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Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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pensée.
    Passavant eut un rire clair et sonore, le rire de bonheur, dans l’insouciante gaieté de la jeunesse.
    – Mon brave maître-ès-armes, dit-il, vous maniez convenablement une épée, mais vous avez le tort de palabrer par paraboles. Vous n’êtes pas l’un des quatre évangélistes, je pense ?
    – Je veux dire… bredouilla le colosse, que vous mourriez, vous, j’en aurais de la peine, c’est sûr, mais enfin, je m’en consolerais, que diable !… tandis que…
    – Merci ! dit le rire du chevalier. Tandis que ?…
    – Tandis que si elle meurt, elle, eh bien, jamais je ne m’en consolerais ! Tenez, je puis bien vous le dire, ce n’est pas pour vous que je vous ai donné la liberté, c’est pour elle…
    – Ah ! palpita Passavant. Et pourquoi mourrait-elle ?
    – Elle mourra si vous mourez. J’en suis sûr. Ne vous l’ai-je pas dit ? Quand elle venait me voir là-bas, dans mon enfer, sous toutes ses paroles, je sentais qu’elle parlait de vous. Il n’y a que vous au monde pour elle. Vous disparu, que voulez-vous qu’elle devienne ?
    Passavant buvait ses paroles comme il buvait l’air pur, l’air de la vie, l’air enivrant de la liberté. Il fût resté là des heures à écouter la lourde voix du geôlier, ineffable musique.
    – Si vous m’en croyez, continua le colosse de la Huidelonne, vous sortirez tout de suite de l’Hôtel Saint-Pol par un chemin que je sais, vous vous cacherez quelque part dans Paris, et…
    – Silence ! gronda Passavant.
    La reine !… Elle se glissait, solitaire et sombre, à vingt pas du massif épais derrière lequel ils s’étaient arrêtés. Elle disparut dans le palais du roi.
    – Vous avez vu ? dit le geôlier. Si vous entrez, vous êtes perdu.
    – Allons, fit Passavant.
    Il allait s’élancer. Le geôlier le saisit par le bras, et souffla :
    – Venez ! Ah ! venez !… Tenez, regardez qui vient là-bas…
    – Jean de Bourgogne, murmura sourdement le chevalier.
    – La mort ! dit le geôlier.
    Jean sans Peur entra dans le palais. Le chevalier passa une main sur son front, et murmura :
    – Ces figures qu’ils ont tous deux !… Il se prépare quelque chose de terrible… Isabeau, Jean sans Peur, Odette…
    Il eut un brusque mouvement. Une soudaine sensation d’angoisse l’étreignit à la gorge, un de ces violents et rapides pressentiments qui s’abattent sur un homme aux heures de surexcitation nerveuse. Et, avec une foudroyante soudaineté, il « sentit  » qu’Odette l’appelait… Il râla : « Elle est en danger !… » et s’élança.
    Le geôlier le suivit.
    D’une course rapide, Passavant atteignit l’entrée du palais, et s’y engouffra.
    Toutes les précautions prises par Isabeau de Bavière pour isoler Odette, pour que cette partie du palais fût déserte et sans secours possible, ces précautions, la volonté mystérieuse du hasard sembla les avoir établies uniquement pour Passavant.
    – Par ici ! dit le geôlier qui, dès qu’ils furent dans le palais, prit les devants et lui montra le chemin des appartements d’Odette…
    – Halte ! gronda une voix. Arrière ! Oh ! Passavant !…
    – Scas ! cria le chevalier.
    Une seconde, Scas demeura hébété de stupeur. Il bégayait : Démon ! Démon !… Presque aussitôt, cette impression d’effarement terrifié disparut ; un éclair venait de luire : l’épée de Passavant !
    – Défends-toi si tu peux ! cria le chevalier.
    Au même instant, ils furent l’un sur l’autre, les deux fers cliquetèrent et d’une voix de tonnerre, Scas hurla : « Monseigneur ! Monseigneur ! Prenez garde !… »
    Et il porta un furieux coup de pointe à Passavant qui bondit en arrière. Scas éclata de rire.
    – À nous la petite Odette, grogna-t-il avec des intentions d’insulte plein la voix. Monsieur arrivera trop tard !
    – J’arriverai ! rugit le chevalier.
    Et il se fendit à fond. Scas tomba en arrière, les bras en croix, sans un soupir, sans une convulsion, frappé de mort foudroyante… Le chevalier se rua en avant, sautant par dessus le corps. Le geôlier se pencha, toucha Scas, le considéra une seconde et murmura avec un étrange sourire :
    – Un seul coup, droit au cœur !…
    – Hardi ! Hardi ! Passavant le Hardi ! hurlait le chevalier comme pour informer Odette du secours qui arrivait.
    Il poussa une porte entrebâillée, d’un violent coup de pied, et, l’épée rouge à la main, marcha sur Jean

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