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La fée Morgane

La fée Morgane

Titel: La fée Morgane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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honte ou qui n’en soit
mort. Tu as eu plus de chance que les autres, et crois bien que j’en ai une
grande joie. »
    Ce jour-là, Bohort ne quitta pas le manoir de Corbénic. On
ne voulut à aucun prix le laisser partir sans lui faire de grandes
démonstrations d’amitié et de reconnaissance. On lui fit donc fête et grand
honneur, heureux de la belle aventure que Dieu lui avait accordée. « Mais,
demanda Bohort au roi, pourquoi n’as-tu pas voulu me laisser tenter l’aventure
la nuit précédente ? – C’est bien simple, répondit Pellès, tu n’étais pas
encore lavé de tes fautes, et tu n’aurais pas supporté les épreuves. – Tu as
sans doute raison, dit Bohort, mais il y a bien d’autres questions que je
voudrais te poser au sujet de ce que j’ai vu. Quelle est donc cette lance au
bout de laquelle coulaient des gouttes de sang ?
    — Vraiment, Bohort, répondit le roi, il n’est pas
permis de dévoiler la vérité sur la lance qui saigne, ni à toi ni à personne. C’est
seulement lorsque la dernière quête sera entreprise et que tous les chevaliers
du monde se lanceront dans l’aventure, que la vérité sera révélée, aussi bien
aux autres qu’à toi. Et il en sera de même pour tous les autres mystères dont
tu as été le témoin. Ne m’en demande pas plus, car je ne pourrais pas te
répondre. – Je m’en ferai une raison, dit Bohort, puisqu’il le faut. »
Tout le jour et toute la nuit, il fut l’hôte du roi Pellès. Mais, au petit matin,
il fit préparer son cheval, revêtit ses armes et, sautant en selle, il reprit
sa course errante à travers les vallées et les plaines [46] .

9

La Fée des Brumes
    Cette année-là, le roi Arthur avait tenu une cour exceptionnelle
à Carduel afin de faire ses dons de largesse envers les chevaliers qui l’avaient
bien servi et de bien doter ses vassaux qui n’étaient point encore pourvus de
bonnes terres. Il se montra très généreux, distribua force présents aux uns, des
forteresses aux autres, et chacun vanta la largesse du roi qui savait se faire
aimer de tous en reconnaissant les services qu’on lui rendait pour le plus
grand honneur du royaume de l’île de Bretagne.
    Un seul fut oublié. C’était un preux chevalier du nom de Lanval.
Il était l’homme lige du roi Uryen Rheged et l’un des compagnons favoris de son
fils Yvain. Il avait pourtant accompli beaucoup de prouesses au profit d’Arthur
et d’Uryen en chassant les Scots et les Pictes du Nord, qui ne manquaient
jamais une occasion de venir ravager les marches du royaume. Il avait fait de
nombreux prisonniers, s’était illustré dans plusieurs combats, et il avait
réussi à repousser la plupart des envahisseurs dans leurs montagnes. Et, dans
le pays, chacun vantait les mérites de Lanval, fidèle et preux chevalier dont
la conduite vis-à-vis des dames et des jeunes filles avait toujours été irréprochable,
tant il mettait de soin à les servir quand elles étaient en danger ou lorsque
leur intérêt l’exigeait.
    Lanval fut très déçu d’avoir été oublié. Il était de haut lignage,
descendant d’un roi dont le pays était au-delà de la mer, mais il avait dépensé
tout son avoir et se trouvait en grande difficulté. Pourtant, sa fierté était
telle qu’il ne demanda rien. Il quitta la cour sans se faire remarquer, monta
sur son cheval et se dirigea au hasard dans la campagne en agitant de tristes
pensées. Il parvint ainsi sur les bords d’une rivière où il faisait frais. Il
descendit de son cheval, et comme celui-ci bronchait souvent, il le dessangla
pour qu’il pût se vautrer tranquillement au milieu du pré. Quant à lui, il
roula son manteau sous sa tête et se coucha sur l’herbe, cherchant à trouver le
sommeil.
    Comme il reposait ainsi, il aperçut deux jeunes filles qui venaient
vers lui le long de la rivière ; elles étaient étroitement lacées dans
deux bliauds de couleur pourpre sombre, et leurs visages étaient clairs et
beaux. L’une d’elles portait un bassin d’or pur, très fin et bien ouvragé, et l’autre
portait un linge blanc sur le bras. Elles vinrent tout droit vers l’endroit où
Lanval était allongé. Quand elles furent tout près, le chevalier se dressa pour
mieux voir ce qu’elles voulaient, puis il se releva et les salua. Elles
répondirent à son salut, puis elles lui dirent : « Seigneur Lanval, notre
maîtresse, qui est fort belle et fort courtoise, nous envoie vers toi pour t’adresser
un

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