Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
Vom Netzwerk:
dû me faire peur, mon maître. Et sans parler de l’antre de la Cité, de la table de marbre, de la salle funèbre, je me suis vu en des lieux où la peur eût dû me tenailler le cerveau, par exemple les cachots de la Huidelonne. Allons donc, et vous ne me verrez pas trembler, je crois. Quant à la confiance que je puis avoir en vous, ceci vous répond pour moi.
    Il frappa sur sa dague. Saïtano se mit à rire. Son rire était plus joyeux que jamais.
    – De par tous les diables fourchus, mon brave chevalier, vous m’avez vaincu. Voilà la vérité. Je m’avoue vaincu. Je vois, je sens, je devine que vous êtes conduit dans la vie par des forces plus redoutables que celles qui m’inspirent. Ah ! diable, je ne veux pas entrer en lutte avec ces forces-là, moi ! Et je me déclare vaincu… Savez-vous que c’est une histoire prodigieuse que la vôtre, et qu’elle me cause un étonnement dont je reviendrai difficilement ?
    – Quelle histoire ? fit le chevalier avec son sourire narquois et naïf.
    – Comment ! Par deux fois, j’enchaîne les trois vivants sur leurs escabeaux ! Par deux fois, je vous tiens, vous l’indispensable mort, sur ma table de marbre, et à chaque fois, au bon moment, vous vous levez, vous rendez la liberté à ces drôles et…
    – Sorcier, interrompit Passavant d’une voix sombre, ne me rappelle pas de tels souvenirs, ou je ne réponds pas de ma patience !
    – C’est bien, n’en parlons plus. D’ailleurs, nous arrivons…
    – Là où est Roselys ? fit le chevalier dont le cœur se mit à battre.
    – Oui. Là où est Roselys !…
    Saïtano s’arrêta, posa sa main sur le bras du chevalier, et, d’une voix grave :
    – La reconnaîtrez-vous seulement ? Dites… La reconnaîtrez-vous ? Songez qu’elle n’était encore qu’une enfant lorsqu’elle fut séparée de vous. Elle était bien belle, alors. Mais maintenant, que direz-vous ? À qui pourrais-je la comparer pour vous donner une idée de sa beauté radieuse et candide ? Tenez, elle est belle comme… Oui, par ma foi ! elle est belle comme Odette de Champdivers !
    Passavant tressaillit jusqu’à l’âme. Un nuage s’appesantit sur son front.
    – Marchons ! gronda-t-il.
    – Marchons, dit paisiblement Saïtano.
    Ils avaient franchi la Cité. Ils étaient maintenant dans l’Université. Ils s’avancèrent en silence, d’un pas rapide, Près de l’abbaye de Cluny, songeait Passavant avec une sourde inquiétude. Pourquoi près de l’abbaye de Cluny ?…
    – Nous y voici ! dit tout à coup Saïtano.
    Passavant regarda autour de lui. Sur sa gauche, par-dessus les maisons des étroites ruelles qu’il venait de parcourir, il vit se profiler les tourelles et les clochetons de l’abbaye. Sur sa droite, il y avait une maison basse devant laquelle Saïtano s’était arrêté.
    Le sorcier ouvrit la porte avec une clef qu’il avait sur lui, et il entra. Passavant le suivit. Saïtano referma la porte. Au bout de quelques instants, l’obscurité s’éclaira : le sorcier venait d’allumer sa cire (une très courte cire, avons-nous dit). Tous deux passèrent dans une deuxième salle dont la porte fut également refermée. Au fond, il y avait une trappe. Saïtano la souleva et descendit. Sans aucune hésitation, le chevalier le suivit.
    Au bout d’une douzaine de marches, il se trouva dans une cave qui, bien aérée, avec ses outres de vin convenablement rangées, avait la plus honnête physionomie du monde.
    Saïtano ne regardait même pas le chevalier.
    Il alla droit à une solide porte qu’il ouvrit encore avec une clef qu’il portait sur lui. Là commençait un deuxième escalier qui s’enfonçait dans les ténèbres.
    – Oh ! fit Passavant, est-ce donc là le chemin de l’enfer ?
    – Il est encore temps, sire chevalier. Si vous voulez, nous remonterons dans la rue, et nous nous séparerons.
    – Quoi ! Nous allons par ce chemin-là où est Roselys ?…
    – Nous y allons, dit tranquillement Saïtano.
    – Et il n’y a pas d’autre chemin ?
    – Pour vous, il n’y en a pas d’autres, dit Saïtano d’une voix étrange.
    Une hésitation arrêta Passavant. Saïtano continuait à descendre. L’hésitation fut si brève qu’à peine le chevalier se rendit-il compte de son propre arrêt. Mais pendant cette rapide seconde, le sorcier souffrit le mal atroce du doute. Il songea : S’il ne descend pas, il est sauvé !
    – Route étrange, se disait Passavant. Mais

Weitere Kostenlose Bücher