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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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enfant, c’était une consolation… triste consolation ! Et les patrouilles qui sillonnaient Paris purent voir avec un frisson d’étonnement et de pitié ce pauvre cercueil fleuri comme un cercueil de princesse, qui s’en allait par les rues déjà obscures, suivi seulement par une jeune fille qui marchait en pleurant…
    Belgodère avait quitté la roulotte en disant à ses deux hercules assis sur les marches :
    — Ramenez la voiture à l’auberge. Peut-être ne rentrerai-je pas cette nuit… Et quant à Violetta, ajouta-t-il plus sourdement, elle ne rentrera jamais !…
    Il s’éloigna alors à grandes enjambées, et d’assez loin, sombre, oblique, rasant les murs, se mit à suivre Violetta qu’il couvait de son œil luisant, comme la bête de proie suit sa victime à la piste, sans bruit, dans la nuit des grands bois solitaires.
    * * * * *
    Au moment où Violetta se mit en marche derrière la lugubre civière, un homme abrité sous l’auvent d’une maison de la place, la tête couverte d’une cape noire qui retombait sur son visage, à demi penché, palpitant, la suivit d’un morne regard jusqu’à ce qu’elle eût disparu.
    — La victime est en route, murmura-t-il alors. Il me reste à prévenir le sacrificateur ! Effroyable besogne !… Pauvre infortunée ! Le hideux bohémien te mène… et là-bas, t’attend Fausta, l’implacable Fausta !…
    Cet homme frissonna comme s’il eût fait grand froid. Alors il quitta le recoin d’où il avait guetté le départ de Belgodère et de Violetta, se dirigea vers le pont de Notre-Dame qu’il franchit, et pénétra dans le dédale de la Cité.
    * * * * *
    Entre la cathédrale, formidable de son silence, et le Palais d’où sortaient les sourdes rumeurs du Parlement assemblé en séance de nuit, vers le milieu de la rue Calandre, dans un terrain vague en bordure du Marché Neuf achevé depuis deux mois, s’élevait une maison basse, honteuse, un logis écarté, en quarantaine parmi les logis voisins.
    Le jour, les hommes s’écartaient de cette demeure en grondant une imprécation. Les femmes qui passaient par là pâlissaient et faisaient un signe de croix. En ce logis, dans une pièce froide, aux meubles sévères, aux murailles nues qui s’ornaient seulement d’une grande croix d’ébène, une sorte de colosse pensif était assis dans un large fauteuil, le coude sur une table servie, le front dans la main, tandis qu’une vieille servante allait et venait à pas furtifs.
    — Vous ne mangez donc pas, maître Claude ? demanda la femme en s’arrêtant.
    Le géant fit un geste d’indifférence et de lassitude.
    — Toujours ces affreux souvenirs de votre ancien métier, reprit-elle au bout d’un silence.
    — Non, dit sourdement Claude en secouant la tête.
    — Oh !… alors, c’est que vous pensez à l’enfant !…
    — Toujours ! soupira Claude comme s’il se fût parlé à lui-même. Les minutes où les spectres de mes victimes ne viennent pas m’assiéger sont encore, peut-être, les plus terribles pour moi… Car alors, c’est son image, à elle, qui se dresse devant mes yeux. Huit ans, dame Gilberte ! huit ans écoulés presque jour pour jour depuis qu’elle disparut comme un beau songe qui s’évanouit… O mon enfant, ma suave violette qui embauma ces trop courtes années de ma terrible existence, qu’es-tu devenue ?… Où sont tes jolis yeux d’azur ?… Où est le radieux sourire de tes lèvres ?… Tout en moi, autour de moi, n’est plus que ténèbres depuis que tu ne jettes plus tes petits bras autour de mon cou en gazouillant ce nom de père qui me faisait frémir de bonheur jusqu’au fond des entrailles.
    Maître Claude laissa lentement retomber son poing noueux, pareil à une masse. Un soupir gonfla et souleva son vaste poitrail. Et cet homme, qui semblait l’incarnation de la force animale, reprit avec une étrange douceur :
    — Il paraît que je n’étais pas fait pour tant de bonheur, et que j’étais condamné aux solitudes maudites ! Pourtant… rappelez-vous, dame Gilberte, je n’en abusais pas de ce bonheur !… Je n’allais voir l’enfant que deux fois par semaine… c’étaient mes grandes fêtes à moi !… Mais quelles fêtes que ces jeudis et ces dimanches ! ajouta-t-il avec un rayonnement sur sa physionomie fatale… Avec quels délices j’abandonnais la sinistre livrée ! Avec quelle joie, dès l’aube, je mettais les habits de bourgeois sous lesquels elle me

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