Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La chambre maudite

La chambre maudite

Titel: La chambre maudite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
Vom Netzwerk:
il avisa dans un recoin une pièce de lin propre qui voisinait avec un petit crâne humain. Réprimant malgré lui un frisson, Huc s’empara de la toile et entreprit de dégager le plancher à côté de François pour la poser, dépliée, à terre.
    –  Je n’aime pas ce teint cireux ! commenta Bertrandeau.
    –  Aussi ne tardons pas.
    –  A mon signal ! proposa le couvreur tandis qu’il prenait François par les jambes.
    Huc s’installa aux épaules, soutenant avec ses avant-bras la tête molle, puis ils firent glisser le corps sur l’étoffe tendue. S’en servant de brancard, ils allaient le soulever lorsque le regard de Bertrandeau accrocha une forme éventrée de laquelle une coulée dorée s’était échappée et avait refroidi.
    –  Qu’est-ce donc que ceci ? ne put-il s’empêcher de demander.
    Huc suivit son regard et comprit quant à lui aussitôt.
    –  Je l’ignore, mentit-il pourtant, et je crois qu’il vaut mieux pour tous que nous continuions à nous désintéresser de cette pièce.
    Bertrandeau le dévisagea un instant, mais ne parvint à déchiffrer sur ses traits qu’une soudaine et profonde lassitude.
    –  Tu as sans doute raison, Huc. Sortons d’ici !
    Joignant le geste à la parole, dans un même élan de complicité les deux hommes enlevèrent le brancard improvisé et traversèrent la pièce. Parvenus sur le palier, ils déposèrent leur fardeau à terre. Tandis que Bertrandeau faisait dégager l’escalier sur lequel ses gens et ceux de la maisonnée s’étaient agglutinés dans l’attente de nouvelles, Huc extirpa la clé de sa bourse et referma à double tour derrière eux.
     
    Antoinette s’était reprise devant la gentillesse de Clothilde dont l’œil gauche commençait à noircir, tant la gifle de François avait été appuyée.
    Ni l’une ni l’autre ne s’expliquait cette brutalité soudaine. Clothilde avait bien entendu parler de cette histoire selon laquelle leur jeune seigneur aurait violenté une jouvencelle du pays, mais elle venait de Thiers, et là-bas peu de gens avaient prêté foi à cette fable, tant la réputation des seigneurs de Vollore était au-dessus de ces calomnies. D’ailleurs, ce n’était qu’une rumeur qui s’infirmait dès qu’on posait quelques questions. Depuis qu’elle était au château, soit six années, elle avait eu, certes, à subir son caractère exécrable, mais jamais François de Chazeron n’avait levé la main sur elle ni sur quelque autre de la maisonnée. Voilà pourquoi, elle avait beau creuser et recreuser sa tête lourde, elle ne pouvait répondre aux questions d’Antoinette que par une incompréhension totale, renforcée de sa certitude que nul au château n’était monté là-haut durant l’absence du seigneur.
    Elles en étaient là, l’une et l’autre, lorsque le jeune Guillaumet s’avança dans la pièce en courant presque, pour exiger maladroitement qu’on en dégage la large table.
    –  On amène mon seigneur ! ajouta-t-il avec tant de déférence qu’on eût dit que le roi lui-même s’était annoncé.
    Aussi prompte qu’efficace, Clothilde enleva le bol vide qui se trouvait encore devant Antoinette, tandis que celle-ci se reculait, au risque de renverser le banc sur lequel elle était assise. Se levant brusquement, Antoinette se plaqua contre le mur face à la porte. Elle se sentait glacée. Son cœur battant à tout rompre semblait vouloir jaillir de sa poitrine, trop serrée par les lacets du corsage. Puis Bertrandeau passa le premier par l’étroite ouverture et, en quelques secondes, dans un silence religieux, son époux se retrouva étendu à l’endroit même où elle avait pris collation.
    Devant ce visage barré de sang qui tournait vers elle sa blessure, Antoinette eut grand-peine à réprimer un haut-le-cœur. La découvrant ainsi défaite, Huc s’approcha d’elle et se voulut rassurant :
    –  Il n’est qu’inconscient. Tout ira bien.
    Antoinette perdit son regard dans celui du prévôt, puis hocha la tête. Alors il se détourna d’elle pour s’adresser à Clothilde qui avait déjà pris l’initiative de raviver les braises et de suspendre au-dessus un chaudron d’eau claire :
    –  Trouvez des linges. Il me faut de la lumière, beaucoup de lumière.
    Aussitôt, Guillaumet disparut comme si cette seule tâche lui incombait et, tandis que Bertrandeau repoussait d’une voix autoritaire les plus téméraires des curieux, Huc se rapprocha de nouveau

Weitere Kostenlose Bücher