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La fée Morgane

La fée Morgane

Titel: La fée Morgane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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dévoré par la jalousie. Il me tient recluse dans cet enclos. C’est
ici que je vis nuit et jour, c’est ici que j’ai ma chambre et ma chapelle, en
compagnie de la jeune fille que tu vois. Il n’y a qu’une seule entrée et c’est
un vieux prêtre qui en détient la clef. Fasse le Ciel que le feu d’enfer le
brûle ! Je ne peux sortir d’ici qu’avec sa permission ou sur l’ordre de
mon seigneur. Mais, malgré cela, s’il te plaît de demeurer ici jusqu’à ce que
tu puisses marcher, nous te cacherons sans peine et nous te servirons
volontiers. »
    Guigemer était fort ému de ce que venait de dire la dame. Il
la remercia vivement, tout joyeux de séjourner avec ces deux femmes qui
venaient de le tirer de son lourd sommeil, agité de cauchemars. Il se souleva
sur son lit et se mit debout. Puis, appuyé sur elles, il les suivit jusqu’à la
chambre. C’est sur le lit de la jeune fille, derrière un rideau qu’elles
appareillèrent en guise de courtine, qu’elles couchèrent le jeune homme. Elles
apportèrent de l’eau dans un bassin d’or et lavèrent la plaie de sa cuisse. Elles
enlevèrent le sang tout autour avec un beau morceau de toile, puis elles lui
firent un bon pansement. Elles prirent grand soin de lui, lui demandant, chaque
fois qu’elles le touchaient, si elles ne lui faisaient point de mal. Guigemer
se laissait aller à rêver et pensait beaucoup moins à sa souffrance.
    Le soir, quand le vieux prêtre eut servi le repas et se fut
retiré, la jeune fille en préleva ce qu’il fallait pour nourrir et réconforter
le chevalier. Il put ainsi manger à sa faim et boire à sa soif. Mais il ne
pouvait s’empêcher de contempler le visage de la dame, sentant en lui les
atteintes d’un sentiment qu’il n’avait jamais éprouvé. Il ne pensait plus à sa
plaie, mais un autre combat se livrait dans son cœur et le faisait souffrir d’une
autre façon. Il soupira longuement et demanda qu’on le laissât dormir. La dame
et la suivante le quittèrent.
    Mais, Guigemer ne pouvait trouver le sommeil. Pensif et angoissé,
il ne comprenait pas très bien ce qui lui arrivait, mais il était sûr d’une
chose : il mourrait si la dame ne guérissait pas sa nouvelle blessure.
« Hélas ! se disait-il en lui-même, que dois-je faire ? Aller la
trouver et lui demander d’avoir pitié d’un malheureux que le destin a durement
frappé ? Si elle repousse ma prière et si elle se montre orgueilleuse et
fière, je n’aurai plus qu’à mourir de douleur ou à languir tous les jours qui
me restent à vivre ! » Il pleura silencieusement toute la nuit, ne pouvant
calmer l’agitation qui s’était emparée de lui. En soupirant, il passait et
repassait dans sa mémoire toutes les images qui l’avaient frappé : les
paroles de la dame, sa façon de bouger, le mouvement de ses lèvres, la couleur
de ses beaux cheveux, son teint clair et ses mains blanches et fines. « Dieu
tout-puissant ! se dit-il encore, ne serait-ce pas celle qui doit me
guérir de ma blessure, celle qui doit souffrir d’amour pour moi plus qu’aucune
autre femme au monde ? »
    Mais, il n’était pas le seul à être tourmenté. Au petit
matin, la dame se leva avant le jour, se plaignant de n’avoir pas dormi. La
jeune fille qui couchait auprès d’elle devina bien à son visage qu’elle
souffrait du mal d’amour et que son attention était tout entière dirigée vers
le chevalier qu’elles avaient hébergé dans leur chambre. Cependant, comme elle
ne savait pas si lui, de son côté, avait de l’inclination pour elle, elle se
garda bien de tout commentaire. La dame s’en alla prier dans sa chapelle, et, pendant
ce temps, la suivante vint trouver le chevalier. Elle s’assit sur une chaise en
face du lit. « Amie, demanda-t-il, où donc est allée ma dame ? Pourquoi
s’est-elle levée si tôt ? »
    Elle ne répondit rien, et il se mit à soupirer. « Chevalier,
dit enfin la jeune fille, j’ai bien compris que tu es dévoré par le mal d’amour.
Ne t’en cache pas. Ma dame est fort belle, et toi, tu es beau, et ce serait une
bonne chose que de vous accorder. Mais qui veut être aimé de ma dame doit
promettre d’être discret et de ne rien faire qui puisse compromettre son honneur.
– Jeune fille, répondit Guigemer, je suis épris d’un tel amour que ce mal ne
peut qu’empirer si l’on ne vient pas à mon aide. Conseille-moi : comment
faire pour lui avouer ce que je ressens ? – Laisse parler

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