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La dottoressa

La dottoressa

Titel: La dottoressa Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Graham Greene
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dame
autrichienne. La dame était la petite amie d’un homme important – il
fabriquait les meilleures confitures qu’on pût trouver dans n’importe quelle
boutique au monde – cerise, cassis, de tout. On ne manquait jamais de
confiture chez elle, mais il lui donnait pas mal d’autres choses en plus. C’était
un honnête homme, même mort il ne l’a pas laissée sans rien. Chez elle aussi, on
trouvait toujours des homosexuels, par douzaines, et des chats par centaines. J’exagère,
bien sûr, mais juste un tout petit peu. C’est là que j’ai fait la connaissance
de cet autre, un Anglais d’un certain âge. Il était tombé amoureux d’un jeune
garçon d’Anacapri, amoureux fou, et il ne savait que faire : il vivait à l’hôtel,
vous comprenez. Alors je lui ai dit : « Je vais vous organiser un
petit repas de noces, chez moi » – ce que j’ai fait, très joliment, avec
des bougies et un bon vin d’Anacapri, et après je les ai laissés continuer tout
seuls. Il y avait eu un moment où je voulais me faire bonne sœur, vous vous
rappelez ? Eh bien, je me suis faite un peu prêtre pour ce mariage. Ils
étaient tout heureux de ce dîner. Est-ce que c’était mal, de ma part ?
VISITE À GIGI
    En quelle année sommes-nous, pour l’instant ? 32, 33 ?
C’était donc au moment d’Hitler en Allemagne. Alors là s’en situe une bien
bonne !… Je vivais à Capri et jamais je ne lisais le journal, rien que le Corriere
dei Piccoli, et cette fois-là Ludovico était venu nous voir pendant les
vacances et il nous rebattait les oreilles avec Hitler, Hitler… alors je lui ai
dit : « C’est qui, celui-là, si ce n’est pas trop de curiosité ? »
Et lui qui me répond : « Comment, tu ne sais pas ? » Je n’avais
pas la moindre idée de ce qui se passait.
    Pour ce qui était de Mussolini, oui, évidemment, j’étais un
peu au courant. Pas immédiatement, mais dans la suite, oui, j’ai connu son
existence par Tutino, parce qu’à l’époque où Mussolini fit sa Marcia su Roma Tutino se trouvait être en poste à Naples. Pour quelle raison, j’ai oublié, mais
le fait est qu’on les avait tous rappelés sur le moment.
    En 1933, une famille de riches propriétaires terriens, les
von Landen, de Prusse-Orientale, m’invita à passer les vacances là-bas, sur ses
terres, à Klein Guja. Quant à savoir si j’avais rencontré ces gens à Capri, j’ai
oublié, sauf que c’était en qualité de patients que je les avais connus : ils
s’étaient intéressés à moi et m’avaient déclaré qu’il était temps que je quitte
Capri, que j’étais trop anémiée sur cette île et qu’il était plus que temps, oui,
que je change d’air pendant les vacances, qu’un petit tour vers le Nord me
ferait certainement du bien. Donc, en route ! Je suis d’abord passée par
Innsbruck, où j’ai invité mon fils Ludovico à me rejoindre avec son père, Gigi ;
ensemble, nous sommes allés à Rinn, au-dessus d’Innsbruck et nous y avons passé
quelques semaines.
    C’était drôle de me retrouver en compagnie de Gigi, et pas
désagréable. Il ne vivait plus à Vienne, il habitait chez sa mère à Bâle, et il
avait une liaison avec une certaine Bâloise. Il avait hérité de son père des
monceaux d’argent et il avait fondé une vague entreprise industrielle, avec
cette Bâloise pour l’aider, et Ludovico vivait aussi avec lui et poursuivait
sur place ses études. Naturellement, Gigi continuait à peindre et à gagner de l’argent
avec ses tableaux, mais, cela dit, il aurait bien aimé faire fructifier l’argent,
et bien entendu la totalité fut engloutie dans des spéculations.
    Il n’était pas aussi beau que dans sa jeunesse, car il avait
épaissi, mais il était encore bel homme, et mon souvenir était en deuil dont il
ne se remettait pas – à en croire ce que me racontaient ses maîtresses. Je
le tenais de Zuzzi, et cette fille de Bâle m’a dit la même chose. Le soir, quand
il était un peu trop plein de vin, il pleurait, et il leur racontait comme la
vie avait été merveilleuse avec moi et comme il continuait à me désirer. Bref, la
bouteille aidant, son amour résistait toujours, il aimait bien boire ; jeune,
il buvait déjà avec don Domenico, à Positano ; le vin arrivait par bottiglioni, et non contents de boire pour la soif c’étaient des cinq litres qu’ils
descendaient à eux deux, ils vidaient ça comme rien – cinq litres ! Sauf
que c’était de

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