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La couronne de feu

La couronne de feu

Titel: La couronne de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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nous avons décidé de vous proposer de choisir un conseil dans l’assistance.
    – Je vous remercie, répondit Jeanne. Le conseil de Notre-Seigneur suffira à m’éclairer.
    On lui présenta de nouveau le Livre ; elle maintint ses réticences.
    Deux jours furent employés à l’examen, article par article, des conclusions du procès préparatoire : il y en avait une soixantaine, chacun faisant l’objet de commentaires de Jeanne, de ses juges ou des assesseurs.
    Au terme de la deuxième journée, d’Estivet présenta son réquisitoire. Il demanda que cette femme fût déclarée sorcière, sortilège, devineresse, pseudo-prophétesse, invocatrice des esprits malins, conjuratrice, superstitieuse, impliquée et adonnée aux arts magiques, mal pensante dans la foi catholique, schismatique, sceptique, dévoyée, sacrilège, idolâtre, apostate de la foi, maudite et malfaisante, blasphématrice envers Dieu et ses saints, scandaleuse, séditieuse, perturbatrice de la paix, assoiffée de sang humain et incitant à le répandre, ayant abandonné sans vergogne la décence convenable à son sexe et pris un habit difforme, prévaricatrice des lois divines et naturelles, de la discipline ecclésiastique, séductrice des princes et du populaire, ayant permis qu’on l’adorât, hérétique ou du moins véhémentement suspecte d’hérésie, et caetera... et caetera...
    Dans ce fatras d’incohérence, des affirmations mais aucun argument sérieux. Pourtant, eût-on pu la justifier, la moindre de ces accusations eût suffi à faire condamner l’accusée à la prison à vie ou au bûcher. Jean Lemaître, le visage crispé, semblait près de sortir de ses gonds. L’évêque paraissait serein : il avait dû cautionner au préalable cette diatribe.
    – Jeanne, dit-il, oui ou non, vous en rapportez-vous au jugement de l’Église ?
    – Je m’en rapporte, répondit-elle, à l’Église militante pourvu qu’elle ne m’ordonne pas des choses impossibles, comme de révoquer les révélations que j’ai eues de par Dieu !
    – Vous considérez-vous comme sujette de l’Église militante ?
    – Certes, mais Notre-Seigneur premier servi.
     
    Le 2 avril, assisté de quelques assesseurs, l’évêque condensa les interrogatoires en douze articles au lieu de soixante et les soumit à un aréopage de vénérables docteurs. Denis Gatinel, licencié en droit civil et en droit canon, fournit la conclusion en déclarant :
    – Nous affirmons que Jeanne est hérétique, séditieuse envers l’Église, injurieuse envers Dieu... Qu’elle abjure publiquement ses croyances impies, sinon nous l’abandonnerons au bras séculier. Si elle y consent, que le tribunal, dans sa grande clémence, la mette jusqu’à la fin de ses jours au pain de douleur et à l’eau d’angoisse.
    Il fallait que l’accusée fût punie, pour l’honneur de Dieu , mais, dit l’un des docteurs, avec des égards pour la fragilité féminine . Certains proposèrent d’en appeler au pape, ce qui suscita la colère de l’évêque.
     
    De nouveau, Jeanne tomba malade sans que, cette fois-ci, l’on pût attribuer cet incident au poison. La lassitude éprouvée les jours précédents, soumise qu’elle était à la pression du tribunal, avait fait place à une asthénie qui la tenait attachée à son grabat.
    Un matin, John Berwoit constata qu’elle n’avait pas touché aux aliments qu’on lui avait servis la veille. Il posa la main sur son front : il était brûlant.
    Pour visiter sa patiente, maître Guillaume Desjardins se fit accompagner de deux autres praticiens : Lachambre et Tiphaine. Ils examinèrent la patiente, se retirèrent pour délibérer et ils conclurent à une fatigue due au surmenage.
    – C’est insensé ! s’exclama Tiphaine. L’évêque a-t-il prévu de faire mourir cette fille avant le verdict ?
    – Les Anglais s’y opposent, expliqua Desjardins. Ils la veulent vivante.
    – Alors, protesta Lachambre, pourquoi la malmener à ce point ? Jeanne est robuste mais on la charge trop. À ce régime elle ne tiendra pas longtemps. Il faut informer le roi, exiger...
    – Je vous le déconseille, bougonna Desjardins. On a interdit à Henri de se mêler de cette affaire et même de rencontrer la Pucelle. Si nous nous en mêlons nous risquons d’être mis au secret. Tout ce que nous pouvons faire sans risque c’est soumettre notre diagnostic au gouverneur et à l’évêque. Je m’en chargerai.
     
    Pierre Cauchon rendit visite à la prisonnière

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