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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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pour ne pas, de nouveau, saisir à pleines mains le cou de cet ignoble :
    – Il t’a couvert d’or !… Montfort le dit…
    – Il est pauvre… Avec lui, je me suis contenté de fort peu…
    – Qu’a-t-il de plus que moi ? Parle !…
    – Je vous l’ai dit : tout ! Vous busnez (420)  ? Lui, jamais. Il tient sa royauté par le sceptre et l’épée ; vous, vous vous abritez sous des parchemins et des récits de Chevalerie… Édouard est roi par la chair, l’esprit et le sang. Pas vous… Il met sa force et ses facultés au service d’une juste ambition ; ambitieux et hardi d’apparence, vous êtes, en vérité, mou et pusillanime… Il gagne toutes ses batailles ; vous perdez toutes les vôtres… Voyez celle de ce jour d’hui… Même Doria, qui y a laissé sa peau de mercenaire, me disait hier au soir : «  Jamais je n’ai vu un roi aussi sot ! » Et vous vous étonnez que j’admire Édouard III ?
    Il y eut un silence empli des craquements du feu. Blainville se tourna brusquement vers Ogier :
    – Voilà le roi que tu sers !
    Puis, à Thierry :
    – Voilà le roi que tu as sauvé !
    Bien qu’il eût été troublé par des arguments qu’il comprenait, sans en réprouver aucun, Ogier pesa fermement sur les mots de sa réponse :
    – Sire Philippe est notre roi, puisqu’il règne sur la France. Nous lui sommes acquis… C’est aussi simple que cela.
    – Il t’a fait du mal !
    – Par votre entremise ! Sans votre volonté de nous nuire à nous aussi, les Argouges, sans doute aurait-il admiré mon père…
    Ogier se tut, sentant confusément qu’il se heurtait, en soi-même, au plus dur de son destin. Quelles seraient les années à venir ? Ce roi n’était pas bon, mais la France était bonne. Et faible – ou du moins très affaiblie. Il fallait se résigner.
    Grimaçant de toute sa haine, Blainville se tourna vers Philippe VI :
    – Ton père valait mieux que toi et que ton frère (421) . C’était un ambitieux… Toi, Philippe, tu dissimules ta vraie nature sous une apparence hautaine… Mais regarde-toi bien : tu es vieux, tu es las ; tu ne cesses de trembler dans tes chausses !… Tu n’as pas dormi la nuit dernière… Je t’ai observé dans ton lit : tu geignais ; tu faisais des songeries de sang… Tu avais peur ! Ton frère était pourvu, lui, de bachelerie (422)  !
    – Tu l’as tué !
    – Parce qu’il était un Valois, race maudite qui empêche Édouard d’unir l’Angleterre à la France et de former ainsi la plus puissante nation que l’on ait vue sur terre !
    Et soudain, en riant, Blainville ajouta :
    – On va s’ébaudir longtemps, Philippe, de ta défaite… Aussi bien chez les nobles que dans le commun ; aussi bien d’un côté de la mer que de l’autre !
    Philippe VI se remit à marcher ; Ogier le rejoignit :
    – Sire !… Cet homme est plus malfaisant qu’un scorpion. Qu’importe ce qu’il dit : il est ivre de haine. Il a commis envers les miens des préjudices que seule la mort peut réparer… De deux choses l’une, sire : ou je me bats contre lui pour nous revancher nous, les Argouges, ou je suis votre champion pour venger votre frère et vous laver de cette boue dont il vous a sali !
    Montmorency et Aubigny maintenaient solidement leur prise. Hainaut était allé chercher les épées qu’il remit une à une à leurs propriétaires.
    – Holà, messires ! ricana Blainville. Tous contre moi ?
    Il s’interrompit, enroué par une émotion qui ne pouvait être feinte.
    – Eh bien, s’il le faut, je vous affronterai !
    Le roi paraissait hésiter. Ogier fut tenté de le secouer par le coude, bien qu’il comprît son désarroi : après que son armée eut souffert d’une destruction à la mesure de son énormité, c’était aux Valois et surtout à lui-même que l’adversité s’en prenait.
    Philippe VI cria, tourné vers Blainville :
    – Je ne sais même pas d’où tu viens, d’où tu sors… Mais ce que je sais, c’est que ta mère ne pouvait être qu’une pute !… À mère putain, fils infâme… Plus rien, Richard, ne m’étonne de toi !
    Ogier vit Blainville frémir ; la réponse jaillit, aussi vive et acérée qu’une flèche :
    – Ta Boiteuse et ton Jean, dis-moi, que sont-ils d’autre ?
    Une gifle de Beaujeu, d’un revers de main, imposa silence au malandrin ; et tandis que le sang gouttait de ses lèvres, il grogna :
    – Qu’importe tout cela !… Le temps vous est

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