Iacobus
assassins.
— C’est un ordre, frère Galcerán de Born,
murmura le grand commandeur de France d’un ton ferme.
— Vous devrez commencer au plus vite !
Nous avons peu de temps, rappelez-vous que le Templier attend dans la
forteresse.
Je secouai la tête dans un geste d’impuissance.
La mission était irréalisable, mais je n’avais aucune échappatoire. J’avais
reçu un ordre auquel je ne pouvais désobéir sous aucun prétexte. Je devais taire
mon indignation et me soumettre.
— J’aurais besoin, pour commencer, de tous
les rapports et documents concernant ces affaires... Ainsi que de
l’autorisation d’interroger certains témoins, et de consulter des archives
pour...
— Tout cela a été prévu, me coupa le pape
qui avait l’agaçante habitude de ne jamais vous laisser finir vos phrases. Vous
trouverez là-dedans tous les renseignements dont vous pourrez avoir besoin
ainsi que de l’argent, ajouta-t-il en me tendant un chartapacium de cuir qu’il sortit d’un coffre se trouvant au pied
de la table. Bien entendu, vous n’aurez aucun papier qui vous reconnaisse comme
envoyé papal et vous ne jouirez pas de ma protection si vous veniez à être
découvert. Toutes les autorisations que vous demanderez devront vous être
fournies par votre propre ordre... D’autres questions ?
— Non, aucune, Votre Sainteté.
— Splendide ! J’attends de vos
nouvelles au plus vite, conclut-il en me tendant l’anneau pastoral.
Le chemin du retour fut silencieux. L’énergie du
petit pape nous avait complètement épuisés. Alors que nous pénétrions dans la
commanderie sous les premières lueurs de l’aube, frère Robert m’invita à
prendre une dernière coupe de vin chaud dans ses appartements privés. J’étais
fatigué, et préoccupé, mais il était impossible de refuser.
— Frère de Born..., commença le commandeur
quand nous fûmes installés avec nos coupes de vin entre les mains. Nous avons
une autre mission pour vous.
— La tâche que m’a confiée le pape est déjà
bien assez lourde, j’espère que mon ordre sera moins exigeant.
— Non, non... Les deux sont liées. Mais
vous allez comprendre : le grand maître et le grand sénéchal ont pensé
que, puisque vous deviez vous déplacer dans certains milieux, entrer en contact
avec certaines personnes et entendre certaines choses, vous pourriez aussi
recueillir certaines informations importantes pour notre ordre.
— Je vous écoute.
— Comme vous le savez, après la dissolution
de l’ordre du Temple, ses immenses richesses et possessions devaient être
divisées à parts égales entre les rois chrétiens et notre ordre. La répartition
définitive de ces nombreux biens nous a coûté trois années de durs procès avec
les rois de France, d’Angleterre, d’Allemagne, d’Italie et d’Espagne. Je peux
vous assurer que les chevaliers hospitaliers qui ont permis de conclure tous
ces accords ont bien mérité le paradis par leur patience et leur diplomatie. Je
n’ai jamais vu d’arrangements aussi difficiles à obtenir ni de victoires aussi
peu satisfaisantes. Les biens des Templiers furent distribués en fonction des
quantités qui, selon les documents, se trouvaient entre les mains des
comptables et trésoriers royaux, ainsi que des banquiers lombards et juifs.
Mais les coffres censés contenir tous ces biens étaient vides, totalement
vides !
— Comment ?
Frère Robert fit un geste de la main me
demandant patience.
— On chargea rapidement d’autres personnes
de mener une étude plus approfondie pour essayer de comprendre où était passé
l’or des Templiers – heureusement, ils n’avaient pu cacher ni les châteaux, ni
les terres, ni le bétail, ni les moulins, ni les forges... On éplucha les
documents décrivant les activités économiques de l’Ordre : donations,
achats, échanges, contrats de prêt, registres, transactions, arbitrages,
perception de droits... Toutes ces informations, poursuivit le commandeur d’un
ton sévère, révélèrent qu’ou bien les Templiers avaient été pauvres comme Job,
ou bien assez malins pour faire disparaître l’équivalent de mille cinq cents
coffres remplis d’or, d’argent et de pierres précieuses, si ce n’est plus...
— Mais où sont passées toutes ces
richesses ?
— Personne ne le sait, frère. C’est encore
un autre de ces grands mystères que l’Ordre a laissés après sa disparition.
Nous nous sommes publiquement contentés de la
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