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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Noir
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le pouvait plus.
    Saint-Giles était littéralement couvert de blessures.
    La mitraille avait haché ses vêtements et lacéré sa peau   ; grâce à un bonheur inouïe, il n’avait été qu’égratigné en quelque sorte par le gigantesque coup de griffes du canon.
    Mais une balle, celle de l’Auvergne assassin, lui avait labouré le cou.
    Toute l’armée se sentait prise pour lui de sympathie.
    Sympathie muette.
    L’accusateur public qui s’était levé attendit que le président eût constaté l’identité de l’accusé par ses questions   ; après quoi, il lut l’acte d’accusation.
    C’était une pièce sèche, nette, précise.
    Le président et chacun des juges en avaient copie sous les yeux et en suivaient la lecture.
    Quand elle fut terminée, le président posa ses questions.
    C’était un colonel d’infanterie, un vieux soldat qui avait fait, comme sergent, les guerres de la Monarchie et qui avait gagné ses épaulettes sur les champs de bataille de la République.
    – Accusé, demanda-t-il allant droit au but, niez-vous avoir été l’amant de la baronne de Quercy, une émigrée   ?
    – Non   ! dit Saint-Giles d’une voix ferme.
    Il y eut un murmure d’étonnement dans la foule.
    Il avouait, il était coupable.
    Le président regarda les autres juges, puis il posa une seconde question   :
    – Accusé, avez-vous été fait prisonnier volontairement   ?
    – Non   ! dit énergiquement Saint-Giles. J’ai été trahi par une troupe d’Auvergnats commandée par un certain capitaine Pierre qui m’a livré.
    – Je vous ferai observer, dit le président, que nier ce second point ne vous sauvera pas puisque le premier entraîne la mort.
    – N’ai-je pas refusé un défenseur quand on me l’a offert   ? dit Saint-Giles. Je me suis condamné à mort moi-même. Il y a deux mois, et, pendant toute la journée, je me suis offert en cible vivante à l’ennemi. Cette mort que je cherchais n’a pas voulu de moi.
    – Vous vous reconnaissez donc coupable   ?
    – Je vous répète que je m’étais condamné.
    L’armée, les juges et Dubois-Crancé lui-même comprirent que Saint-Giles devait avoir été victime de quelque fatalité.
    Le président se taisait, cherchant quelle question il devait poser pour permettre à l’accusé d’expliquer sa conduite   ; mais Saint-Giles prit la parole.
    – Je dois être fusillé, dit-il   ; je ne peux, ne veux ni ne daigne défendre ma vie, mais je veux plaider pour mon honneur. Dans une heure, je serai exécuté   ; je ne crois pas qu’un seul de vous m’ayant vu au feu, croit que je tiens à mes jours. Devant ma fosse creusée d’avance, je l’aie vue ouverte en venant ici, je jure de vous dire la vérité.
    Après un silence   :
    – La voici, je le jure   !
    Et avec l’éloquence qui faisait de lui un orateur si puissant, il raconta ses amours avec M me  de Quercy, comment il l’avait aimée sans la savoir émigrée, comment elle l’avait fait enlever par le capitaine Pierre, comment elle lui avait rendu visite en prison.
    Arrivé à cet endroit de son récit, il eut un superbe mouvement oratoire.
    – Voilà ma faute   ! dit-il. Pour vaincre, nous tous, enfants d’une République menacée par l’Europe, nous devons être d’airain. J’ai faibli et vous avez vu que je sais comment on paie une défaillance à la patrie.
    Il raconta ensuite comment il avait quitté la baronne, non pas à Marseille, mais à Avignon, comment il avait levé le bataillon de la Croix-Rousse.
    – Quant à ce guet-apens dans lequel j’aurais trempé, s’écria-t-il, je ne veux pas me justifier. C’est absurde   ! Les royalistes ont connu mon projet par leurs espions   ; ils en ont craint le succès, ils ont soudoyé quelques misérables pour rompre la trêve. Faites une enquête après mon exécution et vous verrez que je ne suis pour rien dans cette trahison. Condamnez-moi mais seulement pour une folie de jeune homme qui ne déshonore pas.
    Au milieu de l’émotion générale, le président laissa échapper cette phrase   :
    – Il est bien malheureux que vous ne puissiez donner des preuves de votre innocence sur deux points   :
    1 e Lors de votre capture par les Lyonnais, le 20 mai   ;
    2 e Dans le guet-apens d’aujourd’hui.
    Le vieux colonel regarda Dubois-Crancé et dit sur un ton de reproche   :
    – La cour martiale ne peut surseoir au jugement qui doit être rendu séance tenante   ; elle ne peut s’éclairer par

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