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La 25ème Heure

La 25ème Heure

Titel: La 25ème Heure Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Virgil Gheorghiu
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qui ne veut pas dire que j’aie cessé de combattre.
     
     
     
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    " Il faut absolument que je leur prouve que je suis sain d’esprit ", se dit Traian. Il avait mal à la tête. La nourriture qu’il venait d’ingurgiter lui pesait comme du plomb sur l’estomac. Mais il s’efforçait de se tenir debout sur ses jambes. Il s’efforçait de sourire. Il s’approcha de l’infirmier.
    – Je voudrais parler au docteur qui dirige ce service, dit-il.
    – Attends la visite, répondit l’infirmier. Alors tu pourras parler au docteur.
    – Je ne pourrais pas le faire avant la visite ?
    – Les malades de ce service n’ont pas la permission d’appeler le docteur en dehors des heures de visite.
    – Je comprends, dit Traian. Le docteur ne va pas se déranger pour un fou. Mais je te jure que je ne suis pas fou.
    – Pourquoi t’auraient-ils envoyé ici si tu ne l’étais pas ?
    – Pour que je cesse de faire la grève de la faim, dit Traian. Je te l’ai dit. Maintenant j’ai mangé. Il n’y a donc plus aucune raison pour que vous me considériez encore comme fou. Si j’avais refusé de manger, vous auriez pu prendre mon geste pour un acte de folie et non comme une simple protestation. Mais maintenant tout est clair.
    Traian s’aperçut que l’infirmier lisait le journal sans l’écouter. Il ne lui avait prêté aucune attention.
    – Tu continues à me prendre pour un fou, même après m’avoir vu manger ?
    Sa voix tremblait.
    – Va donc te coucher, et laisse-moi lire le journal, ordonna l’infirmier.
    – Mais puisque je te dis que je ne suis pas fou !
    – Bien sûr, bien sûr, dit l’infirmier. Maintenant couche-toi et reste tranquille. Ici il faut être sage. Les garçons qui ne sont pas sages reçoivent des coups de cravache.
     
     
     
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    Le docteur ne vint pas faire sa tournée de toute la matinée. Vers midi, l’un des Bouledogues fut emmené par un infirmier. Il fut ramené une demi-heure plus tard, étendu sur un brancard, et fut déposé au milieu de la chambre. Ses narines bouchées avec de l’ouate frémissaient. Son front était pâle. Une mousse verdâtre lui coulait de la bouche comme aux chiens enragés. Ses lèvres tremblaient.
    – Que lui a-t-on fait ?
    L’autre Bouledogue ricanait en regardant le corps raidi de son ami secoué de spasmes. Sa poitrine se soulevait comme un soufflet de forge. Les muscles des mains et des jambes tremblaient tout seuls comme détachés du reste du corps. Sa peau avait pris une autre couleur. Ce n’était plus la peau d’un homme vivant. Son épine dorsale était raide, de la rigidité des choses mortes. Même les spasmes qui le secouaient n’appartenaient plus à la vie. C’étaient des spasmes automatiques de poupée mécanique. La seule chose qu’il avait de vivant, c’était cette écume verdâtre qui lui coulait de la bouche et qui se répandait sur sa poitrine, et de là sur la toile du brancard.
    – Qu’a-t-on fait au Bouledogue ? demanda de nouveau Traian.
    – Rien, répondit l’infirmier. Des piqûres.
    – Quel genre de piqûres ? Pourquoi se débat-il comme cela ?
    – Ne sois pas curieux, mon gros ! dit l’infirmier. On t’en fera à toi aussi. Pas plus tard que demain.
    – Demain ?
    Traian Koruga regarda le corps qui se débattait sur le brancard.
    – Ça t’étonne ? dit l’infirmier. Tu n’y crois pas ? Ici tout le monde doit avoir des piqûres.
    Il changea la ouate du nez du Bouledogue et lui pinça la joue. Le Bouledogue n’eut pas de réaction.
    – Même si tu te mettais à le couper en morceaux avec un couteau, il ne sentirait rien. Tant qu’il a cette crise, il ne sent rien. Vous avez tous besoin de piqûres. Elles mettent les nerfs en mouvement. Regarde la belle gymnastique qu’ils sont en train de faire.
    Traian se mit sur le lit, le visage enfoui dans les mains. La porte s’ouvrit. Traian tressaillit. Mais ce n’était pas le docteur. Ce n’était qu’un infirmier qui venait chercher le second Bouledogue. Il le prit par le bras et sortit de la chambre avec lui.
    Peu de temps après, l’autre Bouledogue fut ramené dans la chambre et déposé au milieu de la pièce sur un brancard, à côté de son ami. Il avait le même tampon d’ouate dans le nez et la même écume blanche et verte à la bouche, cette écume de chien enragé. Son corps se débattait avec saccades.
    Le vieillard fut emmené lui aussi, puis ramené quelques instants après sur un

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