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La Cour des miracles

Titel: La Cour des miracles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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Fontainebleau ?
    Espérait-elle que la scène de cette pauvresse arrivant au château et réclamant pour sa fille celle qu’on appelait la « petite duchesse » rendrait Gillette à jamais ridicule ? Peut-être !
    Ou peut-être aussi, avec cette confiance instinctive que toutes les femmes ont dans la force réellement énorme du sentiment maternel, peut-être espérait-elle que Margentine trouverait le moyen d’arracher Gillette à François I er
,
ou tout au moins de la protéger contre son amour.
    Car pour la duchesse d’Etampes, il n’y avait pas de doute possible : le roi aimait Gillette.
    Tant que la jeune fille résisterait, cela irait encore à peu près…
    Mais du jour où elle serait officiellement la maîtresse du roi, que deviendrait-elle, elle, la puissante favorite qui courbait sous sa domination jusqu’à Diane de Poitiers ?
    Elle faillit s’arrêter à un parti violent : celui d’empoisonner Gillette.
    Mais elle n’avait personne sous la main pour exécuter ce projet ; son complice Alais Le Mahu était mort ; elle l’avait elle-même assassiné.
    Quant à ses gentilshommes ordinaires, elle n’avait en leur discrétion qu’une confiance relative.
    Ce fut alors qu’elle songea à Margentine et qu’elle se demanda si la folle bien stylée ne pourrait pas jouer un rôle dans la comédie ou le drame qu’elle préparait.
    La pensée lui était venue de dire à Margentine que Gillette était justement la fille qu’elle cherchait.
    La duchesse d’Etampes n’en savait rien et croyait mentir. Il se trouva que son mensonge était une vérité : la vie a de ces quiproquos.
    C’est son carrosse qui avait failli renverser Margentine.
    Celle-ci, on l’a vu, s’était mise en route à pied. L’idée ne lui était pas venue qu’avec l’argent que lui avait laissé « la belle dame » elle pouvait fréter une voiture. Pour elle, pour cet esprit où la vie ne se reflétait qu’en images troubles, il n’y avait qu’un moyen d’aller d’un point à un autre : c’était de marcher tant qu’elle aurait la force de marcher.
    Nous avons dit que sa première étape dura cinq heures.
    Margentine, tourmentée du besoin d’avancer, traversa le village où elle venait d’arriver et essaya de continuer.
    Mais elle dut s’arrêter devant la nuit comme devant un mur.
    Alors elle rétrograda, rentra dans le village, pénétra dans une auberge, et montra une pièce d’or.
    L’aubergiste s’empressa, dressa la table, servit un dîner comme pour une demi-douzaine de gentilshommes. La pièce d’or y passa, mais Margentine mangea un morceau de pain et but un verre d’eau, ne paraissant même pas avoir vu les pâtés et le poulet qu’une servante avait disposés devant elle.
    – Où allez-vous comme ça ? lui avait demandé l’aubergiste.
    – Où je vais ? Cette question ! Je vais retrouver ma fille, pardi.
    Les gens de l’auberge se regardèrent en hochant la tête. La voyageuse, avec ses yeux hagards, ses gestes étranges, ne tarda pas à leur apparaître ce qu’elle était : une folle.
    Margentine dut à cette circonstance de ne pas être entièrement détroussée par le rapace aubergiste : on craignait les fous comme des êtres spéciaux qui étaient plus ou moins en relations avec les esprits, les anges ou les démons, toutes sortes de puissances extra-terrestres dont il était mauvais de s’attirer la colère.
    Au soleil levant, Margentine reprit sa route.
    A un moment, une mendiante lui demanda l’aumône.
    Margentine lui donna une des pièces d’or qu’elle portait. La mendiante, d’abord stupéfaite, la poursuivit de bénédictions exorbitantes.
    La folle s’en alla en fredonnant sa cantilène favorite, – une vieille berceuse du vieux temps, naïve, enfantine :
    Dans le champ du voisin,
    J’ai cueilli des lys blancs.
    Par moments, elle s’arrêtait et frappait dans ses mains, en disant :
    – Qu’est-ce qu’elle va dire, mon Dieu ! qu’est-ce qu’elle va dire quand je vais la prendre dans mes bras pour la bercer comme je faisais pour l’endormir… Va-t-elle être heureuse !… Et moi donc !… Seigneur, qu’il fait bon ! Et qu’il fait beau ! Je n’ai jamais vu une aussi belle journée !…
    Une rafale de neige l’enveloppait à cet instant.
    Toutes les fois qu’elle rencontrait un paysan ou qu’elle passait devant une maison, elle demandait :
    – Fontainebleau, est-ce loin, dites ?
    On la renseignait.
    La première fois qu’elle

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