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La dame de Montsalvy

La dame de Montsalvy

Titel: La dame de Montsalvy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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était facile de deviner qu'il couvait une colère.
    Comme lesdites colères étaient toujours redoutables, Sara allait passer son chemin, peu désireuse d'en faire les frais, mais il l'appela.
    — Venez ici, Sara ! J'ai à vous parler...
    Il sauta de son cheval, lança sa bride à un garçon de ferme qui accourait puis, après s'être assuré que personne d'autre n'était en vue, il prit Sara par le bras et l'entraîna vers l'armurerie, déserte à cette heure.
    — Je viens de voir Arnaud de Montsalvy ! lâcha- t-il répondant au coup d'œil interrogateur de la zin- gara dont le visage d'ailleurs demeura de marbre.
    — Ah !... Et... vous lui avez parlé ?
    — Oui... J'étais allé jusqu'à Sénézergues pour voir comment La Roque s'arrangeait de cette damnée sécheresse et si les loups avaient fait leur apparition chez lui aussi quand, en sortant du chemin creux qui mène à l'église, je me suis trouvé nez à nez avec Montsalvy... Le chemin n'est pas large à cet endroit et l'on ne peut pas y passer à deux de front. Il fallait donc que l'un de nous deux cède le pas. Je n'en avais pas envie et lui non plus apparemment car un moment on s'est regardés sans rien dire mais avec autant d'amitié que deux molosses devant un quartier de charogne. J'ai cru un instant qu'il allait se jeter sur moi. Comme il n'était pas plus vêtu que moi, j'ai pu voir les muscles de ses épaules se ramasser tandis qu'une de ses mains cherchait déjà le pommeau de l'épée pendue à sa selle. Alors j'allais en faire autant quand il s'est ravisé. Il s'est redressé, a caressé l'encolure de son destrier pour le calmer et puis il m'a lancé avec un mauvais regard:
    « — Alors ? Il paraît que la Catherine a trouvé refuge chez toi ?
    « — Comment le sais-tu ?

    « Il a haussé les épaules.
    « — Les nouvelles vont vite dans nos campagnes. Il y a un mois que je le sais. Tu as même toute la famille, paraît-il, puisque cette sorcière de Sara s'est permis de t'amener les enfants qu'elle m'a enlevés.
    « — Ils ne doivent pas te faire manque puisque tu n'as pas jugé bon de venir les réclamer ?...
    « — Je viendrai, sois tranquille, mais plus tard, quand j'en aurai fini avec la garce que j'ai épousée.
    « Là, je me suis mis à rigoler.
    «— Quand t'en auras fini ? Mais faudrait d'abord que tu commences, mon gros ! Si t'entends par là venir la tirer de chez nous à notre nez à notre barbe, tu risques d'avoir des surprises. Ça vaut peut-être pas Montsalvy mais c'est encore solide Roquemaurel et ni moi, ni mes frères, ni mes hommes nous ne sommes des pourris !
    «— T'inquiète pas, Renaud! Tu n'auras même pas à tirer l'épée ni moi non plus. Tu la laisseras partir bien gentiment avec sa sorcière à la peau noire qu'on enverra au bûcher quand l'official de Rodez viendra la réclamer comme épouse adultère...
    « — Adultère ! Elle est forte celle-là ! On dirait que tu renverses les rôles, l'ami ! C'est pas Catherine qui vit publiquement avec une putain, c'est bien toi il me semble, sans parler de ta bande de coupe-jarrets qui terrifient le plateau et qui maraudent un peu partout !
    « — Je sais ce que je dis : j'ai des preuves, des témoins...
    « — Des témoins ? Je me doute de ce que ça peut être tes témoins et d'où tu les tires... Ils ne valent pas cher !
    « — Ils vaudront en tout cas assez cher pour que l'évêque et l'official les croient. Et c'est le clergé, à ma demande, qui ira sortir la Catherine de chez toi pour l'enfermer à vie dans un couvent quand je l'aurai répudiée. On lui tondra ses beaux cheveux dorés, son meilleur piège...
    «Alors là, dame Sara, mon sang n'a fait qu'un tour. J'ai tout oublié de l'amitié d'autrefois et même de la pitié que j'éprouvais à lui voir cette grande balafre rouge qui l'abîme d'un côté et j'ai hurlé si fort que j'en ai fait fuir les corneilles.
    «— T'as la mémoire courte, Montsalvy, et tu me donnes envie de vomir ! Dire qu'on te considérait jadis comme la fleur des chevaliers de par ici ! Tu étais dur et froid comme la lame de ton épée mais tu étais aussi droit qu'elle. Son meilleur piège, hein ? Tu as bien oublié le glas des cloches de Carlat et l'homme qu'on emmenait en léproserie avec dans les mains une masse vivante de soleil... le meilleur piège de
    « cette garce » qui t'adorait assez pour se massacrer pour toi et qui cent fois a failli périr à cause de toi...
    — Qu'a-t-il dit, coupa Sara, qui avait pâli au

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