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La dottoressa

La dottoressa

Titel: La dottoressa Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Graham Greene
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malveillants, non… des regards d’hommes pour les femmes. Sauf qu’il ne s’est
rien passé. Personne ne m’a sauté dessus. D’ailleurs je n’y ai pas traîné, dans
cette eau. Elle n’était pas si chaude que ça, tout juste tiède, délicieuse ;
mais je ne suis restée que quelques minutes. J’avais la sensation que ça me
débilitait. Ce devait être un genre de source sulfureuse. En tout cas nous
étions morts de fatigue, après.
    Nous sommes retournés prendre un omnibus. Il était découvert
celui-ci. Comme une voiture… Bien, nous voilà donc assis, et les Bédouins, rien
que des hommes apparemment, semblaient avoir puisé un regain d’énergie au bain :
ils se sont mis à chanter. Oui, à chanter leurs airs, de toutes sortes, mais c’était
beau, oui, inouï de beauté… Le gentil Baudisch s’est endormi à côté de moi. Vidé
par la baignade, sans doute. Mais moi j’écoutais…
    De retour à Gafsa, tout le monde est descendu et chacun est
allé son chemin. Durant les quelques jours qui ont suivi j’ai fait la connaissance
d’un de ces Bédouins. Il avait une immense demeure entourée d’une énorme
plantation – enfin, pas vraiment énorme, mais tout de même, pour une oasis…
Il m’a fait voir ses jardins, ses fruits, tout en essayant de me persuader de
rester. Comme il parlait un peu le français, je lui ai expliqué qu’il valait
mieux pas, d’autant qu’il m’avait en plus présentée à sa femme. À l’entendre, ça
n’avait rien à voir ; il la renverrait, sa femme ; que si, que si :
inutile de me faire du mauvais sang pour ça ; ce serait moi qu’il aimerait
à présent ; oui, pour ce qui était de ça, il m’aimerait, et il fallait que
je reste, il n’avait pas fini de m’en montrer, des choses, et qu’est-ce que
nous ferions, comme voyages !… Moi je disais non, non. J’avais une de ces
peurs… un Arabe, pensez, et immense, immense – non ! non ! C’est
une des fois où j’ai dit « Non ! » Pas que ça soit arrivé bien
souvent, comme dans cette chanson que nous chantions à Vienne dans le bon vieux
temps :
     
    Le jeun’ gars de Styrie à la pucelle dit,
    Quel cadeau veux-tu que je te fasse aujourd’hui ?
    Bouquet d’œillets jolis ou muguet parfumé ?
    Jusqu’à mon dernier jour je jure de t’aimer
    Si tu veux consentir à me montrer tes cuisses
    Jusqu’au p’tit paradis d’où c’est qu’tu fais pipisse.
    Mais la pucelle dit : Cause toujours petit,
    Si j’ faisais comm’ tu dis le coup serait gratuit.
     
    Il disait, ce Bédouin, qu’il fallait descendre jusqu’à
Tozeur. C’est l’avant-poste d’où part la caravane pour traverser le Sahara. Alors,
Baudisch et moi nous y sommes allés. C’est un endroit beaucoup plus désolé, Tozeur,
parce qu’il n’y a pas de sources, rien que de petites huttes. On allait où on
voulait et on pouvait manger n’importe où, sauf que c’était infect.
    Pendant le voyage de retour je ne me suis pas sentie bien, pas
bien du tout, même, et il faut voir ce que c’est que les wagons antiques qu’on
attelle là-bas à ces espèces de trains ouverts à tous vents : pas un seul
avec des wécés, rien ! On s’accroupissait tout au bout, là où le wagon
finissait, oui, on s’asseyait sur les talons et ça tombait derrière vous, un
point c’était tout. Affreux, affreux. Pour les hommes encore, bon, passe, mais
moi, l’incommodité d’avoir à me retenir ! On était plutôt secoué, et vous
imaginez ce que c’était pour moi de faire dans ces conditions ! Les gens
étaient bien honnêtes : ils allaient tous à l’autre bout, à l’avant du
wagon, et personne ne regardait. Tout de même, quelle incommodité ! D’abord
je me suis forcée à attendre, en me disant que j’arriverais peut-être à me
faufiler dehors à un arrêt et à en profiter pour me soulager. Mais non, impossible,
avec les uns qui descendaient et les autres qui montaient. Et puis Baudisch me
disait : « Si tu t’écartes trop, qui sait si le train n’est pas
capable de repartir sans toi, et alors plus aucune communication possible entre
nous. Vas-y, fais comme tout le monde, puisque je te le dis, fais comme ces
gens. Et qu’on n’en parle plus. »
    Nous sommes rentrés à Tunis. En repartant, nous ramenions
dans nos bagages deux suppléments : un caméléon, dont j’avais fait l’acquisition
auprès de la femme qui vendait des légumes sur le marché de Tunis – acquisition
par pure

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