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La 25ème Heure

La 25ème Heure

Titel: La 25ème Heure Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Virgil Gheorghiu
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au bourgmestre. Les infirmiers le roulèrent dans une couverture et l’emportèrent comme un paquet vers l’ambulance.
    La fenêtre de l’ambulance était fermée d’un rideau. Mais Traian Koruga était certain que Iohann Moritz devait se trouver à la porte de l’infirmerie pour voir l’ambulance démarrer.
    Traian Koruga sourit en pensée à Iohann Moritz et lui dit : " Adieu. "
     
     
     
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    –  Deux Américains nous ont amené un prisonnier fou.
    Le médecin chef de l’hôpital-prison de Karlsruhe sortit du lit, tourna le bouton de l’électricité et regarda sa montre. Il était une heure du matin. L’infirmier qui était venu le prévenir l’aida à s’habiller. Le docteur quitta la chambre. Il était de mauvaise humeur.
    Les prisonniers n’étaient amenés à l’hôpital que par groupes. Dans le camp, on attendait que le nombre des malades atteigne le chiffre de cent pour les transporter à l’hôpital. Même ceux qui étaient gravement malades étaient obligés d’attendre dans le camp trois ou quatre semaines, jusqu’à ce que le nombre soit complet et que le transport tout entier puisse être livré. Au cours de toute une année, il n’y avait eu que deux exceptions. Celle-là était la troisième.
    – Quel genre de fou est-ce qu’il peut bien être pour qu’ils nous l’envoient tout seul et à cette heure de la nuit ? demanda le docteur en pénétrant dans le bureau.
    – Un cas très grave, sans doute, dit l’infirmier. Mais je ne l’ai pas encore vu. Il dormait dans l’ambulance. Si deux Américains ont pris la peine de nous l’amener à une heure pareille cela ne peut-être que sérieux.
    Dehors il faisait froid. Le docteur venait de sortir de son lit tout chaud. Il grelottait encore en signant la feuille d’entrée du prisonnier.
    Les deux Américains montèrent dans l’ambulance et repartirent. Le docteur alla se coucher et renonça à voir le prisonnier sur-le-champ. Il faisait trop froid. Il donna ses instructions pour qu’il soit transporté à la section respective.

Traian Koruga ne savait pas où il se trouvait. Il ne savait pas que l’ambulance avait eu une panne en route, une panne qui les avait retardés jusqu’à minuit. Il ne se rendait même pas compte de l’heure. Il n’avait ouvert les yeux qu’au moment où on l’avait fait traverser la cour de l’hôpital, étendu sur le brancard. À cet instant-là, il avait vu le ciel bleu tout plein d’étoiles.
    " La Voie lactée ", dit-il et il sourit à la grande route blanche là-haut dans le ciel. Puis il se rappela les paroles du bourgmestre : "Nous allons vous envoyer dans un hôpital où vous serez nourri de force. " Traian était décidé à refuser tout secours médical. " Tant que je serai lucide, je me refuserai à manger et à boire. "
    Les infirmiers qui l’avaient entendu dire " la Voie lactée " riaient. Ils posèrent le brancard par terre. L’un d’eux s’approcha de Traian et lui dit ironiquement :
    – Nous sommes arrivés sur la Voie lactée.
    Traian Koruga n’apprécia pas la plaisanterie. Puis il sentit qu’on le prenait dans les bras et qu’on l’étendait sur un lit.
     
     
     
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    T raian K oruga regardait la chambre dans laquelle il se trouvait. Au plafond, la lampe était entourée d’une toile métallique. La fenêtre était solidement grillée. Dans la chambre se trouvaient quatre lits. Deux malades restaient l’un près de l’autre et causaient entre eux. Ils portaient des uniformes allemands.
    Lorsque Traian était entré la veille dans la chambre, ils n’avaient même pas tourné la tête et avaient continué à parler. Tous deux paraissaient jeunes. Le troisième malade restait dans son lit la couverture tirée sur sa tête. Traian apercevait ses gros souliers, émergeant de sous la couverture. Traian se demandait comment le malade à gros souliers pouvait encore dormir à cette heure-là.
    Près de la porte, il y avait un infirmier en blouse blanche. Il était assis. Sa tête ressemblait à celle du bourgmestre Schmidt. Une tête carrée et massive. Une tête en bois. Tous les muscles du visage étaient immobiles, morts. Ses regards aussi étaient morts et vitreux. L’infirmier n’avait pas la tête d’un homme mort mais plutôt celle d’un homme qui n’a jamais été vivant.
    L’infirmier s’approcha de Traian.
    – Tu ne veux pas nous raconter une histoire ? demanda-t-il.
    Il lui pinça le menton comme un enfant qu’on

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