Il était une fois le Titanic
embarcations de sauvetage étaient mises à la mer.
Cette affaire a suscité les commentaires les plus acerbes, même si, pendant un demi-siècle, on a ignoré jusqu’au nom de ce navire. Tout ce qu’on savait de lui, c’est qu’il rôdait non loin du drame, tapi dans la nuit. Comme toujours, les témoignages les plus contradictoires sont venus enrichir le mystère. Il reste incontestable que le commandant Smith lui-même l’avait aperçu à 3 milles dans le sud-est environ, dira le lieutenant Boxhall. Au moyen d’un mégaphone, il avait même donné l’ordre aux chefs de chaloupes de tenter de s’en approcher. Mais le navire avait fini par disparaître.
Les marins du Mount Temple ont indirectement accrédité cette présence, puisque nombre d’entre eux certifièrent qu’au petit matin ils avaient aperçu la silhouette d’un trois-mâts carré ou d’un brick goélette aux abords du banc de glace.
Bien d’autres bateaux se trouvaient dans cette région, plus ou moins éloignés du drame, mais on ne signala guère d’autres
voiliers – hormis peut-être le Dorothy Baird , une petite goélette de pêche immatriculée dans le Massachusetts. Mais les annales du naufrage ne l’ont pas jugée digne d’attention.
Pendant un demi-siècle, l’énigme des bateaux fantômes, restés à l’écart du paquebot sans lui porter secours, cristallisera dans la légende du Titanic . Jusqu’à ce qu’en 1962 un capitaine en retraite de la marine marchande norvégienne vienne éclairer la lanterne des historiens. Il s’appelait Henrik Naess et révéla qu’en avril 1912 il servait en tant que second capitaine à bord du Samson , un sealer 169 norvégien immatriculé à Trondheim. Son capitaine, un certain Carl Johann Ring, l’avait affrété pour la chasse aux phoques. Naess confirma la présence du voilier dans la région du 41 e parallèle et de la barrière de glace. Ne possédant pas de radio, les hommes du Samson n’étaient au courant ni de la présence du Titanic dans ces eaux, ni du drame qui se déroulait à son bord. Tout ce qu’ils avaient vu, c’était les feux d’un navire à quelques milles seulement par le travers. Ring et son équipage, craignant qu’il ne s’agisse d’un navire de l’inspection des pêches, quittèrent rapidement les lieux car leurs cales étaient remplies de peaux de phoques de contrebande. Les fusées blanches qu’ils avaient observées avaient redoublé leurs craintes, car il pouvait s’agir d’un appel à d’autres navires pour tenter de les arraisonner 170 .
Était-ce bien le Samson que les naufragés du Titanic avaient aperçu cette nuit-là ? Ce n’est pas absolument certain, mais les déclarations de Henrik Naess apportent de sérieuses présomptions à cette thèse. Ses déclarations tardives ne furent d’abord pas prises au sérieux car, d’après l’administration du port islandais d’Ísafjörður, le Samson était à quai le 20 avril 1912. Par conséquent, il ne pouvait se trouver sur le lieu du naufrage du Titanic cinq jours plus tôt. Le vieux Naess n’était peut-être qu’un affabulateur. La question
divisa de nouveau l’opinion pendant trente-sept ans, jusqu’à ce qu’un chercheur américain 171 entreprît de consulter les archives d’Ísafjörður. Il découvrit alors, contrairement à ce qui avait été dit, que le 20 avril était le jour où le Samson était attendu en Islande, et non celui de son arrivée, intervenue le 14 mai selon le registre du Lloyd’s. Cette marge laissait donc aux contrebandiers le temps nécessaire pour atteindre l’Islande à partir des Grands Bancs.
En dévoilant son histoire, Henrik Naess libérait sa conscience d’une obsession qui l’avait poursuivi toute sa vie. Après avoir comparé la position du Samson avec celle du Titanic au moment de son naufrage, il s’était rendu compte qu’il avait été l’acteur direct d’un drame dont il ne s’était jusqu’alors cru que le spectateur inconscient 172 .
Si les affaires du Mount Temple et du Samson ne défrayèrent pas tout de suite la chronique, il en fut tout autrement du dossier Stanley Lord.
Le Californian , propriété de la compagnie américaine Leyland Line, faisait route vers Boston venant de Liverpool. Le capitaine Lord commandait son équipage. Le 14 avril en début de soirée, les conditions de navigation le contraignirent à modifier son cap. À 18 h 30, l’ Antillan qui croisait à proximité en fut informé par radio. Moins
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