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La dottoressa

La dottoressa

Titel: La dottoressa Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Graham Greene
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compassion, il me faisait tellement pitié qu’elle m’a dit :
« Tiens, prends, je te le donne. » Elle ne me l’a même pas vendu, elle
m’en a fait cadeau comme ça, c’est tout. Nous l’avons emmené. Et aussi un
hérisson, mais d’Afrique – ils n’ont pas les oreilles aussi courtes que
les nôtres, de hérissons ; non, elles sont longues, longues… comme des
oreilles d’éléphant – des beautés. Et du coup je me suis dit :
« On l’emmène. On le montrera au professeur Werner. »
    De son côté, Alfi rapportait une partie de ses papillons. Oh,
ils étaient infiniment plus précieux que notre hérisson et que le caméléon, les
papillons d’Alfi !
LE PONT DES VACHES
    Alfi était toujours à Gabès, et comme j’étais sans nouvelles
de lui, Baudisch et moi nous avons pris le bateau à Tunis, pour Malte. Nous
avons voyagé dans l’entrepont, avec les vaches, parce que nous étions presque à
sec. En quittant Vienne j’avais emporté un petit sac contenant des pièces de
vingt francs en or – toute une pleine bourse, avec rien que des pièces d’or.
Seulement, cette réserve avait singulièrement baissé ; voilà pourquoi nous
avons fait la traversée avec les vaches jusqu’à Malte. Mais nous étions très
heureux et nous disions : « Quelle bénédiction que nous ayons pris
ces billets d’entrepont ! » C’est que vous n’imaginez pas les espèces
de juifs et d’Arabes qu’il y avait en troisième classe – affreux ! Une
abominable racaille, de vraies brutes à faire peur, même à moi. Une populace
insoutenable… et l’odeur ! La crasse ! Tandis que dans notre classe, dans
l’entrepont, il n’y avait que des vaches. Et puis après ? Nous nous sommes
assis du côté où elles n’avaient pas fait leurs affaires. Et voilà comment nous
avons voyagé jusqu’à Malte. Longtemps après, tous ces beaux yeux de vache
remplis de patience m’ont poursuivie, comme s’ils avaient continué à me fixer
de leur regard. Donc, Malte, avec arrivée à La Valette. Un rêve, La Valette !
Mais le mieux de tout c’étaient les oranges, les oranges de Malte – fantastiques !
Toutes petites, mais très sucrées et si bonnes qu’on pouvait en manger autant
que possible, sans en être affecté. Elles n’étaient que jus, et quel jus –
d’une pureté ! Cela dit, le paysage de l’île est magnifique. Il y a eu un
orage terrifiant pendant notre séjour.
    J’ai oublié de vous dire que lorsque nous étions sur le
bateau, il y avait eu déjà une tempête pendant la traversée, et encore une
autre, avant, dans le désert, sur le trajet de retour à Tunis. On avait beau
nous raconter que ce n’était qu’une toute petite tempête, tout de même !… Pour
les Arabes je veux bien : ils s’enveloppaient dans leur burnous et ils
étaient intégralement couverts ; mais nous, nous n’avions que nos
mouchoirs et chacun sa veste pour recouvrir le tout. Le sable vous entrait dans
le nez et la bouche, il n’y avait rien à faire. Si c’est ça qu’on appelle une
petite tempête, tant mieux, mais alors autant dire que celle-ci était de la
quintessence et du concentré de typhon. Les gens vous soutenaient que ce n’était
rien, ça ne faisait que passer, l’affaire de dix minutes, n’empêche : c’était
déjà assez mauvais comme ça, et si vous aviez vu la grosse mer que ça nous a
laissé, une fois passé, Mamma mia !
    Lorsque nous avons quitté Malte pour Messine, nous avons eu
droit une fois de plus à une vraie mer de tempête. Sur le même bateau, avec les
mêmes vaches. Je me rappelle encore comme ça roulait de l’avant à l’arrière. Les
vaches remuaient tant que j’étais malgré tout un peu effrayée. Les marins de l’équipage
nous ont tirés de côté, à l’abri derrière une séparation où nous avons pu nous
blottir l’un contre l’autre ; ils craignaient de nous voir blessés ou
estropiés par les vaches, au cas où elles seraient devenues de mauvaise humeur,
et c’est comme ça que nous sommes arrivés à Messine avec toutes ces bêtes qui
meuglaient, que j’en étais malade de rire !
    Seulement, Messine, parlons-en… la pauvre, il n’en restait
rien ! C’était l’année d’après le tremblement de terre, et l’impression
était terrifiante, quelle pitié ! Mais pas au premier coup d’œil. En
débarquant nous n’avons eu qu’un cri : « Elle est toujours debout, la
ville ! » Oui, mais ce qui en restait c’étaient

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