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Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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bond, la reine se mit hors d’atteinte et cria :
    – Jean de Bourgogne ! J’ai tué celle que tu aimais !… Plus rien de vivant entre nous : à toi de tuer celui que j’aimais !…
    Au même instant, Jean sans Peur fut devant le chevalier. Les deux épées se choquèrent…
    Odette de Champdivers.
    Sous le coup de dague, elle était tombée en jetant ce suprême cri d’appel que le roi Charles VI avait entendu à l’instant même où Bruscaille, Bragaille et Brancaillon pénétraient chez lui.
    En une seconde, toute pensée s’abolit en elle.
    Elle fut néant.
    Mais cela dura quelques instants à peine. Au fond d’elle-même, elle eut la vague et confuse perception de sons affaiblis. Elle eut alors l’instinctif et puissant effort de la vie qui se défend, et elle tenta de comprendre ce que signifiaient ces sons…
    Elle était immobile, inerte, la vie se retirait d’elle avec le mince filet de sang qui coulait de son sein. Mais le sens des choses s’éveillait après la rapide éclipse. Bientôt elle se rendit compte que ce qu’elle entendait, ces sons lointains, c’étaient les voix de deux hommes. Et elle s’efforça alors de comprendre ce qui se disait.
    Elle n’y parvint pas. Elle sentit seulement que c’étaient des éclats de voix hostiles, des grondements ennemis, des sons qui se défiaient, – et un temps s’écoula pour Odette, sur cette sensation, un temps qu’elle eut évalué à une heure peut-être, si elle eût été capable de mesurer la fuite des minutes.
    Brusquement, comme par la soudaine ouverture d’une fenêtre sur son cerveau, elle comprit.
    Non pas ce qui se disait, mais la personnalité de ces voix. La physionomie des voix lui apparut. Elle eut un long frémissement d’amour et de terreur : l’une des deux voix évoqua Jean sans Peur, et l’autre, le chevalier de Passavant.
    Qu’ils fussent là tous deux, en présence, échangeant des sons, elle ne s’en étonna pas…
    Mais que ces sons qu’ils échangeaient fussent violemment adverses, précurseurs de mortelle bataille, elle en éprouva une épouvante qui, bientôt après, se transforma en horreur.
    Alors, l’effort des puissances vitales, en elle, se centupla, et après une lutte qui lui fut d’une lenteur désespérante elle ouvrit les yeux, elle vit…
    Elle vit Passavant, elle vit Jean sans Peur.
    Ils étaient face à face.
    Elle les vit dans un étincelant tourbillon des chocs d’acier.
    Elle les saisit dans leur ruée l’un sur l’autre, exactement comme l’appareil photographique peut faire des gestes rapides en une immobilité instantanée.
    Le terrible effort des puissances vitales condensées la souleva. Elle se mit sur les mains. Elle rampa vers la vision des gestes de bataille enchevêtrés parmi les éclairs des épées. Elle se souleva encore et enfin elle fut debout, les mains tendues…
    L’effort se brisa soudain ; elle tomba en avant, les bras ouverts.
    Ces bras s’abattirent sur deux épaules, elle sentit qu’elle enlaçait frénétiquement une tête et que, dans une explosion de douleur, d’horreur, d’amour, elle criait des paroles…
    *
    * *
    Dans cet essai de restitution de l’état d’être au cours d’une agonie, nous avons nécessairement employé les mots qui s’adaptaient à l’idée qu’Odette pouvait se faire des choses en cet état, – notamment en ce qui concerne les durées. Pour elle, c’était « bientôt », ou « après », ou « minutes », ou « heure », ou « temps long ». Dans la réalité, ce fut comme une succession de décharges électriques dans sa sensation. Tout ce long effort, depuis le coup de dague, jusqu’au moment où Odette, debout, enfin, retomba les bras en avant et cria quelque chose en jaillissement de paroles affolées, demanda peut-être une quarantaine de secondes au plus.
    Passavant.
    Escorté du geôlier, il arriva en vue du palais du roi. Il se tourna un instant vers la Huidelonne et vit au loin la troupe d’archers qui atteignait la tour.
    – Ils vous cherchent, dit le geôlier, pour vous conduire en place de Grève. Dans quelques instants, on saura votre évasion et ma fuite. Moi, ça m’est égal. Mais vous !…
    – Eh bien, quoi, moi ? fit en souriant le chevalier.
    Il respirait le bonheur. L’air libre lui fouettait le visage. Et cet air qu’avait respiré Odette l’enivrait.
    – Ce n’est pas tant pour vous… reprit le geôlier en cherchant ses mots pour exprimer le fond de sa

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