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La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christophe Verneuil
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joueur professionnel, ne s'était pratiquement intéressé qu'aux cartes. Il officiait à Reno, Lake Tahoe, Las Vegas, parfois même dans des localités de moindre importance telles qu'Elko ou Bullhead City, et jouait au poker avec les touristes ou les champions locaux. Il n'était pas seulement bon aux cartes, il les aimait, bien plus que les femmes, l'alcool et la bonne chère.
    Tout cela jusqu'au jour o˘ il acheta son télescope.
    Pendant quelques mois, il ne l'utilisa qu'occasionnel-lement et ne se procura que quelques ouvrages d'astronomie. Mais à NoÎl de l'année dernière, il commença à délaisser les étoiles pour la lune et un étrange changement se produisit en lui. Son nouveau hobby devint rapidement aussi passionnant que les jeux de cartes et il se mit à annuler des visites au casino pour étudier la surface lunaire. Vers février, il se colla à l'oculaire du Tasco toutes les nuits o˘ la lune était visible. Vers avril, sa collection de livres consacrés à la lune dépassait la centaine de titres et il ne joua plus aux cartes que deux ou trois fois par semaine. Fin juin, il en était à quelque cinq cents livres et avait de plus entrepris de recouvrir les murs et le plafond de sa chambre de photos de la lune découpées dans de vieux magazines.
    Il ne jouait plus aux cartes et vivait de ses économies.
    Son intérêt pour notre satellite n'avait plus rien d'un passe-temps, mais avait tout de l'obsession.
    Vers septembre, quinze cents livres étaient entassés dans la petite maison. Le jour, il lisait ou, le plus souvent, regardait des clichés de la lune, incapable de comprendre ou de résister à l'attrait qu'elle exerçait sur lui, jusqu'à ce que cratères, monts et mers n'aient plus aucun secret pour lui.
    Avant cette passion maladive, Zeb Lomack était un homme assez svelte. Maintenant, il ne faisait plus de sport et mangeait n'importe quoi-sandwiches, piz-zas froides, g‚teaux-parce qu'il n'avait plus le temps de se préparer de bons petits plats. La lune ne faisait pas que le fasciner, elle le dérangçait aussi. Il l'observait avec émerveillement et terreur, de sorte qu'il avait tout le temps les nerfs à vif et que seule la nourriture pouvait l'apaiser.
    Au début du mois d'octobre, il pensait à la lune à
    chaque instant de la journée, il en rêvait et en voyait l'image exposée à des centaines d'exemplaires dans chaque recoin de sa maison. Un jour, il avait trouvé
    dans une boutique un grand poster en couleurs de la lune, une photo prise par des astronautes, et il en avait acheté cinquante exemplaires, les agrafant aux murs et au plafond de la salle de séjour, les scotchant même sur les fenêtres. Il ôta les meubles de la pièce et se mit à passer des heures entières couché sur le dos, ne voyant plus que les cinquante lunes qui l'émerveil-laient et le terrorisaient à la fois, toujours sans qu'il p˚t savoir pourquoi.
    La nuit de NoÎl, alors que Zeb était étendu sur le dos, il remarqua soudain que quelque chose était inscrit sur l'un des posters, vierges de toute inscription jusqu'ici. Un mot au marqueur était venu polluer la surface de l'astre: Dominick. Il reconnut sa propre écriture, mais ne se souvint pas d'avoir écrit quoi que ce soit. Son regard fut alors attiré par un autre nom, sur un autre poster: Ginger. Puis par un troisième: Faye. Et un quatrième: Ernie. En proie à une angoisse subite, Zeb regarda toutes les affiches. Elles étaient intactes.
    Il ne se rappelait pas avoir écrit ces noms, mais surtout il ne connaissait aucun Dominick, aucune Ginger, aucune Faye. Il connaissait bien quelques Ernie, mais ce n'étaient pas des amis intimes et l'apparition de ce prénom sur la surface lunaire n'était pas moins mystérieuse que celle des trois autres. Il ne pouvait cependant détacher ses yeux de ces noms car il avait l'étrange sentiment de les connaître, comme si ces gens avaient joué un rôle particulièrement important dans sa propre vie et que sa santé mentale et sa survie dépendaient du souvenir qu'il pouvait en avoir.
    Il se détourna des posters et rampa vers la cuisine, poussé par cette faim qui le prenait chaque fois qu'une pensée le rendait nerveux. Il ouvrit la porte du réfrigérateur et constata qu'il était pratiquement vide. Il n'y avait que des bols sales et des boîtes en plastique ayant contenu des aliments, deux cartons de lait vides et une boîte d'oeufs avec un oeuf cassé et un autre collé au carton. Il regarda dans le

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