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Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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sauvage ironie… une irrévocable condamnation. Sans doute Bragaille et Brancaillon avaient compris aussi, car ils étaient livides.
    – Nous sommes gardés à vue ! songea Bruscaille, les sourcils contractés par l’épouvante. Nous allons tuer le roi… et puis, on nous arrête !
    Ocquetonville avait disparu. Un silence de mort pesait sur cette partie du palais. Les gens d’armes, immobiles, raidis par l’attente, écoutaient, la masse au poing. Bruscaille, Bragaille et Brancaillon, les cheveux hérissés, la suée de la terreur au front, restaient figés en des attitudes de condamnés attendant le coup mortel…
    Soudain, dans ce silence effrayant, là-haut, les rouages du jacquemart se mirent à grincer… Brancaillon poussa un soupir terrible. Bragaille se signa… On put entendre le léger bruit que faisait le marteau en se levant, – et brusquement, ce marteau tomba sur la cloche qui rendit un son large : le premier coup de midi !…
    Et à ce moment, on entendit une voix qui criait. La voix du roi ! La voix du fou ! Et cette voix appelait avec un étrange accent de gaieté sinistre :
    – Holà ! Où sont mes trois révérends ? Je veux mes ermites ! Par Notre-Dame, je veux rire, moi !…
    Le chef des gens d’armes s’avança sur Bruscaille, tandis que là-haut, le jacquemart, lentement, comptait les douze coups de midi, et qu’en bas, la voix du fou appelait ses assassins !…
    – Vous entendez ? fit l’homme d’armes.
    – Oui ! dit Bruscaille en claquant des dents. C’est midi !…
    – Le roi vous appelle !… Allez !… Allez faire rire le roi !… Allez l’exorciser !…
    Bruscaille eut un terrible éclat de rire, et d’un geste sauvage, tira sa dague. Il jeta un regard sur Bragaille et Brancaillon, et, d’une voix rauque, il dit : Allons !…
    Bruscaille, Bragaille et Brancaillon, la dague au poing, marchèrent sur l’appartement de Charles VI…
    À ce moment même, un long cri d’agonie, une déchirante clameur, retentit au loin, dans le palais, venu des appartements d’Odette de Champdivers.
    Charles VI l’entendit, cette clameur ! Il se leva tout droit, les yeux exorbités, et à demi-penché, écoutant de tout son être, bégaya :
    – On tue quelqu’un !… Qui vient-on tuer dans mon palais ?
    Il fit quelques pas vers la porte… Cette porte s’ouvrit brusquement : les trois ermites apparurent.

XXII – MIDI
    Souvent, lorsque le lecteur parcourt le récit de quelque « fait divers » sensationnel, il demeure étonné du nombre de figurants mis en scène par le hasard – personnages venus de divers horizons, comme conduits par une volonté inconnue, et se heurtant, s’enchevêtrant dans la même comédie ou le même drame.
    Cette heure de midi, qui sonnait au jacquemart du palais de Charles VI, convoquait au nom du hasard, au nom de la profonde volonté du mystère qui régit la pauvre humanité, oui, « convoquait » de multiples personnages qui, vraiment, semblaient accourir à l’appel.
    En étudiant l’étrange péripétie de cette journée, l’auteur de ce récit a éprouvé l’étonnement dont il parlait. Il a vu surgir de différents horizons des personnages qui sont venus se heurter au même centre d’action. Il s’est demandé pourquoi et de par quelle volonté, ce jour-là, en cette heure-là, Jean sans Peur, Charles VI, le chevalier de Passavant, le sorcier Saïtano, Isabeau de Bavière, Odette de Champdivers, Laurence d’Ambrun, sans compter les comparses, Ocquetonville, Scas, le trio Bruscaille, et d’autres, tant d’êtres divers et de vouloirs adverses furent conduits au même point – et, renonçant à trouver une satisfaisante réponse, il a dû se contenter de faire une rigoureuse analyse de l’action synthétique.
    L’analyse a consisté à séparer les éléments divers de l’action, c’est-à-dire à présenter clairement au lecteur les marches et contremarches de chacun de ces multiples personnages.
    C’est donc l’un après l’autre que nous suivrons ces figurants qui agissent à la même heure.
    Isabeau de Bavière.
    Nous l’avons vue entrer dans le palais du roi, calme, rigide, décidée à jouer toute son existence sur un seul coup, résolue à supprimer Odette ou à être elle-même tuée, parvenue en somme à cet état d’excitation nerveuse où tout s’abolit dans la raison, où la passion devient le seul guide des actes – guide aveugle, ivre, titubant et grimaçant qui se meut par

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