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La campagne de Russie de 1812

La campagne de Russie de 1812

Titel: La campagne de Russie de 1812 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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de
paris : Jean-Auguste Rateau. Malet le prit un jour par le bras,
l'entraîna au jardin et lui demanda « s'il avait
envie d'avancer ».

    – Ah ! Mon
général, répondit le caporal, mais je ne demande
que cela !

    – Eh bien,
affirma Malet je pense à vous. Vous êtes jeune, à
l âge des belles ambitions. Je crois que l occasion se
présentera bientôt pour moi de vous être utile.
D'ici peu, je vais être chargé de mettre à
exécution certains ordres du Sénat. Voulez-vous être
mon aide de camp ?

    Le caporal faillit
s'évanouir de joie.

    Pour le poète
Boutreux, ce fut tout aussi facile. Il était venu voir Lafon à
Sainte-Pélagie pour demander à l'abbé de lui
trouver « une bonne place ». Malet le prit à
part et lui confia :

    – Le prince
royal de Suède va débarquer dans le nord et couper la
retraite à l'Empereur. Aussitôt qu'on apprendra que Sa
Majesté a succombé, tout est prêt pour
l'établissement d'un nouveau gouvernement... Je suis
d'ailleurs chargé d'un rôle important dans le futur
régime.

    Et le général
lui proposa « une excellente place de commissaire de
police ».

    Voilà
pourquoi, à 3 heures et demie du matin, ce jeudi 23 octobre
1812, Malet, qui avait adroitement sauté le mur de la maison
de santé, se présentait avec ses deux compagnons à
la sentinelle de la caserne Popincourt. Lafon, qui s'était
évadé en même temps, tremblait de tous ses
membres et préférait rejoindre son complice lorsque
tout serait terminé, c'est-à-dire à 9 heures, à
l'état-major de la place Vendôme.

    Le fonctionnaire,
voyant briller dans la nuit les ors de l'uniforme de Malet, a appelé
le sergent de garde. Celui-ci accourt et se fige dans un
réglementaire garde-à-vous.

    – Où
est votre commandant ? demande Malet d'un ton sec.

    Le chef de la 10e
cohorte casernée rue Popincourt, le commandant Soulier,
demeure à deux pas. Il n'y a pour lui qu'un seul dieu :
l'Empereur. Aussi imagine-t-on sa douleur lorsque Malet le réveille
en lui déclarant :

    – Commandant,
l'Empereur est mort le 7 octobre dernier sous les murs de Moscou. Le
gouvernement impérial est renversé.

    Le malheureux se
met à sangloter, tandis que Malet lit les faux documents :
actes du Sénat, nomination au grade de général,
ordre avec sa cohorte d'occuper l'Hôtel de Ville, et de
préparer, de concert avec le préfet de la Seine, des
salles convenables pour la réunion du nouveau gouvernement.

    – Jugez de
ma position pendant la lecture de cette pièce, racontera le
commandant Soulier au conseil de guerre ; c'est que j'ai trempé
quatre chemises de sueur.

    Il transpire en
effet à tel point qu'il n'ose sortir de son lit, et, à
la demande de Malet, fait appeler son adjudant-major, le capitaine
Piquerel.

    – Ah !
Capitaine, quelle triste nouvelle j'ai à vous apprendre ! Mon
pauvre ami, l'Empereur est mort !

    – Est-ce
possible ? murmure officier « stupéfait et
anéanti ».

    – Rendez-vous
au quartier, faites prendre les armes à la cohorte et
mettez-vous à l'entière disposition du général.

    Le petit groupe
repart pour la caserne. On n'ose pas sonner le réveil afin de
ne pas inquiéter le quartier. Sous la pluie qui continue à
tomber, les caporaux de chambrée réveillent les hommes
qui descendent tout en boutonnant leur capote. Lorsque la cohorte est
rassemblée – il est déjà près de 5
heures – Boutreux, ceint de son écharpe tricolore,
commence à lire d'une voix tremblante le sénatus-consulte
annonçant la mort de l'Empereur et la création du
nouveau gouvernement. Le sous-lieutenant Gomont, qui se trouve
derrière ses hommes, entend mal ce que marmonne le
poète-commissaire. « Je m'imaginais, déclarera-t-il
plus tard, que c'était pour nommer un régent, attendu
que S. M. le roi de Rome était encore trop jeune... »

    Chose surprenante,
cet officier sera le seul ce matin-là à penser au roi
de Rome. Pas plus les préfets que les ministres n'auront
l'idée de se dire que l'Empereur étant mort, Napoléon
Il montait sur le trône impérial...

    À 5 heures
du matin, Malet, flanqué de Rateau et de Boutreux, suivi du
capitaine Piquerel à la tête de presque toutes les
compagnies de sa cohorte, prend le chemin de la prison de la Force,
dont la façade chancreuse s'ouvrait rue des Boulets, à
l'angle de la rue du Roi-de-Sicile. Malet tend au concierge Bault –
l'ancien gardien de Marie-Antoinette à la Conciergerie –
l'ordre de libérer les généraux Lahorie

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