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La Flèche noire

La Flèche noire

Titel: La Flèche noire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Louis Stevenson
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souvent.
    – Eh   ! c’est la manière d’Angleterre. Que voulez-vous   ? demanda le comte. Mais vous êtes injuste pour le chevalier de Tunstall, et telle que va la foi dans cette génération sans foi, il s’est montré naguère honorablement loyal envers nous autres de Lancastre. Même dans nos derniers revers, il a tenu ferme.
    – Veuillez, alors, dit Dick, jeter les yeux sur cette lettre, elle pourra changer votre opinion sur lui, et il tendit au comte la lettre de sir Daniel à lord Wensleydale.
    L’effet sur la physionomie du comte fut instantané   ; il rugit comme un lion furieux et sa main d’un mouvement brusque saisit son poignard.
    – Vous avez aussi lu cela   ? demanda-t-il.
    – Parfaitement, dit Dick, c’est le propre domaine de Votre Seigneurie qu’il offre à lord Wensleydale.
    – C’est mon propre domaine, comme vous dites, répliqua le comte, je suis votre très obligé pour cette lettre. Cela m’a montré un repaire de renards. Ordonnez, maître Shelton, je ne serai pas en reste de reconnaissance, et pour commencer, York ou Lancastre, homme loyal ou voleur, je vous mets maintenant en liberté. Allez, au nom de Marie   ! Mais trouvez juste que je retienne votre compagnon Lawless et le pende. Le crime a été public, et il convient que quelque punition suive.
    – Monseigneur, ce sera ma première prière que vous l’épargniez aussi, implora Dick.
    – C’est un vieux coquin condamné, voleur et vagabond, maître Shelton, dit le comte. Il y a vingt ans qu’il est mûr pour le gibet et pour une chose ou pour l’autre, demain ou le jour suivant, il n’a pas grand choix   ?
    – Pourtant, Monseigneur, c’est par amour pour moi qu’il est venu là, répondit Dick, et je serais un vilain et un ingrat si je l’abandonnais.
    – Maître Shelton, vous êtes ennuyeux, répliqua le comte sévèrement. C’est un mauvais moyen pour réussir en ce monde. Quoi qu’il en soit, et pour me débarrasser de votre insistance, je vais encore une fois vous satisfaire. Allez donc tous deux   ; mais de la prudence, et sortez vite de la ville de Shoreby   ; car ce Sir Daniel (que les saints confondent) a une soif terrible de votre sang.
    – Monseigneur, je vous présente maintenant ma reconnaissance en paroles, comptant quelque jour prochain vous en payer quelque chose en actes, répliqua Dick en quittant la chambre.

CHAPITRE V

ENCORE ARBLASTER
    Lorsqu’on laissa Dick et Lawless sortir par une porte de derrière de la maison où Lord Risingham tenait garnison, le soir était déjà venu.
    Ils s’arrêtèrent à l’abri du mur du jardin pour se consulter. Le danger était très grand. Si quelqu’un des hommes de Sir Daniel les apercevait et donnait l’alarme, on leur courrait sus et ils seraient immédiatement massacrés, et, non seulement la ville de Shoreby était un véritable filet tendu pour les prendre, mais sortir dans la campagne ouverte était courir le risque de rencontrer des patrouilles.
    Un peu plus loin, sur un sol découvert, ils aperçurent un moulin au repos   ; et, tout auprès, un très grand grenier, les portes ouvertes.
    – Que dites-vous de nous tenir là, jusqu’à la tombée de la nuit   ? proposa Dick.
    Et Lawless n’ayant pas de meilleure idée à suggérer, ils coururent droit au grenier, et se couchèrent derrière la porte dans la paille. Le jour déclina rapidement   ; et bientôt la lune argentait la neige gelée. Maintenant ou jamais, ils avaient l’occasion de gagner « La Chèvre et la Musette » sans être vus, et de changer leurs vêtements dénonciateurs. Pourtant il était encore prudent de faire le tour par les faubourgs et d’éviter la place du Marché, où, dans la foule, ils auraient couru le plus grand danger d’être reconnus et massacrés.
    Cette course était longue   ; ils devaient passer non loin de la maison sur la grève, maintenant sombre et silencieuse, pour arriver enfin par l’entrée du port. De nombreux navires, comme ils pouvaient le voir par le clair de lune, avaient levé l’ancre, et, profitant du ciel calme, étaient partis. Par suite, les tavernes malfamées le long du port (bien qu’en dépit de la loi du couvre-feu on y vît encore briller des feux et des chandelles), n’étaient plus remplies d’habitués, et ne résonnaient plus de chansons de matelots.
    En hâte, courant presque, leurs robes de moines retroussées jusqu’aux genoux, ils s’enfonçaient dans la neige profonde et

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