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Imperium

Imperium

Titel: Imperium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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d’offrir leur protection à des personnes privées contre des
décisions injustes de magistrats. Mais je dois t’avertir, Cicéron, que si tu
commences à te mêler de la politique du peuple, tu vas baisser dans l’estime de
tes amis, au nombre desquels j’ai l’honneur de compter depuis longtemps. Le
suicide, répéta-t-il. Quel est le problème ? Nous sommes tous mortels. Ce
n’est pour nous tous qu’une question de temps. Et de cette façon, tu partirais
avec honneur.
    — Je suis d’accord avec Servius sur le danger que nous
courons si nous approchons des tribuns, dit Quintus (quand Quintus parlait de
son frère aîné, il employait le plus souvent le « nous ».) Que cela
nous plaise ou non, le pouvoir à Rome est actuellement entre les mains des
nobles et du Sénat. C’est pour cela que notre stratégie a toujours été de
construire soigneusement notre réputation, grâce à tes plaidoiries devant les
tribunaux. Nous nous saborderions de manière irréparable auprès des hommes qui
comptent vraiment s’ils devaient avoir l’impression que tu n’es en fait qu’un
agitateur de plus. En outre – j’hésite à évoquer cela, Marcus –,
as-tu pensé à la réaction de Terentia si tu devais suivre cette idée ?
    Servius partit d’un gros rire.
    — Tu n’arriveras jamais à conquérir Rome, Cicéron, si
tu n’arrives déjà pas à tenir ta femme.
    — Crois-moi, Servius, il serait beaucoup plus simple de
conquérir Rome que de tenir ma femme.
    La discussion se poursuivit ainsi un moment. Lucius trouvait
judicieux de s’adresser au plus vite aux tribuns, quelles que pussent être les
conséquences. Sthenius était trop hébété par la désolation et la peur pour
avoir une opinion cohérente sur quoi que ce fût. À la fin, Cicéron me demanda
ce que j’en pensais. En toute autre compagnie, cela aurait pu paraître
surprenant car l’opinion d’un esclave ne comptait guère aux yeux de la plupart
des Romains, mais ces hommes étaient habitués à ce que Cicéron me demande
parfois mon avis. Je répondis avec prudence qu’il me semblait qu’Hortensius ne
serait sûrement pas ravi d’apprendre ce que Verres avait fait, et que la
perspective de voir l’affaire virer au scandale public pourrait l’inciter à
faire pression sur son client pour qu’il retrouve le chemin de la raison. Se
présenter devant le collège des tribuns représentait un risque mais, à tout
prendre, c’était un risque qui valait la peine d’être couru. La réponse plut à
Cicéron.
    — Parfois, dit-il, résumant la situation par une
expression que je n’ai jamais oubliée, lorsqu’on se retrouve enlisé, en
politique, la seule chose à faire est de déclencher une bagarre – déclencher
une bagarre même si l’on ne sait pas quelle en sera l’issue, parce que c’est
seulement lorsque la bagarre fait rage et que tout est chamboulé que l’on peut
espérer découvrir une porte de sortie. Merci, messieurs.
    Et là-dessus, la réunion fut ajournée.
     
    Il n’y avait pas de temps à perdre, car si les nouvelles de
Syracuse avaient déjà atteint Rome, il était logique de supposer que les hommes
de Verres n’étaient pas loin. Alors même que Cicéron parlait encore, j’eus l’idée
d’une cachette possible pour Sthenius, aussi, à peine la conférence terminée,
me mis-je en quête du gérant de Terentia, Philotimus. C’était un jeune homme
lascif et replet qu’on trouvait le plus souvent dans les cuisines, harcelant
les servantes pour satisfaire l’un ou l’autre ou, mieux encore, ses deux vices
à la fois. Je lui demandai s’il y avait un appartement libre dans l’un des
immeubles d’habitation de sa maîtresse et, lorsqu’il me répondit que oui, le
forçai à m’en remettre les clés. Puis je vérifiai que la voie était libre et,
lorsque je fus certain qu’il n’y avait personne dans la rue, je persuadai
Sthenius de me suivre.
    Ses rêves de retourner un jour dans sa patrie réduits à
néant, il se trouvait dans un état de profond abattement qu’aggravait encore la
peur de se faire arrêter à tout moment. Et je crains que lorsqu’il découvrit l’immeuble
sordide de Subura où il devait séjourner pour le moment, il dut même croire que
nous l’avions abandonné. L’escalier était sombre et branlant. Les murs
portaient des traces d’un incendie récent. Sa chambre, au cinquième étage, était
à peine plus grande qu’une cellule, avec une paillasse sur le sol et

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