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La campagne de Russie de 1812

La campagne de Russie de 1812

Titel: La campagne de Russie de 1812 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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L'Empereur
a été tué sous les murs de Moscou, le 8 octobre.

    – Tu me fais
des contes. J'ai une lettre de lui ce jour-là, je puis te la
faire parcourir.

    C'était
faux, mais Savary commençait à reprendre ses esprits.

    – Me
reconnaissez-vous ? s'écrie-t-il aux soldats qui ont envahi la
pièce.

    Mais en ce
personnage en chemise, les hommes ont bien du mal à
« reconnaître », son Excellence.

    – Connaissez-vous
l'homme auquel vous obéissez pour exécuter un tel acte,
poursuit-il. C'est un prisonnier d'État, un conspirateur !

    Cependant Lahorie,
qui s'est éclipsé, revient avec le général
Guidal, qui s'élance sur Savary, les yeux injectés de
sang. Il trébuche sur une chaise tombée à terre,
pousse un cri de douleur et, néanmoins, tout en se frottant
la jambe, marche sur le ministre.

    – Me
connaissez-vous ?

    – Non, je ne
te connais pas.

    – Je suis le
général Guidal, que vous avez fait arrêter à
Marseille.

    – Ah ! fait
Savary, je sais cela...Es-tu venu chez moi pour te déshonorer
par un lâche assassinat ?

    – Non,
réplique Guidal, je ne vous tuerai pas, mais vous allez venir
avec moi.

    Le duc de Rovigo
s'incline. Il s'habille sous l'œil goguenard des soldats et, un
quart d'heure plus tard, Guidal le confie à Bault, de plus en
plus stupéfait. On lui donne à garder le préfet,
le ministre de la Police et le chef de la Sûreté, et les
trois ordres sont signés par Guidal, son ancien prisonnier !

    À la même
heure, le commandant Soulier, après avoir, une dernière
fois, changé de chemise, s'est mis à la tête de
la dernière compagnie demeurée rue Popincourt et,
suivant les ordres donnés par Malet a occupé l'Hôtel
de Ville sans la moindre difficulté. Il a mis au courant le
préfet, le comte Frochot, de sa mission, et celui-ci s'est
incliné avec tant de bonne grâce qu'il n'a même
pas été nécessaire de l'envoyer en prison.

    – Il y a de
la place dans la grande salle pour votre nouveau gouvernement,
déclare-t-il ; quant à votre état-major, il
pourra prendre place dans le bas de l'Hôtel de Ville, il y sera
très bien.

    C'est ainsi que la
conspiration poursuivit son cours, menée par des hommes qui
n'étaient nullement dans le secret et qui n'en jouaient que
plus naturellement leur rôle... La machine était lancée
et bien lancée. On vit arriver à la caserne des Minimes
et à celle de la Courtille des estafettes de la 10e cohorte
porteuses de pièces signées Malet ordonnant aux
régiments de prendre les armes et d'aller occuper, au nom du
nouveau gouvernement, le Palais-Royal, le quai Voltaire, le Sénat,
la Trésorerie, les principales barrières de Paris,
tandis que le plus gros des troupes devait se masser place Vendôme
où Malet opérait lui-même... Tous obéissent,
même le colonel Rabb, commandant la garde de Paris. En somme, à
9 h 45 du matin, ce vendredi 23 octobre 1812, Malet est maître
des trois quarts de Paris. Une fois que l'on se serait assuré
du ministère de la Guerre et de Cambacérès, il
n'y aurait plus qu'à aller cueillir l'Impératrice à
Saint-Cloud...

    Et Boccheciampe ?

    Ici, il faut
donner la parole à Alain Decaux : « On se rappelle
que Malet avait nommé Boccheciampe, avec beaucoup de grâce,
préfet de la Seine. Le Corse s'était donc dirigé
vers l'Hôtel de Ville pour retrouver le commandant Soulier,
prendre possession des lieux et remplacer Frochot. Il contempla avec
respect le monument... et s'en tint là. Il était vêtu
d'un pauvre habit râpé, il manquait d'allure à un
point incroyable, il avait un accent terrible. Il se dit que jamais
personne ne voudrait le reconnaître comme le nouveau préfet.
Lorsqu'il eut bien contemplé le bâtiment de l'Hôtel
de Ville, il s'en alla humblement, tristement... »

    Là se borna
son activité de préfet de la Seine.

    *****

    Fait surprenant,
le seul homme qui, ce jour-là, joua mal son rôle, fut le
général Malet. Après avoir quitté ses
complices malgré eux, il était arrivé place
Vendôme, flanqué de son caporal-officier d'ordonnance.
Derrière eux, le pas rassurant de la 1ère compagnie de
la 10e cohorte martelait le pavé humide.

    Il avait enfin
cessé de pleuvoir, mais des nuages chargés de pluie
couraient au-dessus des toits de Paris.

    Le commandant de
la place de Paris se nommait le général Hulin. C'était
un homme courageux : il l'avait prouvé le jour de la prise de
la Bastille. Il était couché au côté de sa
femme lorsque se présenta le

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