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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Noir
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une enquête. Si, plus tard, on trouvait des preuves d’innocence sur les points que vous contestez, votre mémoire serait allégée d’autant et, sans préjuger en rien de la sentence que rendra le tribunal, il regretterait certainement de n’avoir pu connaître à temps les vrais coupables du guet-apens d’aujourd’hui.
    En ce moment, il se fit dans la foule des soldats un grand mouvement, et au-dessus de cette masse de troupes sans armes, on vit onduler une double haie de baïonnettes.
    Dubois-Crancé, étonné qu’un incident quel qu’il fût vint interrompre le cours de la justice, fit un signe imperceptible au président.
    Celui-ci dit lestement   :
    – La parole est à l’accusation.
    Mais, chose inouïe, une rumeur sourde mais intense se faisait entendre sur le passage des baïonnettes, qui, seules, émergeaient au-dessus des têtes, sans qu’il fût possible de savoir ce que c’était que ce piquet en marche.
    Évidemment il se dirigeait vers la cour martiale.
    Peu à peu les bruits de voix devinrent plus nets et le président entendit distinctement crier   :
    – Attendez   ! attendez   !
    Que se passait-il donc pour que les soldats osassent ainsi prendre la parole devant une cour martiale   ?
    Dubois-Crancé sentit profondément ce manque de respect et ses lèvres se pincèrent.
    Mais un large vide s’étant produit dans les rangs des spectateurs, on vit que la haie des baïonnettes escortait des prisonniers lyonnais.
    En tête de ces prisonniers, un capitaine de l’armée révoltée.
    En tête du piquet, un capitaine républicain.
    Au bruit, succéda un grand silence.
    On entendit la sonnette du président s’agiter.
    – La séance est suspendue   ! dit-il.
    C’était un moyen de s’informer de ce qui se passait, sans porter atteinte à la majesté de la cour.
    La séance suspendue, le président, interpellant le capitaine républicain amené devant le tribunal, lui demanda   :
    – Pourquoi, capitaine, amenez-vous ces prisonniers sans que la cour les ait mandés   ?
    Le capitaine, qui n’était autre que la Ficelle, répondit   :
    – Mon colonel, si je n’avais pas entendu prononcer la suspension de la séance, je me serais tenu hors du prétoire et je vous aurais envoyé un avertissement écrit pour que vous me mandiez comme témoin à votre banc, en vertu de votre pouvoir discrétionnaire.
    La Ficelle, ex-policier parisien, « connaissait son affaire », comme il le disait souvent. Sa réponse le sauva certainement des arrêts.
    Il continua   :
    – Mais, du moment où vous suspendiez la séance, mon colonel, j’ai cru que vous aviez compris qu’il y avait du nouveau et que vous vouliez m’interroger, car j’apporte ici le flambeau de la vérité.
    Sur cette fin de phrase ronflante, la Ficelle regarda l’accusateur public qui passait pour abuser un peu de l’éloquence   ; la Ficelle eut l’air de lui dire   :
    – Et moi aussi, j’en pince, quand je veux, de la guitare oratoire   ! Et moi aussi, je fais mes petits effets   !
    Le gendarme était un assez bon gendarme.
    Il ne refusait jamais un encouragement à qui le méritait, il sourit à La Ficelle, en collègue s. v. p, car ils étaient tous deux capitaines, comme on sait.
    Le président, après avoir consulté de l’œil Dubois-Crancé, dit à la Ficelle   :
    – Parlez, capitaine.
    Mais La Ficelle comprit que s’il parlait pendant la suspension, il faudrait déposer ensuite et donner une seconde édition de son premier récit.
    Il sentait qu’une redite serait fastidieuse.
    – Pardon, mon colonel, dit-il, je ne voudrais pas abuser des instants du tribunal, et si je déposais en séance, comme témoin…
    – C’est vrai   ! dit le président.
    Il rouvrit la séance, fit prêter serment à la Ficelle, et lui demanda   :
    – Dites ce que vous savez   !
    La Ficelle raconta les faits et, arrivé aux coups de feu, il continua son récit.
    – Je ne connais pas, dit-il, la déposition de mon collègue et ami, le capitaine Monte-à-Rebours, ici présent. Mais pendant qu’il regardait ce qui se passait aux avant-postes, moi, je m’avisais de faire fouiller une maison suspecte, dont mon collègue n’avait pas remarqué les fenêtres fermées.
    Tous les yeux se portèrent sur ce pauvre Monte-à-Rebours que ce coup de patte du cher collègue griffait jusqu’aux os.
    La Ficelle continua avec un air gracieux pour Monte-à-Rebours très ennuyé   :
    – Je fis donc fouiller cette maison et

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