Je suis né un jour bleu
perpétuel, ma tête fixant le sol, les bras immobiles le long du
corps, absorbé dans mes pensées et totalement indifférent à qui se trouvait
près de moi.
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Je rentrai au collège en septembre 1990. Cet
été-là, ma mère m’emmena en centre-ville pour m’acheter mon premier uniforme, une
veste noire et un pantalon, une chemise blanche et une cravate rayée noir et
rouge. Mon père tenta de m’apprendre comment nouer une cravate, mais après
plusieurs tentatives, je n’en étais toujours pas capable – et j’en étais
même très loin. Il suggéra donc que je serre et desserre tout simplement le
même nœud pendant toute la semaine. Je m’agitais beaucoup en essayant mon
uniforme pour la première fois – la veste était d’une facture grossière
et lourde – et mes nouvelles chaussures en cuir noir me serraient et m’écorchaient
les pieds. J’avais aussi un sac pour les différents livres de classe, ainsi qu’un
assortiment de fournitures scolaires : des crayons, des stylos, un carnet,
un taille-crayon, une gomme, un compas, des règles, un rapporteur et un cahier.
Mon collège s’appelait Barking Abbey et
était situé près de l’église St Margaret où le capitaine Cook s’était marié en
1762. Le premier jour, mon père m’aida à nouer ma cravate et à boutonner les
manches de ma chemise. Nous allâmes en bus jusqu’aux portes du collège où il m’annonça
que je devais être courageux, que le premier jour dans une nouvelle école était
toujours un défi, et que je devais essayer de prendre les choses du bon côté. Je
le regardai s’éloigner jusqu’à ce qu’il disparaisse. Puis je suivis en hésitant
les autres élèves dans le gymnase, où le directeur, Mr. Maxwell, nous
accueillit avec un discours. Le gymnase était juste assez grand pour que nous
puissions tous nous asseoir sur le sol. Les professeurs étaient debout contre
le mur. Le sol du gymnase était sale et je m’assis juste devant le directeur, qui
nous demanda le silence et commença à parler. Je trouvais difficile de me
concentrer et de l’écouter. Je regardais le sol, passais le bout de mes doigts
dans la fine poussière et attendais la fin du discours. Puis on répartit les
élèves et on nous donna le nom de notre professeur principal. Nous pouvions
maintenant nous rendre, calmement, dans notre salle de classe. J’étais très
excité en découvrant que ma classe était la plus proche de la bibliothèque. Après
l’appel, on nous donna notre emploi du temps. Chaque matière était enseignée
par un professeur différent dans une salle de classe différente à des endroits
différents du collège. Se déplacer d’une heure à une autre, d’une matière à une
autre, d’une classe à une autre et d’un professeur à un autre était quelque
chose de difficile pour moi, certainement la chose la plus difficile dans le
passage de l’école primaire au collège.
Il y avait des visages familiers qui
venaient de Dorothy Barley. Mais Babak, mon seul ami, était dans une autre
école, dans un autre quartier. Je me sentais extrêmement tendu, je ne parlai à
personne dans la nouvelle classe et je ne me présentai même pas. Au contraire, je
regardai l’horloge continuellement, en espérant que les aiguilles avancent plus
rapidement et que la journée se termine. À la sonnerie, stridente, les élèves
se précipitèrent dehors pour la pause. Je restai en arrière, attendant que tout
le monde soit sorti car craignant surtout d’être bousculé ou renversé. J’allai
à la bibliothèque, la porte d’à côté, pris une encyclopédie dans les rayonnages
et m’assis pour lire, tout seul. Je regardais l’horloge de la bibliothèque
parce que je ne voulais pas être en retard au cours suivant. L’idée de rentrer
seul et de voir les autres élèves déjà assis, qui me regardaient, était quelque
chose de terrifiant pour moi. Quand la cloche de la cantine sonna, je refis le
chemin jusqu’à la bibliothèque et je lus, à la même table.
À l’école primaire, je mangeais des
paniers-repas préparés par ma mère. Cependant, venant d’une famille pauvre, mes
parents souhaitaient que je prenne à la cantine des repas pour lesquels j’avais
droit à des tickets-repas. Après une demi-heure de lecture, j’allai jusqu’au
réfectoire. Les queues avaient disparu et je pus prendre un plateau, aller au
comptoir tout seul et choisir ce que je voulais manger. Avec le doigt, je montrai
le poisson, les
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