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La dame de Montsalvy

La dame de Montsalvy

Titel: La dame de Montsalvy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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faut vous dépêcher, dame Sara.
    — Je sais, je sais ! Mais comme la dame de Roquemaurel et ses fils ont décidé que ce serait, ce soir, grand apparat, ils m'accorderont bien un petit instant de retard...

    Elle se mit à tresser les cheveux de la jeune femme avec une vélocité incroyable, escamotant littéralement leur masse soyeuse pour en faire une large couronne sur laquelle elle épingla une coiffe aérienne. Pendant ce temps, Marie aidait Catherine à passer sa robe...
    — Au fait, marmotta Sara des épingles plein la bouche, où as-tu trouvé ce nouveau Gauthier ?
    — A Paris, je te raconterai. Oh, j'ai tant de choses à te raconter !...
    Il y en a bien pour huit jours...
    — Il a la couleur de cheveux du premier, ce pauvre garçon que je n'aimais guère et qui pourtant t'était si dévoué. Mais en dehors de cela, il ne lui ressemble pas beaucoup...
    Catherine sourit au miroir que lui tendait Marie mais plus à ses souvenirs qu'à ce qu'elle y voyait car il était trop petit pour y contempler autre chose que le nez et les yeux.
    Il lui ressemble beaucoup plus que tu ne l'imagines ! Sachez en tout cas ceci : Gauthier m'est tout dévoué et je sais que je peux lui demander tout ce que j'aurais pu demander au cher ami d'autrefois.
    Mais tu devrais t'entendre avec lui : quand je l'ai sorti de prison, à Paris, il faisait des études de médecine. Cela t'intéresse...
    Si elle avait espéré impressionner Sara elle en fut pour ses frais. La femme issue des tribus errantes ne croyait absolument pas à la médecine officielle. Elle le prouva en crachant à terre avec la mine de quelqu'un qui vient d'avaler une amère potion.
    — Les médecins... pouah ! J'en sais plus long qu'eux !
    — Eh bien, vous n'aurez qu'à comparer vos talents.
    Ayant dit, Catherine ramassa sur son bras la traîne de sa robe et prit le chemin de l'escalier pour se rendre au souper.
    La grande salle de Roquemaurel ne pouvait se comparer pour la magnificence à celle des châteaux royaux ou ducaux, ni même à celle de Montsalvy car on n'y voyait pas la moindre tapisserie d'Arras et pas le plus petit hanap d'or serti de pierreries. La famille pourtant avait été jadis fort riche et puissante en conséquence.
    Issue d'Ithier, comte d'Auvergne par la volonté de Charlemagne, ils avaient combattu aux Croisades et bien failli se tailler un fief au pays de Moab. S'ils n'y étaient pas parvenus ils avaient tout de même rapporté suffisamment d'or pour asseoir leur sourcilleux donjon au-dessus des eaux tumultueuses du Lot. Le dernier éclat de leur fortune avait été jeté par le grand- père Jean, sénéchal du comte de Rodez.
    Mais, depuis, la richesse avait fondu. La pauvreté des terres et les incessants ravages, tant ceux des Anglais que ceux des routiers de tout poil, en étaient la cause. Peut-être aussi la grande passion pour les beuveries et les horions qui avait habité le défunt comte Ausbert, époux de la présente châtelaine. Une passion que d'ailleurs dame Mathilde comprenait parfaitement et qu'eux deux avaient transmise, intacte, avec tous ses jaillissements incontrôlables, à leurs deux fils aînés, Renaud et Amaury.
    Mais, si Dame Mathilde ne disposait plus de moyens princiers, elle n'en demeurait pas moins une excellente maîtresse de maison, et si sa salle de festin n'étincelait pas d'or et de soieries du moins offrait- elle un accueil avenant avec ses nappes éclatantes de blancheur, ses étains tellement bien astiqués qu'ils ressemblaient à de l'argent, ses tapisseries aux vives couleurs brodées à la main par une demi-douzaine de châtelaines en attente de croisés et le fabuleux jaillissement des genêts d'or qui explosait un peu partout dans des auges ou des mortiers de pierre.
    Dame Mathilde elle-même, sanglée dans une belle robe de velours prune dans laquelle elle devait étouffer par cette chaleur, attendait son invitée, assise bien droite dans un haut siège de châtaignier sculpté au dossier duquel la double corne de sa coiffure lui interdisait de s'appuyer. Ses deux fils aînés l'encadraient, si hauts et si massifs que le jeune Bérenger disparaissait entièrement derrière eux.
    Il ne leur ressemblait d'ailleurs en aucune façon et quand on le voyait, brun comme une châtaigne et vif comme un écureuil auprès de ces deux géants aux cheveux couleur de paille, il arrivait à des esprits malins de se demander par quelle opération du Saint- Esprit leur mère avait pu se constituer une couvée

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