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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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cortège, juste une calèche
tirée par des chevaux noirs. Ça les toucherait beaucoup. Et tout le monde vous
trouverait merveilleux. » Elle se mordit la lèvre avant de se réfugier
dans le silence.
    Cette dernière phrase était un
grave manquement à l'étiquette, releva Fitz avec inquiétude : le roi
n'avait pas à se soucier qu'on le trouve merveilleux.
    Sir Alan était atterré. « Cela
ne s'est jamais fait », observa-t-il, manifestement alarmé.
    Mais le roi paraissait intrigué.
« Aller voir les familles des victimes…, répéta-t-il songeur. Parbleu,
l'idée me paraît excellente, Alan. Manifester ma compassion envers mon peuple
qui souffre. Pas de défilé, une seule calèche. » Il se tourna vers la
domestique. « Très bien, Williams. Je vous remercie d'avoir pris la
parole. »
    Fitz poussa un soupir de
soulagement.
    7.
    Finalement, il y eut plus d'une
calèche, bien sûr. Le roi et la reine occupaient la première voiture, en
compagnie de Sir Alan et d'une dame d'honneur, Fitz et Bea suivaient dans
la deuxième, avec l'évêque, et un attelage de plusieurs domestiques fermait la
marche. Perceval Jones avait manifesté le déSir de participer à cette
sortie, mais Fitz avait refusé catégoriquement. Comme l'avait fait remarquer
Ethel, les familles des victimes auraient risqué de lui sauter à la gorge.
    C'était une journée venteuse et
une pluie froide cinglait les chevaux qui descendaient au trot la longue allée
de Ty Gwyn. Ethel était assise dans le troisième véhicule. Étant la seule au
château à connaître les noms de tous les morts et de tous les blessés, elle
avait donné des instructions aux cochers et avait été chargée de rappeler
l'identité de chacun à l'officier de la maison du roi. Elle croisait les
doigts. C'était son idée et, si les choses se passaient mal, c'était elle qui
en subirait les conséquences.
    Au moment de franchir le grand
portail de fer, elle fut frappée, comme toujours, par le caractère abrupt de la
transition. À l'intérieur du domaine, tout était ordre, charme et beauté ;
dehors, s'affichait la laideur de la réalité du monde. Une rangée de chaumières
d'ouvriers agricoles bordait la route, de minuscules constructions de deux
pièces, aux cours jonchées de monceaux de bois et de détritus de toutes sortes,
où une poignée d'enfants sales jouaient dans la rigole. On arrivait ensuite aux
maisons alignées des mineurs, mieux construites que les chaumières mais tout de
même disgracieuses et monotones à un regard comme celui d'Ethel, habitué aux
proportions parfaites des fenêtres, des portes et des toitures de Ty Gwyn. Les
gens qui y vivaient étaient vêtus d'habits bon marché, qui s'usaient et
s'avachissaient rapidement, et dont les couleurs, des teintures de mauvaise
qualité, passaient, si bien que tous les hommes étaient en costumes gris et les
femmes en robes brunâtres. Beaucoup enviaient à Ethel sa tenue de bonne avec sa
jupe en lainage chaud et son corsage de coton impeccable, ce qui n'empêchait
pas certaines filles de prétendre que jamais elles ne s'abaisseraient à être
domestiques. Ici, tout le monde avait le teint blafard, les cheveux ternes, les
ongles noirs. Les hommes toussaient, les femmes reniflaient et tous les enfants
avaient la morve au nez. Les pauvres traînaient les pieds et boitillaient le
long des rues, tandis que les riches marchaient d'un pas assuré.
    Les voitures descendirent le
versant de la montagne jusqu'à Mafeking Terrace. La plupart des habitants
faisaient la haie sur les trottoirs et attendaient, sans agiter de drapeaux,
sans pousser d'acclamations. Ils se contentèrent de s'incliner et d'esquisser
une révérence lorsque le cortège s'arrêta devant le numéro 19.
    Ethel descendit d'un bond et
parla tout bas à Sir Alan. « Sian Evans, cinq enfants, elle a perdu
son mari, David Evans, un palefrenier du fond. » Ethel connaissait bien
celui qu'on surnommait Dai Cheval, un aîné du temple Bethesda.
    Sir Alan hocha la tête et
Ethel recula promptement tandis qu'il murmurait à l'oreille du roi. Elle
surprit le regard de Fitz, qui lui adressa un signe de tête approbateur. Elle
se sentit rougir. Elle aidait le roi – et le Comte était content
d'elle.
    Le roi et la reine se dirigèrent
vers l'entrée. La peinture s'écaillait, mais le seuil était briqué. Je n'aurais
jamais imaginé voir ça un jour, songea Ethel ; le roi frappant à la porte de la
maison d'un mineur. George V était

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