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La belle époque

La belle époque

Titel: La belle époque Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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de personnes pour la scène de la cour d'Henri IV?
    —    Cinq cents figurants, si nous voulons lui donner toute la majesté voulue.
    —    Nous verrons avec nos employés, cela devrait pouvoir se faire.
    Pour le bénéfice de James McDougall, il donna son nom et celui de ses collègues.
    Dans de nombreux commerces de la rue Saint-Joseph, les propriétaires convoqueraient le personnel dès le lendemain matin afin de leur vendre l'idée de consacrer tous leurs loisirs du prochain mois à des répétitions, puis plusieurs soirées fin juillet pour les représentations proprement dites. Comme seul des notables hériteraient de rôles parlants, ce ne serait pas plus difficile que de suivre la messe : afficher un air recueilli et se déplacer en groupe au moment prévu. Cependant, ces entrepreneurs devraient mettre la main à leurs goussets afin de procurer des costumes à plusieurs de ces employés.
    —    Y a-t-il un moment où tout le monde se retrouve à cheval? questionna Joseph Savard.
    —    Les chevaux seront souvent nécessaires, expliqua Lascelles, d'ailleurs la scène d'Henri IV en exigera des dizaines.
    —    Tous les membres du club de chasse pourront être là.
    Pendant de longues minutes encore, les volontaires se
    succédèrent, parfois au nom d'associations fraternelles ou religieuses, comme les Chevaliers de Colomb, désireux de représenter les hommes de Frontenac, ou les zouaves pontificaux qui accueilleraient les ursulines à Québec en affichant une joie délirante. A la fin de la soirée, quand James McDougall fit le compte des engagements pris pendant l'assemblée, Frank Lascelles se trouvait à la tête d'une petite armée comptant plus de trois mille volontaires. Comme seul le premier pas coûte, les jours suivants, l'enthousiasme communicatif en soulèverait un autre millier.
    Au moment de quitter l'hôtel de ville, Joseph Savard fit un bout de chemin avec Thomas Picard sur la Grande Allée. Il demanda, souriant en imaginant la scène :
    —    Votre femme sait-elle monter à cheval ?
    —    Un peu. Parfois, nous louons une monture le dimanche, afin de nous promener sur les plaines d'Abraham. Mais elle ne pourrait certainement pas galoper en pleine forêt à la poursuite d'un pauvre petit renard.
    —    Je ne pensais pas au club de chasse, mais au pageant. Elle aurait fière allure, si elle personnifiait une femme de l'entourage d'Henri IV.
    Thomas laissa échapper un ricanement amusé en se souvenant de sa dernière conversation avec Elisabeth.
    —    Elle aurait même fière allure, comme vous dites, en Marie de l'incarnation, commenta-t-il.
    —    Lui demanderez-vous de se joindre à nous ?
    —Je transmettrai votre invitation. Elle décidera.
    Le palais de l'archevêque Bégin se situait à l'arrière de la basilique, dans la rue Port-Dauphin. L'édifice majestueux, construit en pierre grise, servait aux réunions du chapitre canonial, à l'administration du diocèse et, bien sûr, à loger le prince de l'Eglise.
    Rallier les bourgeois de Québec à l'organisation des fêtes, les convaincre de se muer en comédiens et à recruter leurs employés pour faire de même était une chose. Mais demander à des avocats, pire à des marchands, d'interpréter les héroïques missionnaires qui avaient converti les Sauvages au christianisme, cela ne se faisait tout simplement pas, à moins de vouloir soulever une véritable croisade contre soi.
    Le comte Grey se déplaça lui-même le 15 juin afin de dénouer l'impasse: le vice-roi négocierait directement avec le prince de l'Eglise. Bien sûr, il devait être flanqué du metteur en scène, si des questions trop précises sur la distribution venaient à être évoquées. Au moment d'entrer dans les appartements de Louis-Nazaire Bégin, le gouverneur général
    s'inclina, baisa avec respect l'anneau en disant en français :
    —    Votre Eminence, je vous remercie de bien vouloir me recevoir.
    —    Tout le plaisir est pour moi, Excellence.
    —    Je vous présente monsieur Frank Lascelles.
    —    Your Highness, balbutia celui-ci en s'inclinant sur l'anneau à son tour.
    C'était une journée faste pour l'ecclésiastique : deux protestants, dont l'un représentait le chef de l'Eglise anglicane au Canada, lui rendaient hommage ensemble. De la main, il indiqua une pièce voisine. Le trio rejoignit un prêtre assis derrière une petite table, une plume à la main, des feuilles de papier devant

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