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La chapelle du Diable

La chapelle du Diable

Titel: La chapelle du Diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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satisfaction, il
     essuya de sa manche la mousse blanchâtre qui auréolait sa bouche.
    — Hum… C’est étonnant mais cette bière est buvable, déclara Monsieur Morin
     après avoir goûté du bout des lèvres le blond breuvage.
    — Y a rien de meilleur, ajouta Ti-Georges en faisant signe au tavernier de lui
     en servir une deuxième.
    — C’est vrai que ça rafraîchit, admit Henry.
    — Y en a beaucoup dans le vieux port de Montréal, des pubs comme ici, commenta
     Albert qui fréquentait ce genre d’endroit. Les Irlandais auront pas rien
     qu’apporté la vermine !
    François-Xavier, qui n’avait pas encore dit un mot, détourna la conversation de
     ce sujet qu’il n’appréciait guère. Il chassa la vision d’un homme roux lui
     ressemblant étrangement. Il s’adressa à son ami de Montréal.
    — Pis Henry, quand est-ce que tu te présentes comme premier ministre ?
    — Il faudrait que je commence par être député, répondit l’avocat. Sérieusement,
     je préfère rester dans l’ombre. C’est plus pratique pour faire bouger les
     choses.
    Ti-Georges commenta.
    — Moé, la maudite politique, j’veux rien savoir ! Bleu ou rouge, c’est une gang
     de menteurs pis de pourris.
    — Si tout le monde pensait comme toi, Ti-Georges, on serait aussi ben
     d’abandonner le pays pis de le redonner aux Indiens, rétorqua Henry.
    — J’comprends Ti-Georges, dit François-Xavier. Ça devient
     décourageant... Après ce qu’on a vécu. On a essayé de se défendre pis nos
     gouvernements nous ont trahis.
    — Je le sais bien, François-Xavier… J’espère qu’un jour, tu auras à nouveau une
     fromagerie.
    — Ce serait peut-être un investissement auquel je pourrais songer, dit tout à
     coup Albert.
    — Quoi ? s’étonna François-Xavier. Une fromagerie ?
    — Pas n’importe laquelle, expliqua l’homme en buvant tranquillement sa bière.
     Lorsque Léonie et moi, on va être mariés, je pourrais vraiment mettre, mettons…
     hum, la moitié de la somme dans la fromagerie de mon… gendre.
    — Votre gendre ? s’exclama François-Xavier qui n’était pas certain de bien
     comprendre.
    — C’est vrai que matante Léonie est comme la mère de Julianna…
    — Juste comme… susurra Albert d’un ton bizarre.
    — Vous avez ben dit la moitié ? vérifia François-Xavier.
    — Oui mon cher. Quand je serai marié comme de raison. Pour que ce soit un
     investissement dans la famille. Si ça fait votre affaire, c’est conclu pour
     moi.
    François-Xavier hésita.
    — Ben, c’est ben certain que ça ferait mon affaire ! Mais c’est une grosse
     somme, monsieur Morin…
    — Appelle-moi Albert.
    — Albert… La moitié. C’est ben tentant…
    L’investisseur se recula sur sa chaise et à travers ses yeux mi-clos étudia le
     visage de François-Xavier. Il sentait la réticence de celui-ci. Albert se dit
     qu’il devait faire plus attention à cacher son jeu. Il ne voulait pas perdre le
     contrôle de la situation. Depuis qu’il avait laissé tomber son masque envers
     Léonie, il lui était très difficile de le remettre. Il était impératif qu’il
     épouse Léonie. Depuis quelques années, il accumulait une petite
     fortune personnelle qu’il dépensait au fur et à mesure… Le problème, c’était que
     l’argent provenait, de façon détournée, du magasin… Il avait été très prudent
     jusqu’ici en falsifiant les comptes. Avec la crise, il avait dû se résigner à
     prendre des risques. Il y avait des gens autour de lui qui commençaient à le
     soupçonner. Il se sentait épié, surveillé… Oh ! pas par cette idiote de Léonie
     qui était loin de se douter de quoi que ce soit. Non, par des gens bien plus
     menaçants. L’enjeu était si gros. Il était devenu nerveux. Lorsqu’il serait
     marié et que tout lui appartiendrait, il n’y aurait plus de problème. Sauf qu’il
     avait beau exercer de la pression sur sa patronne, celle-ci reportait sans cesse
     la date du mariage. Il était sur la corde raide et devait faire preuve de
     finesse. Heureusement qu’il avait pu lui forcer la main avec cette histoire
     d’enfant illégitime. Il se rappelait l’attitude décomposée de John Morgan quand
     il avait pris connaissance de la lettre envoyée par sa jeune maîtresse. Elle lui
     faisait part de la naissance de Julianna et demandait, contre son silence,
     beaucoup d’argent. Cher monsieur Morgan… Il avait été pitoyable. Son

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