Jack Nicholson
commenter ses « énormes et vaines diatribes » ( American Film) et ses « folles arias » ( Vanity Fair ). « Il s’exprime à un temps inconnu », écrivit Stephen Schiff après son interview de Nicholson pour Vanity Fair. « Le passé se transforme en présent, les souhaits se fondent dans les faits accomplis ; les vieilles blessures se remettent à saigner. »
Malgré son immense succès, il y avait toujours une profonde fureur résiduelle en lui. Il se disait lui-même, lors des interviews, « profondément triste ». Et il affirmait aussi que rares étaient « les journées qu’il trouvait splendides et au cours desquelles il n’éprouvait pas un dégoût de lui-même, de la tristesse ou de la peur ».
Au beau milieu d’une séance de promotion, « la force de sa passion » pouvait devenir « un brin effrayante », d’après les mots de l’un des journalistes qui l’interviewa. « Il se mettait à manger des syllabes, à replier ses lèvres par-dessus ses dents et à terminer ses phrases par des "mon pote". » Nicholson avait pris l’habitude déconcertante d’évoquer les conspirations des « ils » – les gens qui dirigeaient les grands groupes financiers, le gouvernement, les puissants de Hollywood, les « gros bonnets » qui prenaient leurs décisions en fonction de considérations financières. Aussi puissant qu’elle pût être à Hollywood, la star s’accrochait à sa casquette d’étranger, l’entretenait et l’accentuait.
L’impression qui ressortait des interviews, c’était que Jack avait ses propres théories un peu folles et un peu géniales sur tout. Il était devenu le pape de sa propre religion, le créateur de ses propres règles et de sa propre logique. Il avait des raisonnements pour tout, et ses raisonnements étaient meilleurs que ceux de tous les autres, ces autres qui auraient dû lui demander son avis.
Ses théories étaient semblables aux secrets de certains de ses personnages, ou aux sous-textes de certains de ses films si biaisés que personne d’autre que lui ne semblait pouvoir les saisir.
« Personne n’a réussi à cerner l’intrigue sérieuse d’ En route vers le sud », aimait se plaindre Nicholson à l’occasion des interviews. Les personnages « avaient jadis été les membres de l’unité de Quantrill, l’unité de combat de la guérilla originelle d’Amérique. Et qu’est-ce que vous faites de ces gens une fois qu’ils sont chez eux ? Le fait que cette question n’ait même pas été effleurée par la critique m’a beaucoup déçu. » Certains de ses vieux amis prirent la décision personnelle de limiter le temps qu’ils passaient avec lui. Nicholson semblait se complaire à leur servir les mêmes raisonnements étranges et les mêmes sermons qu’aux journalistes, avec tout autant de folie, d’ingéniosité, de paranoïa et d’amertume. Ses sermons pouvaient être extrêmement éprouvants, en particulier quand il se rendait aux toilettes toutes les quarante-cinq minutes.
Quoi qu’il en soit, ce qui est sûr, c’est qu’il eut moins d’interviews au début des années 1980. Ses amis le prièrent de se montrer moins expansif. Des principes de base furent établis, les journalistes étant minutieusement choisis parmi ceux qui lui étaient favorables. Et Nicholson était parfois reclus dans un hôtel de Beverly Hills plutôt que dans sa maison ; une atmosphère plus conventionnelle était créée, et son attaché de presse rôdait dans les parages.
Mais Jack adorait parler, et il aimait répondre à des questions directes – même s’il y répondait parfois en disant, à l’aide d’une centaine de mots, qu’il n’y répondrait pas.
Désormais, le nom de June, sa mère cachée, ressortait dans pratiquement toutes les interviews.
La formation de Nicholson facilita le choix de masques et de poses utiles. Sa réplique bien rodée était : « J’avais la trentaine et ces femmes étaient toutes deux mortes au moment où j’ai découvert que j’étais un enfant illégitime. Ma formation d’acteur me permettait d’avoir conscience de ce que je ressentais. Je n’ai éprouvé ni colère ni ressentiment, pas le moins du monde. J’ai ressenti un énorme sentiment de gratitude, simple et clair. »
Nicholson déclara également : « Ces femmes m’ont fait cadeau de la vie. C’est une histoire féministe dans sa forme la plus pure. Elles m’ont donné une excellente formation, ces grandes
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