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Iacobus

Iacobus

Titel: Iacobus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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sans
aucun doute une nature profondément sanguine, et aussi bilieuse, très différente
au fond de l’image de lenteur impassible qu’il avait donnée en entrant. Ce que
m’avait raconté frère Robert sur ses triomphes rapides et son caractère
énergique ne m’étonnait plus maintenant.
    — Vous devez vous demander quelle
importance tout cela peut bien avoir ? Eh bien, sans parler de
l’humiliation publique que don Diniz veut nous infliger à la face du monde, se
riant de l’Église et de son pasteur, il reste encore deux ou trois choses.
Imaginez un instant que nous lui refusions notre permission, que se
passera-t-il ?
    — Je ne sais pas quel..., interrompis-je
sans me rendre compte.
    — Je n’ai pas terminé, frère !
cria-t-il. Si l’ordre du Temple voit son désir de renaître de ses cendres au
Portugal contrecarré par moi, il essaiera probablement de faire élire un
nouveau pape plus en accord avec ses plans. Il se peut très bien qu’outre ce
Joao Lourenço que nous a envoyé don Diniz, d’autres Templiers cachés dans la
forteresse attendent ma réponse pour en finir avec moi si cela se révèle
nécessaire.
    — Même si vous aviez raison, osai-je dire,
l’ordre des Templiers prendrait alors le risque de voir le prochain pape lui
refuser l’autorisation à son tour. Et alors que fera-t-il... Assassiner un pape
après l’autre jusqu’à ce qu’il en trouve un qui se soumette enfin à ses
exigences ?
    — Oui, oui, je vois où vous voulez en
venir, mais vous n’y êtes pas du tout ! Il ne s’agit pas du prochain pape
ou des cinquante prochains papes... Il s’agit de moi, de ma pauvre vie mise au
service de Dieu et de l’Église ! La question est : les Templiers
oseront-ils me tuer si je rejette leur demande ? Peut-être pas, il se peut
que leur réputation soit exagérée... Vous vous souvenez de la malédiction de
Jacques de Molay ? Vous avez entendu parler de l’affaire ?
    Selon la légende qui avait circulé de bouche à
oreille et fait le tour de la chrétienté, quand les flammes du bûcher sur
lequel brûlait Jacques de Molay, ultime grand maître de l’Ordre, tremblèrent
sous une forte rafale de vent, le condamné demeura visible pendant quelques instants.
Profitant de cette trouée, le grand maître, qui avait la tête levée vers la
fenêtre du palais où se trouvaient le roi, le pape et le garde des Sceaux,
hurla à pleins poumons : «  Nekan, Ado-nai !... Chol Begoal... Pape Clément V !... Chevalier Guillaume de Nogaret !... Roi Philippe
IV ! : je vous condamne à comparaître devant le tribunal de Dieu avant une
année pour recevoir votre juste châtiment... Maudits ! Maudits soyez-vous
jusqu’à la treizième génération ! » Un silence menaçant suivit ses
paroles avant que son corps ne disparaisse à jamais entre les flammes. Le plus
terrible fut qu’en effet la malédiction s’accomplit : les trois hommes
moururent dans l’année.
    — Les rumeurs qui circulent sur ces décès,
poursuivit Jean XXII, ne sont peut-être rien d’autre que des fables inventées
par le peuple, des mensonges que l’ordre du Temple a fait lui-même circuler
pour accroître son image de force armée, secrète et puissante, à laquelle nul
ne peut échapper. Qu’en dites-vous, frère ?
    — C’est possible, Votre Sainteté.
    — Oui, c’est possible... Mais moi, j’ai
besoin de certitudes ! Je vous charge donc de tirer cette histoire au
clair. Telle est votre mission. Je veux des preuves, don Galcerán, des preuves
qui me permettront de déterminer clairement si les morts du roi Philippe, du
conseiller Nogaret et du pape Clément V relevaient de la volonté de Dieu ou
bien de ce misérable Jacques de Molay. Votre savoir de médecin et votre grande
sagacité vous seront bien précieux. Mettez vos dons au service de l’Église et apportez-nous
les confirmations que je vous demande. Si ces trois décès sont dus à la volonté
de Notre-Seigneur, je pourrai repousser en toute sérénité la demande de don
Diniz sans crainte de mourir assassiné. Mais s’ils sont l’oeuvre des
Templiers... Alors toute la chrétienté devra vivre sous la menace de ces
criminels qui se prétendent moines.
    — La tâche est immense, Votre Sainteté,
protestai-je.
    Je remarquai soudain que j’étais couvert de
sueur.
    — Je ne crois pas pouvoir la mener à bien.
Ce que vous me demandez me paraît impossible à découvrir, surtout si les
Templiers sont bien les

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