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Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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répéta :
    – Passavant ?…
    – Oui ! râla Isabeau. Celui que toutes deux nous aimons !… Renonces-tu à lui ?…
    Dans la salle voisine, un bruit de pas précipités. Isabeau, légèrement, tourna la tête, et par la porte restée grande ouverte vit Jean sans Peur. Odette, dans ce moment, de sa même voix de calme, grave et profonde de sincérité, disait :
    – Comment pourrais-je renoncer à Passavant, madame, puisque je l’aime ?
    Et elle jeta un léger cri. Ce mot « je l’aime » venait, des profondeurs de son cœur, de monter à ses lèvres malgré elle ; Odette ne savait pas qu’elle aimait le chevalier ; la lueur de la mort toute proche éclaira d’un dernier rayon l’image qui s’était érigée dans son âme ; et ce mot qu’elle prononça avec tant de conviction l’étonna, la ravit au point qu’elle ne vit pas luire l’acier… La dague d’Isabeau s’abattit rudement, d’un coup sûrement appliqué.
    Odette tomba.
    Il y eut le grand cri de détresse de la bête qui passe violemment de la vie à la mort. Dans le même instant, Jean sans Peur fut sur Isabeau de Bavière.
    Jean sans Peur.
    Il avait suivi la reine de loin, était entré derrière elle dans le palais, avait repoussé d’un geste le sire de Scas qui voulait lui parler, et s’était élancé vers l’appartement d’Odette. Au moment d’y entrer, il eut quelques minutes de lucidité. Il se dit que s’il tentait de sauver la jeune fille, la reine pouvait le perdre, appeler le roi, dénoncer le complot. Il eut même deux ou trois pas de retraite. Ce fut ce qui déchaîna de nouveau en lui la passion. D’un violent mouvement des épaules, il parut jeter bas le fardeau des ambitions. Tout disparut. Et puisque l’homme n’est jamais parfait, même dans la scélératesse, disons qu’en cet instant, une pensée pure fit une soudaine irruption dans l’âme de Jean sans Peur.
    – Eh bien, se rugit-il, je renoncerai à elle ! Mais qu’elle ne meure pas !…
    Il se rua. Il haletait. Il était échevelé, terrible. Il arriva par bonds insensés, et vit tomber Odette. Une effroyable douleur l’étreignit à la gorge. Sa pensée sombra. Il râla :
    – Morte ?… Est-elle donc morte ?…
    Isabeau, debout, toute raide, sa dague rouge à la main, d’une voix étrangement paisible, affreusement dure dans cette tranquillité même, répondit :
    – Morte, soyez en sûr. Les coups que je donne, moi, ne pardonnent pas.
    – Vous l’avez tuée ! dit Jean sans Peur d’une voix morne.
    Il était rigide, les cheveux hérissés, les yeux bouffis comme par un afflux de larmes qui ne voulaient pas jaillir. Il s’étonnait vaguement de demeurer tranquille. Et il ne sentait pas qu’en lui, toutes les puissances de la fureur, de la douleur, de la rage, du désespoir, se condensaient comme ces nuages de tempête qui vont former de la foudre. Il ne songeait même pas à se pencher sur Odette. Ses yeux demeuraient fixés sur ce sein d’où coulait un mince filet de sang. Isabeau, avec un sourire féroce, répondit :
    – Il n’y a plus rien de vivant entre nous, Jean de Bourgogne : j’ai tué celle que tu aimais !…
    – Tu l’as tuée ! gronda Jean sans Peur. Eh bien…
    Sa tête s’égara. Il fit quelques pas à droite, à gauche, en râlant, en sanglotant sans pleurer, en jetant des cris inarticulés, et tout à coup, revint à Isabeau.
    Il venait de tirer son épée !…
    Il répéta : « Puisque tu l’as tuée… eh bien… »
    – Je suis morte, songea Isabeau.
    La porte par où était entrée Odette, brusquement, s’ouvrit, battit, claqua ; un homme parut, la figure convulsée, flamboyant, terrible, – à peine reconnaissable. Mais tous deux, Isabeau et Jean sans Peur, le reconnurent à l’instant. Et ils vivaient une telle minute de démence et d’horreur qu’ils ne songèrent pas à s’étonner de voir là, sous leurs yeux, taché de sang, les vêtements en désordre comme s’il eût déjà livré bataille, l’homme qui, à cette heure de midi, eût dû se trouver sur l’échafaud de la place de Grève.
    De leurs lèvres blanches de terreur jaillit le même cri :
    – Passavant ! Passavant !…
    – Passavant ! hurla le chevalier. Hardi ! Hardi ! Passavant le Hardi !…
    Vit-il Odette étendue aux pieds d’Isabeau ? Se rendit-il compte de ce qui venait de se passer ?
    Peut-être ne vit-il qu’Isabeau, d’abord, car l’épée à la main, il se rua sur elle.
    D’un

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