélioré notre situation vis-à-vis de la Pologne. L’idée d’un véritable État corporatif et d’une modernisation du mercantilisme ne me paraissait pas non plus déraisonnable a priori. Mais Forster voulait aller vite. Il avait l’ambition d’être le premier à réaliser la « réforme corporative » afin de briller aux yeux d’Hitler. Il fit venir le jeune auteur de la brochure, dont j’ai parlé plus haut. Le jeune homme arriva à Dantzig, tout plein de son importance, avec le dessin de poser dans notre ville la première pierre du grand œuvre de sa vie.
    Dantzig s’était très vite révélé comme l’endroit le moins indiqué pour des expériences économiques. C’était un port de trafic international qui, de plus, n’avait pas d’autonomie douanière. Le mieux eût certainement été de laisser son commerce s’épanouir dans la plus grande liberté possible et de ne provoquer en aucun cas des complications et des réglementations, dont le seul résultat ne pouvait être que l’émigration du trafic commercial vers des ports plus favorisés. J’étais donc d’avis que nous n’avions rien de mieux à faire que de renoncer entièrement à toute expérience « corporative ».
    Ma façon de voir fut l’origine d’un conflit sérieux avec le parti, qui ne se proposait pas autre chose et ne voyait pas plus loin que l’annexion économique de la Ville Libre. Je refusai formellement de donner force de loi au plan corporatif. Il y eut des plaintes contre moi de divers côtés et le lieutenant d’Hitler, Hess, me convoqua un beau jour. Il me parla avec cette brièveté sentencieuse qui lui est habituelle et voudrait donner l’impression de la profondeur, mais qui n’est rien d’autre au fond qu’une preuve de l’hésitation et de la gaucherie d’un esprit sans maturité. Il se borna à m’adresser les vagues observations d’un homme incompétent. Finalement, le litige fit l’objet d’une conversation avec Hitler.
    — « Que se passe-t-il donc ? » me demanda le Führer. Je lui fis part de mes objections aux plans de réglementation économique. Il parut vivement étonné et me dit qu’il ne songeait nullement à prendre à son compte toutes ces insanités. Forster avait-il donc oublié que le système de l’État corporatif avait été depuis longtemps ajourné à des temps meilleurs ? Je répondis que je n’en avais rien su, sinon je me serais épargné beaucoup de travail et de tracas inutiles. Hitler s’engagea aussitôt, suivant son habitude, dans un long plaidoyer pour justifier sa décision et il m’esquissa les grandes lignes de ses idées socialistes, ou tout au moins de celles qu’il professait à cette époque.
    — « Voulez-vous renoncer définitivement au plan corporatif ? » lui demandai-je.
    — « Pour l’instant, cette formule est dénuée pour moi de tout sens précis », répondit Hitler, « et je suis certain qu’elle ne représente rien non plus à votre esprit. Depuis de nombreuses années, Mussolini travaille à mettre debout son État corporatif. Mais il n’est arrivé à rien. Cela

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