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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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presque insensible. À la voir si belle, si aimante, si remplie de confiance et de bonheur, nul ne pouvait se soustraire à la suave influence de l’atmosphère de paix qui semblait émaner d’elle. Saint-Clair sentait descendre en son âme un calme étrange : ce n’était pas de l’espoir, il n’était plus possible ; – - ce n’était pas de la résignation ; c’était comme une tranquille halte dans le présent, trop beau pour qu’on voulut songer à l’avenir ; – c’était ce délicieux repos que l’on ressent à l’automne, lorsque, dans les grands bois silencieux, on jouit d’autant plus de la fébrile et brillante rougeur du feuillage, de l’éclat des dernières fleurs penchées au bord des ruisseaux, que ces beautés éphémères sont prêtes à vous échapper.
    L’ami qui portait si souvent Éva pénétrait dans sa confiance plus avant que personne. C’était à Tom que l’enfant, qui eût craint d’affliger son père, faisait confidence de ces pressentiments qui vibrent dans l’âme à mesure que ses liens terrestres se détendent, et qu’elle s’apprête à laisser pour jamais sa prison d’argile.
    Tom finit par ne plus coucher dans sa chambre ; il passait les nuits étendu par terre dans la véranda, prêt à courir au premier bruit.
    « Quelle singulière fantaisie avez-vous, oncle Tom, de dormir comme un chien, n’importe où ? lui demanda miss Ophélia. Je vous prenais pour un homme rangé, qui aime à se coucher tout chrétiennement dans son lit.
    – Oui, bien, auparavant, miss Phélie, dit Tom avec mystère ; mais à présent…
    – Eh bien, qu’y a-t-il, à présent ?
    – Faut pas parler haut ; maître Saint-Clair ne veut pas y entendre ! mais, miss Phélie, vous savez bien, faut-il pas quelqu’un qui veille pour attendre l’époux ?
    – Que voulez-vous dire, Tom ?
    – Il est dit dans l’Écriture : « Sur le minuit, on entendit crier : Voici l’époux qui vient ! » c’est lui que j’attends, miss Phélie ; – d’ailleurs, je pourrais pas dormir loin, faut que je sois tout près pour entendre…
    – Mais, oncle Tom, d’où vous vient cette pensée ?
    – Miss Éva a parlé à moi. Le Seigneur envoie son messager à l’âme. Faut que je sois là, miss Phélie. Quand cette enfant bénie entrera dans le royaume, la porte s’ouvrira si grande que nous entreverrons tous la gloire.
    – Oncle Tom, est-ce que miss Éva vous a dit qu’elle se sentit plus mal ce soir ?
    – Non ; mais elle a dit ce matin que le temps était proche. – Il y a quelqu’un qui avertit l’enfant, miss Phélie ; ce sont les anges. « C’est le son de la trompe avant l’aube du jour ! » ajouta Tom, citant un de ses hymnes favoris.
    Ce dialogue entre miss Ophélia et Tom se passait de dix à onze heures, un soir, lorsque après avoir terminé tous ses arrangements pour la nuit, elle le trouva, couché sur le seuil, en allant verrouiller la porte extérieure.
    Elle n’était ni nerveuse, ni impressionnable ; mais le ton solennel, l’aspect ému et grave de Tom, la frappèrent. Toute l’après-midi, Éva s’était montrée plus vive, plus joyeuse, plus forte de beaucoup. Assise dans son lit, elle s’était fait apporter tous ses petits joyaux, et elle avait désigné ceux de ses amis auxquels elle destinait chaque objet. Depuis plusieurs semaines, elle n’avait pas paru aussi animée ; sa voix était plus ferme, plus naturelle, et son père, heureux de la trouver, comme il disait, plus elle-même qu’elle ne l’avait encore été depuis sa maladie, après l’avoir embrassée en la quittant, murmura à l’oreille de miss Ophélia : « Cousine, nous la garderons, après tout ! Certainement elle va mieux ! » Et il s’était allé coucher le cœur plus léger qu’il ne l’avait eu depuis longtemps.
    Mais à minuit, – heure étrange et mystique ! – quand le voile entre l’éphémère présent et l’éternel avenir devient plus transparent, – alors vint le messager !
    Il y eut un son dans la chambre muette : d’abord des pas pressés, c’étaient ceux de miss Ophélia, qui avait résolu de veiller toute la nuit, et qui, à cette heure, discerna ce que les gardes expérimentées appellent un changement . La porte du dehors fut ouverte : Tom, aux aguets, était sur pied.
    « Appelez le docteur, Tom, dit miss Ophélia ; ne perdez pas une minute ! Et, traversant la chambre, elle frappa doucement à la porte de

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