Jack Nicholson
pas grand-chose dans ce film, pas même son nom. Son apparition ne serait en effet même pas créditée. Il le fit uniquement pour rendre service au réalisateur de Tendres passions, James L. Brooks.
Jack dut aimer ce film s’il le vit comme une claque lancée au monde de la télévision, sujet qui ressortait très souvent dans ses interviews. Mais il ne semblait pas particulièrement à l’aise dans la peau du personnage au sourire affecté qu’était Walter Cronkite. Son interprétation, un peu comme celle qu’il avait faite d’Eugene O’Neill dans Reds, était plus intelligente que convaincante.
Cependant, Brooks savait ce qu’il faisait ; et ce tout autant que Nicholson. Broadcast News, avec Holly Hunter, Albert Brooks et William Hurt, convainquit les critiques et finit par intégrer de nombreuses listes des dix meilleurs films de l’année. Nicholson marqua également des points – pour un professionnalisme qui avait abouti à trois films très différents sur l’année 1987.
Le troisième film, Ironweed, le meilleur, était en pré-production pendant la plus grande partie de l’année 1986, et avait débuté sur une plage du Brésil, bien loin d’Albany, son décor.
Le réalisateur Hector Babenco, né en Argentine et résident du Brésil, avait lu le roman de William Kennedy titulaire du prix Pulitzer 1984 alors qu’il était en vacances. Babenco avait pris des cours d’anglais accéléré avec Berlitz. Ironweed, ou L’Herbe de fer, troisième volet de la trilogie d’Albany de Kennedy (faisant suite à Jack « Legs » Diamond et Billy Phelan) était le premier livre que Babenco avait réussi à lire en anglais, d’un bout à l’autre.
Si les romans titulaires de prix s’accordaient bien à l’idée prestigieuse que Nicholson se faisait de lui-même, L’Herbe de fer n’était pas un matériau facilement adaptable au cinéma. Il y avait peu d’action et de dialogues dans cette étude du personnage inoubliable de Francis Phelan, un ancien joueur de base-ball des quartiers pauvres frappé par des visions fébriles des erreurs de la vie. Il fallait ajouter à cela les obstacles liés au budget : l’histoire se déroulait à Albany, capitale de l’État de New York, au cours d’un week-end automnal de 1938. Les dépenses visant à recréer les détails de l’époque seraient donc de taille.
Mais Babenco était déterminé. Son premier film, Pixote : la loi du plus faible, l’histoire graphique d’un délinquant âgé de 10 ans, avait été suivi d’une autre adaptation littéraire difficile, celle du roman de Manuel Puig Le Baiser de la femme-araignée. Babenco s’était mis dans la tête de tourner Ironweed. « C’est plein d’émotions, mais sans une seule bribe de sentimentalisme », déclara-t-il à l’occasion d’une interview. « C’est fait d’acier et de matériaux secs, comme une brique. Une morale vraiment rigoureuse. »
Babenco passa beaucoup de temps à chercher un producteur désireux de donner le feu vert à un tel projet. Pendant ce temps, l’écrivain William Kennedy, qui avait coécrit le script de Cotton Club avec le réalisateur Francis Ford Coppola pour le producteur Robert Evans, s’efforçait d’écrire un scénario dérivé de son roman.
La personne qui interpréterait Francis Phelan devrait passer 85 % du temps du film face aux caméras. William Kennedy se souvient : « On a toujours eu un œil sur Jack Nicholson, qui grâce à son côté irlandais, dur et spirituel, était parfait pour le rôle. Personne ne se souvenait de Nicholson submergé par la sensibilité ou la vulnérabilité qui était essentielle au rôle de Francis, mais est-ce qu’un personnage l’avait jamais obligé à mettre à l’épreuve ces qualités ? »
Ce fut sans doute la mort de Shorty qui déclencha les changements qui se mirent à se produire dans la vie de Jack – changements personnels aussi bien que choix professionnels : l’attention qu’il commença à prêter loin des yeux du public aux sujets familiaux, ainsi que la décision de jouer dans un film qui avait de si forts échos émotionnels et dont l’histoire se déroulait, comme par hasard, un an après sa naissance.
Nicholson rencontra Babenco et Kennedy à la fin du tournage des Sorcières d’Eastwick . Il venait d’achever l’un de ses habituels grands numéros. Il était temps de retrouver sa base. L’acteur souhaitait faire un nouveau film intériorisé, sans sourire. Peu
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