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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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son
père, que les Allemands étaient supérieurs au reste du genre humain, néanmoins
il admettait que s’ils prenaient la maîtrise de l’Europe, ce ne serait pas une
mauvaise chose. Les Français ne manquaient pas de talents – cuisine,
peinture, mode, vins –, mais le gouvernement n’était vraiment pas leur
fort. Les fonctionnaires français se prenaient pour une sorte d’aristocratie et
jugeaient normal de laisser les citoyens ordinaires attendre des heures. Une
petite dose d’efficacité allemande leur ferait le plus grand bien. Il en allait
de même des Italiens brouillons. L’Europe de l’Est, surtout, aurait beaucoup à
y gagner. Le vieil empire russe en était encore au Moyen Age, avec ses paysans
qui mouraient de faim dans des masures et ses femmes fouettées pour adultère. L’Allemagne
apporterait l’ordre, la justice et des méthodes d’agriculture modernes. Elle
venait d’ouvrir sa première ligne aérienne régulière. Des avions reliaient
Vienne à Kiev aussi aisément que des trains. Quand les Allemands auraient gagné
la guerre, on pourrait prendre l’avion pour parcourir toute l’Europe. Et Maud
et Walter élèveraient leurs enfants dans un monde d’ordre et de paix.
    Pourtant, cette embellie
militaire ne durerait pas longtemps. Les Américains avaient commencé à arriver
en grand nombre. Il leur avait fallu près d’un an pour constituer leur armée,
mais il y avait à présent trois cent mille soldats américains en France et il
en débarquait d’autres tous les jours. L’Allemagne devait l’emporter
immédiatement, conquérir la France et rejeter les Alliés à la mer avant que les
renforts américains ne fassent pencher la balance.
    L’assaut imminent avait été
baptisé Kaiserschlacht , la « bataille de l’empereur ». Quoi qu’il
advienne, ce serait sans doute la dernière offensive de l’Allemagne.
    Walter avait été renvoyé sur le
front. L’Allemagne avait besoin de tous ses hommes pour combattre, d’autant que
de nombreux officiers avaient été tués. On lui avait confié le commandement d’un Sturmbataillon, un « bataillon d’assaut ». Il avait suivi un
entraînement et s’était initié aux tactiques les plus récentes avec ses hommes.
Certains étaient des combattants aguerris, d’autres de jeunes garçons et des
hommes âgés recrutés en désespoir de cause. Walter avait appris à les aimer,
mais il devait veiller à ne pas trop s’attacher à des hommes qu’il devrait
peut-être envoyer à la mort.
    Il avait retrouvé lors de sa
formation Gottfried von Kessel, son ancien rival de l’ambassade d’Allemagne à
Londres. Malgré sa mauvaise vue, Gottfried était capitaine dans le bataillon de
Walter. La guerre n’avait pas entamé sa suffisance de monsieur je-sais-tout.
    Walter observa la campagne
alentour à la jumelle. Il faisait un temps magnifique, clair et frais et la
visibilité était bonne. Au sud, l’Oise traversait paresseusement une étendue de
marais. Vers le nord, les terres fertiles étaient ponctuées de hameaux, de
fermes, de ponts, de vergers et de bosquets. À moins de deux kilomètres à l’ouest,
on apercevait les tranchées allemandes et le champ de bataille, au-delà. Là, le
paysage agricole avait été dévasté par la guerre : les champs de blé
dénudés creusés de cratères présentaient un aspect lunaire. Il ne restait des
villages que des amas de pierres. Les vergers avaient été soufflés et les ponts
détruits. En réglant soigneusement ses jumelles, il distinguait les cadavres
pourrissants d’hommes et de chevaux et les carcasses de chars calcinés.
    À l’autre extrémité de ce tableau
de désolation, il y avait les Anglais.
    Un vrombissement puissant attira
son regard vers l’est. Le véhicule qui approchait ne ressemblait à aucun de
ceux qu’il connaissait. Mais il en avait entendu parler. C’était un canon
autopropulsé, un fût gigantesque doté d’un mécanisme de mise à feu monté sur un
châssis équipé d’un moteur de cent chevaux. Il était suivi de près par un poids
lourd probablement chargé de munitions énormes, proportionnées à cet engin. Un
deuxième et un troisième automoteur fermaient la marche. Les artilleurs qui
occupaient les véhicules agitèrent leurs casquettes en passant, comme à la
parade.
    Walter en fut tout revigoré. Ces
pièces d’artillerie étaient faciles à déplacer une fois l’offensive lancée.
Elles apporteraient un soutien beaucoup plus

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