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La chambre maudite

La chambre maudite

Titel: La chambre maudite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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enfermé dans sa chambre, livide, elle s’était rendue dans le cachot. Il était vide. Le passage était ouvert et la chaîne pendait mollement contre le mur. La chemise de Loraline était écartelée, déchiquetée par les dents d’un loup. Elle avait retrouvé à terre le flacon vide et l’enfant mort dont elle tut l’existence une fois encore. C’était il y avait tout juste un mois. Depuis elle attendait, espérait, mais n’osait croire que Loraline fût toujours en vie. Cythar avait disparu cette nuit-là et, malgré ses efforts, nulle part elle n’avait trouvé trace de lui ni de la jouvencelle.
    Isabeau se couvrit le visage de ses mains et se mit à sangloter. Albérie et l’abbé échangèrent un regard d’impuissance. De fait, comme Isabeau, il ignorait l’existence de Philippus qui venait seulement de se résoudre à partir. A cette heure même, il bouclait ses bagages dans une auberge de Thiers, résigné et vaincu. Albérie avait bien envisagé tous les possibles lorsqu’il avait exigé qu’on lui rende sa fille mais, si Antoinette-Marie avait survécu, elle était toujours chétive et malingre. La changer de nourrice lui aurait peut-être été fatal. Philippus avait fini par y renoncer.
    Huc était revenu le surlendemain de cette sinistre nuit. François l’avait écouté faire son rapport, puis avait signifié qu’il n’avait désormais nullement besoin du prêt qu’on lui consentait. Albérie avait été pourtant obligée de répondre aux questions de son époux, se bornant à révéler que Loraline avait soudainement eu envie de se venger de Chazeron, tant la solitude et le manque de sa mère lui avaient tourné l’esprit. François l’avait capturée et tuée. Huc avait rugi, mais Albérie l’avait apaisé. Il valait mieux pour tous deux que François n’apprenne jamais leur complicité. Il s’était rendu à cette évidence. Il se souvenait trop bien de la promesse de son maître. Son acte monstrueux lui prouvait qu’il ne reculerait devant rien pour préserver son autorité.
    Depuis, Huc s’était mis à boire. Il se sentait coupable. Trop lâche, trop esclave. Même l’enfant qu’il prenait pour celui d’Antoinette n’avait su le dérider. Davantage encore, il le renvoyait à son inutilité.
    La nuit de pleine lune qui avait précédé l’arrivée d’Isabeau au Moutier, Albérie avait couvert les bois alentour dans une course démoniaque. Elle n’avait entrevu quant à elle qu’une seule explication à la disparition de Loraline, c’était qu’elle se soit transmutée en louve. Mais elle n’avait rien pu découvrir pour étayer son hypothèse.
    Chazeron n’était pas retourné au cachot, et les gardes avaient été relevés de leur faction avec ordre de ne rien révéler de cette aventure, pas même à Huc, sous peine de mort.
    Albérie avait fini par se rendre à la raison. La logique voulait que Loraline fût morte discrètement dans un cul-de-basse-fosse.
    Philippus avait voulu inspecter à son tour le cachot, mais Albérie l’en avait dissuadé. Chazeron retournait chaque recoin des souterrains pour trouver d’autres cachettes à l’alkaheist ou à l’or lui-même. C’était terminé. Il devait abandonner toute idée de revoir un jour celle qu’il aimait, tout comme il devait pour l’heure abandonner sa fille, jusqu’à ce qu’elle soit assez grande pour voyager et comprendre. Il savait que c’était l’unique moyen de la protéger de François de Chazeron, puisque l’enlever la perdrait à coup sûr, en jetant à ses trousses la colère de cet homme. Déchiré, il épuisait ses nuits à parcourir les tavernes, à dépenser les quelques sous qui lui restaient, à s’endetter au jeu, en se disant qu’il lui suffirait de revendre sa maison, son officine, ses rêves pour rembourser ses dettes puisque plus rien désormais n’avait de sens.
     
    Isabeau repartit le lendemain après une nuit d’insomnie à regarder ronfler Bertille sur une paillasse à ses côtés.
    –  Je ne te reproche rien, avait-elle affirmé avant de quitter sa sœur. Tu as fait ce que tu pouvais. C’est à moi que j’en veux. J’aurais pu empêcher cela si j’étais revenue plus tôt. J’aurais dû. Une fois encore, le seigneur de Vollore m’a volé mes nuits et ma vie. Tiens-toi à l’écart de lui ou il te détruira à ton tour. Et si un jour cela te devient trop pénible, rejoins-moi.
    Elles s’étaient étreintes plus fort encore qu’à l’heure des

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