Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La colère du lac

La colère du lac

Titel: La colère du lac Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
Vom Netzwerk:
violente réaction du marin, essaya de lui faire entendre
     raison.
    — Allons, mon brave ! Qu’est-ce que ça veut dire ? Ils vont vous
     soigner à l’hôpital !
    — NON, PAS HÔPITAL !
    Paniqué, Patrick avait martelé chaque mot et agrippé vigoureusement le poignet
     de l’ecclésiastique.
    — Allons, ne vous échauffez pas les sangs comme ça, d’accord, d’accord, pas
     l’hôpital, concéda le prêtre désarçonné par cet accès de panique.
    — Merci, dit le malade, soulagé, en relâchant sa prise. Moé sais moé déranger
     vous, mais moé tout donner, moé travailler pour vous, quand moé debout !
    — Ah non, mon brave, il n’est pas question que je vous garde ici ! Ma servante
     ne rajeunit pas, monter tous ces escaliers pour vous soigner, non… non…
     Laissez-moi réfléchir… je vais vous trouver une bonne famille qui vous hébergera
     le temps qu’il faudra. Reposez-vous en attendant.
    Patrick ne se le fit pas dire deux fois. Sa tête était si lourde… Comme il
     était bon de pouvoir refermer les yeux et de s’abandonner à la torpeur qui
     l’envahissait. Il pouvait compter sur cet homme de Dieu, il ne se réveillerait
     pas à l’hôpital, il pouvait dormir en paix.

    Quand le marin reprit conscience, ce fut de nouveau dans un lit inconnu, mais
     cette fois il était seul dans la pièce. On l’avait donc transporté sans qu’il ne
     s’en rende compte. Il devait être encore plus souffrant qu’il ne le croyait.
     Lentement, il regarda autour de lui. La nuit obscurcissait la chambre, mais la
     lueur d’une chandelle, posée sur une commode de pin, éclairait suffisamment pour
     lui permettre de discerner des murs lambrissés, une catalogne aux motifs
     d’étoiles auxcouleurs éclatantes placée sur le dossier d’une
     petite chaise droite, un coffre de bois recouvert d’un joli napperon brodé, un
     gros crucifix au-dessus d’une porte entrouverte sur un corridor d’où lui
     parvenaient des voix. Il reconnut celle du curé, mais par contre, l’autre lui
     était complètement étrangère. Patrick O’Connor tendit l’oreille. Une chance
     qu’il avait appris le français très rapidement malgré son exécrable façon de le
     parler. Le curé s’exprimait avec autorité. Son interlocuteur lui répondait d’un
     ton geignard, d’une vieille voix, usée, aux cordes vocales malmenées par une
     toux persistante.
    « Certainement un vieillard » se dit le marin, qui s’amusa à habiller la voix
     d’un corps décharné et voûté, de la recouvrir d’une peau ridée et de la garnir
     de cheveux blancs avant de l’appuyer sur une canne de bois.
    Il verrait bien, plus tard, s’il avait raison, mais pour le moment ce petit jeu
     l’aidait à suivre la conversation.
    — Mais, m’sieur le curé, j’sais ben qu’en tant que chrétien, j’ai pas pu vous
     refuser de prendre cet homme chez nous, mais c’est un étranger ! se plaignait le
     vieil homme. On sait rien pantoute de lui, pis si c’est un voleur ou ben un
     tueur, ma maison est ben loin du village, pas personne pourrait nous entendre
     crier pis…
    — Allons, mon brave monsieur Mailloux, l’interrompit le curé d’un ton sévère,
     cessez de discuter avec moi. Ce pauvre hère est si faible, il ne pourrait pas
     faire de mal à une mouche.
    — C’t’encore drôle… bougonna le vieil homme avant d’ajouter : Vous savez que
     chus pas ben ben fort de santé, moé, m’sieur le curé, j’pourrais pas défendre la
     vertu de ma fille si…
    D’un geste de la main, le curé fit taire son interlocuteur.
    — Allons, Joséphine c’est plus une jeunesse. Elle a quoi maintenant… vingt-deux
     ans ? C’est une brave fille, elle va savoir se faire respecter, j’en suis
     certain, puis je passerai tous les jours vous rendre visite, promit-il.
    — Chus pas ben ben riche non plus… continua à maugréer
     l’homme.
    — Vous allez me faire fâcher, monsieur Mailloux, menaça le curé. Tout le monde
     sait que depuis que vous avez vendu votre magasin, reprit-il d’un ton doucereux,
     votre bas de laine est bien rempli. D’ailleurs, j’ai trouvé votre contribution à
     l’Église pas mal faible, dimanche dernier…
    Un court silence plana, pendant lequel les deux hommes se toisèrent.
    — Bon, bon, c’est d’accord, j’dis pus rien, on va vous le soigner, votre perdu,
     abdiqua monsieur Mailloux, mais c’est ben par charité chrétienne !
    Un grand sourire de

Weitere Kostenlose Bücher