La Chute Des Géants: Le Siècle
d’exercice –
ce qui voulait dire qu’il ne fallait en aucun cas s’en servir pour tirer. Par
la suite, on leur avait donné à chacun un fusil Lee-Enfield à chargeur amovible
contenant dix cartouches de 303. Billy s’était révélé bon tireur, capable de
vider son chargeur en moins d’une minute et d’atteindre à tous les coups la
cible représentant un homme grandeur nature placée à trois cents mètres. Les
Lee-Enfield étaient réputés pour leur rapidité de tir, avait-on expliqué aux
recrues : le record du monde était de trente-huit cartouches à la minute.
« L’équipement, ça va,
répondit Billy à Mildred. Ce sont les officiers qui m’inquiètent. Jusqu’ici je
n’en ai pas rencontré un seul à qui je ferais confiance au fond de la mine en
cas de problème.
— Les bons sont déjà tous en
France, j’imagine, dit Mildred avec optimisme. Ils laissent les branleurs au
pays, pour former les jeunes. »
Billy éclata de rire. Quel
vocabulaire ! Elle n’avait pas froid aux yeux ! « J’espère que
tu as raison. »
Ce dont il avait vraiment peur, c’était
de faire volte-face et de prendre ses jambes à son cou dès que les Allemands
commenceraient à lui tirer dessus. Voilà ce qui l’effrayait le plus. Il
préférait encore être blessé que s’infliger une telle humiliation, se disait-il.
Parfois il était tellement angoissé qu’il n’avait plus qu’un déSir : que
ce moment effroyable arrive au plus vite. Pour savoir comment il réagirait.
« Quoi qu’il en soit, je
suis bien contente que tu ailles canarder ces tordus d’Allemands. Tous des
violeurs !
— À ta place, je ne croirais
pas tout ce que je lis dans le Daily Mail, intervint Tommy. Pour eux,
les syndicalistes sont des planqués. Ce n’est pas vrai, je le sais bien, moi.
Dans ma section syndicale, la plupart des gars se sont portés volontaires.
Alors, les Allemands peuvent très bien ne pas être aussi horribles que ne le
dit le Mail.
— Ouais, tu as sans doute
raison, acquiesça Mildred, puis se tournant vers Billy, elle demanda : Tu
as vu Le Vagabond ?
— Oui, j’adore Charlie
Chaplin. »
Ethel prit son fils dans ses
bras. « Dis bonsoir à oncle Billy. » Le bébé se mit à gigoter, il n’avait
pas envie d’aller se coucher.
Billy se rappela le jour de sa
naissance, le moment où il avait ouvert la bouche et crié. Qu’il était grand et
fort maintenant ! « Bonsoir, Lloyd », lui dit-il.
C’était en l’honneur de Lloyd George
qu’Ethel lui avait donné ce prénom, mais son acte de naissance en portait un
second, que Billy était seul à connaître : Fitzherbert. Ethel ne l’avait
dit à personne d’autre qu’à lui.
Le Comte Fitzherbert !
Celui-là, il aurait bien aimé le tenir dans le viseur de son Lee-Enfield !
« Il ressemble à Gramper, tu
ne trouves pas ? lui demanda Ethel.
— Je te le dirai quand il
aura de la moustache », répliqua Billy, qui ne voyait aucune ressemblance
entre eux.
Après que Mildred eut aussi
couché ses deux filles, les femmes annoncèrent qu’elles voulaient souper. Ethel
et Tommy partirent acheter des huîtres, laissant Billy et Mildred en tête à
tête.
« Tu sais, Mildred, je t’aime
vraiment beaucoup, déclara Billy, dès qu’ils eurent disparu.
— Moi aussi. »
Il rapprocha alors sa chaise de
la sienne et l’embrassa. Elle lui rendit son baiser avec fougue.
Ce n’était pas la première fois
qu’il embrassait une fille. Il en avait embrassé plusieurs, quand il était
encore au pays de Galles, au dernier rang du cinéma Majestic, dans Cwm Street.
Elles ouvraient tout de suite la bouche. Alors, il fit la même chose.
Mildred le repoussa gentiment. « Pas
si vite, dit-elle. Comme ça. » De ses lèvres closes, elle lui effleura la
joue, les paupières, le cou, avant de revenir à ses lèvres. C’était étrange
mais agréable. « À toi », réclama-t-elle. Il suivit ses instructions.
« Maintenant, fais ça ! » Il sentit le bout de sa langue lui
caresser les lèvres, les frôlant à peine. Cette fois encore, il l’imita. Puis
elle lui montra une autre façon d’embrasser, lui mordillant le cou et le lobe
des oreilles. Il se dit qu’il pourrait passer sa vie à l’étreindre ainsi.
« Tu apprends vite ! »
lui confia-t-elle quand ils firent une pause pour reprendre haleine. Elle lui
passa la main sur la joue.
« Tu es belle. »
Il l’embrassa encore et lui
caressa le sein. Elle le
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