La Collection Kledermann
eût pris la clef au cou de Moritz était plus que probable, les codes c’était différent ! Les lui avait-on arrachés d’une façon ou d’une autre ?… Si l’on acceptait cette hypothèse, pourquoi la substitution, à laquelle il croyait de plus en plus à mesure que passait le temps ?
La venue de la police apporta une diversion.
Ce fut assez bref. À l’officier qui se présenta en excusant son patron occupé ailleurs, maître Hirchberg fit le récit de ce qui venait de se passer. On rouvrit la chambre forte, puis cette fois on ouvrit tous les coffres. Pour arriver chaque fois à la même constatation navrante : la collection avait disparu, ne laissant que des écrins vides. Les policiers chargés des empreintes en emportèrent quelques-uns, photographièrent pratiquement tout dans la chambre forte, sans oublier les listes des joyaux fixées à l’intérieur de chaque coffre, ce qui permit à Aldo désolé de constater que la collection était encore plus fabuleuse qu’il ne le croyait – « sa » collection depuis peu, du moins officiellement –, ce qui le faisait trembler à la fois d’excitation et de colère. Et tandis que le travail se poursuivait, il recopia les listes avec l’aide obligeante de maître Hirchberg.
Quand ce fut fini, il déposa une plainte contre X en tant que propriétaire, après quoi les policiers se retirèrent. Aldo referma tout et mit clef et codes dans la poche intérieure de sa veste.
— Qu’allez-vous faire maintenant ? demanda le notaire.
— Dans l’immédiat rentrer à l’hôtel. Je ne crois pas que ma femme souhaite ma présence plus longtemps. Pour aujourd’hui tout au moins ! Puis-je vous poser une question avant de vous quitter ?
— Mais je vous en prie !
— La banque ? Qui va la diriger ? J’ai noté que mon beau-père avait fait don à son neveu de sa succursale française mais qu’en est-il du siège social et du reste ?
— Le Conseil d’administration demeure sous la direction du fondé de pouvoir qui va devenir directeur général. La princesse Morosini n’aura qu’une présidence honoraire. Chez nous, ajouta-t-il avec l’ombre d’un sourire, on ne saurait confier à une femme des affaires d’hommes.
— Grindel y siégera-t-il ?
— Il pourra… S’il se maintient dans le groupe en étant propriétaire il lui est loisible de se détacher mais je ne vois pas où serait son intérêt.
— Pourquoi Moritz ne lui a-t-il pas confié la direction générale ? Il est son neveu.
— Il était, corrigea maître Hirchberg qui tenait aux détails… Au point où nous en sommes, je crois pouvoir vous faire une confidence : il ne l’aimait pas, même s’il lui reconnaissait une certaine valeur professionnelle ! Voulez-vous que je vous ramène à l’hôtel ? J’ai ma voiture en bas ! proposa-t-il en remettant en place la montre qu’il venait de consulter.
— Volontiers ! Le temps de saluer cette grande dame qui est devenue ma grand-mère et que j’aime infiniment. Je suppose qu’elle ne va pas s’éterniser à Zurich et j’espère de tout mon cœur que Lisa l’accompagnera.
— Vous pourriez l’y obliger ! En dépit de cette délirante demande en divorce, elle est toujours votre femme légitime et comme telle vous doit obéissance !
— Je sais, mais c’est un droit qu’il me déplairait d’exercer. Elle ne me le pardonnerait pas !
— Hum !… Ne m’en veuillez pas de ma franchise mais je me demande si vous n’avez pas un peu trop tendance à inverser les rôles !
En sortant du cabinet de travail, ils trouvèrent M me von Adlerstein sur le seuil de la porte, visiblement très soucieuse :
— Savez-vous que Frau Wegener est encore ici et que Lisa s’oppose formellement à son renvoi ? fit-elle d’une voix que la colère faisait trembler.
Aldo échangea un regard avec le notaire dont les sourcils se relevèrent de façon significative.
— Attendez-moi un instant, maître… ou plutôt venez avec moi. Où est-elle ?
— Dans la bibliothèque avec cette femme. J’ajoute que Grindel y est aussi !
— Allons nous joindre à la réunion !
Il bouillait intérieurement mais s’efforça au calme… Jamais encore il n’avait fait preuve d’autorité depuis qu’ils étaient mariés et il détestait y recourir mais il n’y avait vraiment pas d’autre moyen !
La première chose qu’il vit en pénétrant dans la pièce fut la Wegener qui s’apprêtait à lui injecter on ne sait quoi. Elle avait relevé un côté de
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