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Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
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d’aller se battre en Amérique. Les deux jeunes gens se virent enfin.
    Il ne se souvenait pas d’elle. Et elle était moins jolie que sa soeur Désirée, dont il avait vu le portrait. Rose n’avait encore que quinze ans et demi, mais elle perçut la déception au regard du futur fiancé : ce n’était certes pas celui de l’homme foudroyé de désir. Cependant ses camarades de garnison complimentèrent Alexandre sur son élue, qu’ils avaient aperçue deux ou trois fois à son bras ; il se sentit flatté. Le sort en fut jeté. Aussi, il était pressé de se marier.
    Le 10 novembre 1779, deux jours plus tard, M. Tascher, sa soeur, sa fille et Alexandre prirent une berline pour Paris ; elle les déposa le soir devant l’hôtel du marquis, rue Neuve-Saint-Charles. Ils y furent accueillis triomphalement.
    Rose apprit incidemment que William Keith et son père séjournaient dans la capitale. Elle apprit aussi que M. de La Pagerie, M. Keith père et le marquis de Beauharnais étaient liés par des affaires et qu’ils se rencontraient souvent. Ce fut sans doute ainsi que William apprit l’adresse de l’hôtel où Rose habitait avec son père.
    Il s’y présenta deux fois et demanda à la voir. Elle refusa. On ne lui écraserait pas le coeur deux fois de suite.
    Elle n’avait pas seize ans.
    Le triomphe trop éclatant de sa famille, qui l’entourait à Trianon, lui devint-il insupportable ? Toujours fut-il que, dix jours plus tard, Napoléon adressait à Joséphine le billet suivant :
    J’ai bien envie de te voir, mais il faut que je sois sûr que tu es forte et non faible. Je le suis aussi un peu et cela me fait un mal affreux.
    Ses dames de cour avaient, au messager, identifié l’expéditeur de la missive ; elles guettèrent la réaction de leur maîtresse. Napoléon aurait-il changé d’avis ? Non : Joséphine aurait bondi de son siège. Non, elle parut encore plus lasse.
    La semaine précédente, Hortense était venue souhaiter la nouvelle année à sa mère et la presser une fois de plus de quitter Paris et la France pour Naples. Cela faisait près de deux ans, depuis les premiers crépitements de rumeurs sur un divorce, qu’elle et Eugène l’engageaient à s’éloigner de ce qu’ils appelaient le marigot parisien. Et comme à chaque fois, elle avait répondu qu’il ne fallait pas tirer vengeance de l’infortune et que Napoléon était leur bienfaiteur à tous deux. L’éloignement ne changerait rien.
    Naples, oui, cette langueur au pied d’un volcan et les charmes d’une petite cour sur laquelle régnaient sa fille et son fils. Une province politique, mais surtout une province de l’âme où l’impératrice cacherait un exil presque honteux. Quitter Paris serait un double exil.
    — Vous êtes trop bonne, mère.
    — La bonté ne peut jamais être un défaut. Elle ne connaît pas d’excès.
    Quoi qu’elle en eût, elle ne pouvait haïr l’homme qu’elle avait comblé autant qu’il l’avait exaltée.
    — Tout homme est victime de ses rêves, lui avait dit autrefois une vieille domestique noire, Octavie, dont elle avait fait affranchir le fils, Nestor.
    Celle qui s’appelait alors Rose n’avait qu’imparfaitement deviné le sens de cette maxime. À près de trente ans de distance, elle en mesurait la justesse. William avait été victime de sa soif de gloire et de richesse. Napoléon était, comme lui, victime de sa passion de pouvoir. Quant aux hommes qui s’étaient succédé entre les deux…
    Preuve de son attachement, sinon de sa pitié pour l’Empereur, elle avait interdit qu’on touchât à quoi que ce fût dans la chambre qu’il occupait quand il venait jadis à la Malmaison.
    Elle évoqua brièvement les étreintes et les cris étouffés, les enlacements sans fin, pareils à ces lianes qui semblent descendre du ciel pour plonger dans la terre.
    Fin février, Cambacérès fit demander à la Malmaison si sa visite serait agréée. Elle le fut et Joséphine le convia même à déjeuner. Elle savait que c’était l’archichancelier, véritable inspirateur du Code civil dont l’Empereur était si fier, qui serait chargé de débrouiller l’écheveau de contradictions du divorce, mais elle ne lui en tenait pas rigueur. Il ne lui avait porté aucune antipathie et c’était en loyal serviteur de son maître qu’il assumait cette tâche épineuse. C’était un modéré, on l’avait bien vu quand il avait été président du Comité de salut public, pendant

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