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Imperium

Imperium

Titel: Imperium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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sommes des avocats de la défense. Nous ne
poursuivons jamais. Tu l’as dit toi-même une centaine de fois : les
défenseurs se font des amis ; les accusateurs ne se font que des ennemis.
Si tu n’arrives pas à abattre Verres, il y a de bonnes chances qu’il soit élu
consul un jour. Il ne connaîtra alors de paix que lorsque tu seras détruit.
    — C’est vrai, concéda Cicéron. Mais quand on veut tuer
un animal dangereux, il faut s’assurer de ne pas le rater au premier coup. En
revanche… tu ne comprends donc pas ? De cette façon, je peux aussi tout
gagner. Le rang, la célébrité, la charge, la dignité, l’autorité, l’indépendance,
un fonds de clientèle à Rome et en Sicile. Cela m’ouvre carrément la voie du
consulat.
    C’était la première fois que je l’entendais mentionner sa
grande ambition, et le fait qu’il se sente enfin capable de prononcer le mot
témoignait de sa nouvelle confiance en lui. Le consulat. Pour tout
acteur de la vie publique, c’était l’apothéose. Sur tous les documents
officiels et pierres commémoratives, les années mêmes se distinguaient les unes
des autres aux noms des consuls en charge. C’était, juste après les cieux, ce
qui se rapprochait le plus de l’immortalité. Combien de jours et de nuits
avait-il passés à y penser, à en rêver, à chérir cette ambition depuis le temps
où il n’était qu’un adolescent empoté ? Il est parfois bien inconsidéré de
révéler ses ambitions trop tôt – les exposer trop prématurément au
rire et au scepticisme du monde peut les détruire avant qu’elles soient
réellement formées. Mais il arrive aussi que ce soit l’inverse, et que le
simple fait de mentionner une ambition la rende soudain possible, voire
réalisable. Ce fut le cas cette nuit-là. Quand Cicéron prononça le mot « consulat »,
il le fichait dans le sol comme un drapeau que nous pouvions tous admirer. Et,
pendant un instant, nous avons entrevu par ses yeux son avenir radieux et
étoile, et nous avons vu qu’il avait raison : s’il abattait Verres, tout
devenait possible ; il pouvait, avec un peu de chance, monter jusqu’au
sommet.
     
    Il y eut beaucoup à faire au cours des mois qui suivirent
et, comme d’habitude, une bonne partie du travail retomba sur mes épaules. Tout
d’abord, je traçai un grand diagramme des électeurs de l’édilité. Cet électorat
était à l’époque composé de l’ensemble des citoyens romains divisés en
trente-cinq tribus. Cicéron lui-même appartenait à la gens Cornelia,
Servius à la gens Lemonia, Pompée à la Clustumina, Verres à la Romilia
et ainsi de suite. Chaque citoyen votait sur le Champ de Mars en tant que
membre de sa tribu, et le résultat du vote de chaque grande famille était lu
publiquement par les magistrats. Les quatre candidats qui rassemblaient les
votes du plus grand nombre de familles étaient alors déclarés vainqueurs en
bonne et due forme.
    Cette forme particulière de collège électoral présentait
plusieurs avantages pour Cicéron. Tout d’abord – contrairement au
système de désignation des préteurs et des consuls – chaque vote
comptait également, quelle que fût la fortune du votant, et comme les plus
fervents partisans de Cicéron se trouvaient parmi les hommes d’affaires et la
masse des pauvres, les aristocrates auraient plus de mal à l’éliminer. Ensuite,
il s’agissait d’un électorat auprès duquel il était relativement facile de
faire campagne. Chaque tribu avait son propre quartier général quelque part
dans Rome, un édifice assez grand pour y donner des spectacles ou des dîners.
Je consultai tous nos dossiers et en tirai une liste de tous ceux que Cicéron
avait défendus ou aidés au cours des six années précédentes, chacun rangé selon
sa famille. Il s’agissait alors de contacter ces hommes et de leur demander de
s’assurer que le sénateur fût invité à parler lors du premier rassemblement
familial prévu. Il est stupéfiant de voir combien de services on lui devait
après six années de plaidoiries et de conseils incessants. L’emploi du temps de
la campagne de Cicéron ne tarda pas à être très chargé, et ses journées de
travail s’allongèrent encore. Après les procès ou les ajournements du tribunal,
il se dépêchait de rentrer, prenait un bain rapide et se changeait, puis il
filait à nouveau prononcer un de ses discours exaltants. Son slogan était :
« Justice et Réforme. »
    Comme de

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