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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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vous avez banni par reconnaissance ! – avait habilement subjugués… Comme il dut, par la suite, en avoir moult regrets !
    – Hein ? dit le souverain, le dos aux flammes. Oyez, mes amis ! Oyez bien !… Ce cloporte, s’il le pouvait, me vendrait avec joie aux Goddons !
    Montmorency entraîna les autres dans son rire. Thierry et Ogier furent insensibles à cette gaieté, la trouvant outrancière eu égard aux circonstances. De plus, ces hommes qui s’ébaudissaient s’étaient inclinés, le matin même, au passage du favori.
    – Pourquoi, larron, reprit Philippe en s’approchant, admires-tu Édouard à ce point ? Où l’as-tu connu ? Comment t’a-t-il asservi ?
    Blainville sourit, plus dédaigneux que jamais :
    – Où je l’ai connu ?… Mais presque à vos côtés… Souvenez-vous, si vous le pouvez ! Il avait seize ans et régnait depuis un an quand il vint à Amiens afin de vous y rendre l’hommage lige pour son duché de Guyenne et toutes ses appartenances… C’était il y a dix-sept ans. «  Fils de roi ne saurait s’agenouiller devant fils de comte  », avait-il dit… Mais il y consentit tout de même, par finesse et patience, qualités dont vous êtes dépourvu !
    C’était vrai. Nul ne broncha. Philippe, croisant ses longs bras, se contenta de sourire. Enhardi, Blainville continua :
    – J’étais présent… Vous ne me connaissiez pas, alors, mais j’étais là, non loin de vous, dans la cathédrale… J’ai trouvé le jeune Édouard vraiment royal… Il était la jeunesse et la force assagie ; vous l’avez traité en petit vassal…
    – Tu étais là !… Pourquoi ?
    – Par curiosité… C’est quelques mois après que je me suis arrangé pour connaître les deux Charles : Espagne et Blois…
    – Ce sont eux, en effet, qui t’ont recommandé à moi !
    Ogier et Thierry échangèrent un regard. Pour parvenir à ses fins, cet homme avait usé de toutes les bassesses, de tous les avilissements.
    – Tu m’as pourtant bien servi… Peu à peu, je t’ai élevé… Quel fou j’étais !
    Et brusquement, le roi demanda :
    – Comment as-tu connu Édouard ? Depuis quand me trahis-tu ?
    Blainville haussa les épaules :
    – Longtemps après l’hommage d’Amiens, vous m’avez envoyé en Flandre pour voir ce qu’il s’y tramait… C’était en juillet de 1338… Édouard, qui s’était embarqué à Orwell au milieu du mois, venait d’arriver à Anvers. N’ayant trouvé ni vitailles ni argent préparés pour lui et ceux qui l’accompagnaient, il dut emprunter à ses amis pour honorer le duc de Brabant, son cousin, le duc de Gueldre, son beau-frère… d’autres encore… J’étais chez le duc de Fauquemont, l’un de ses créanciers. Il me présenta au roi… Ni Édouard ni Fauquemont ne savaient alors que je vous servais… Car je vous servais encore… Je m’étais fait passer pour un marchand de laine… Je leur avais dit que je tenais commerce à Beauvais…
    – Ensuite ?
    – Ensuite ?… Ce fut tout… J’ai vécu quelques jours dans l’entourage d’Édouard. J’ai vu qu’il était un grand roi… Il parlait de vous sans détestation, avec une gaieté sans malice… Il disait : «  Philippe qui se porte pour roi de France  » ; il vous appelait plaisamment son cousin… Peu à peu, il m’a conquis… Hé oui !… Il avait tout ce que vous n’aviez pas : la rigueur, la décence, la dignité, la quiétude… la majesté !
    – Monstre !
    – Tout ce qui vous manque à vous, l’incorrigible et faux suzerain de France !
    Montmorency lança un « Oh ! » indigné. Ni le roi ni le félon ne s’en soucièrent. Ils étaient face à face, souffle à souffle ; et Blainville poursuivit :
    – Je me suis dit que ces qualités grâces auxquelles se bâtit un grand règne, Édouard ne les tenait pas de son père, cette femmelette, mais de son grand-père, Philippe le Bel… Pauvre Philippe le Bel qui aura engendré, lui, trois glorieux cocus : le Hutin, Philippe V et Charles IV aux règnes brefs et sans éclat !… Oui, Édouard méritait et mérite le trône que vous occupez indûment, Philippe… Et je lui ai dit… Je lui ai révélé qui j’étais… Et je fis en sorte d’être présent à Gand, quand il y fut sacré roi de France (419) au grand contentement de la douce reine Philippa, des Anglais, des Flamands… et de moi-même !
    Philippe VI broncha, essuya la sueur qui perlait sur son front. Il se contenait

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